On ne connaissait jusqu’ici de Sapin, ci-devant ministre du Travail, que l’Accord national interprofessionnel (ANI) mal nommé de « Sécurisation ». Sa nouvelle loi, actuellement devant le Parlement, est plus insidieuse.
Dans un texte sur la formation professionnelle, la loi introduit deux cavaliers juridiques, sur l’inspection du travail et les prud’hommes, et prévoit de modifier le Code du travail par voies d’ordonnances. Et elle fait suite à une année de mensonges, d’entraves et de passages en force qui a vu le projet mis en œuvre, sans consultation, et... avant tout vote du Parlement !
Inspection du travail : une restructuration perverse !En décembre 2012, à un ministère sous pression, Sapin annonce une restructuration de toute l’inspection du travail, et présente aux contrôleurs du travail furieux, une mesure de promotion indéfinie et non chiffrée, leur « seule voie de reclassement ». C’est la stratégie de la marmite : une annonce après six mois de silence, et le sinistre Sapin referme le couvercle six mois de plus, sans rien révéler. Les syndicats font fuiter les projets, réservés à la seule hiérarchie. Et c’est glauque : disparition des sections d’inspection, des contrôleurs du travail, nouvelle couche de hiérarchie. Pour justifier ces bouleversements, « on » (la hiérarchie...) lâche qu’un projet de loi serait en cours. Rien de précis, mais « on » s’informe des relations sociales, lance des coups de sonde.Puis, les notes secrètes se transforment en directives publiques, et le plan est déployé comme un fait accompli, au mépris des agents. Le passage de contrôleurs dans le corps de l’inspection du travail, mis en œuvre à marche forcée, se révélera discriminatoire envers les femmes et les seniors. Immédiatement, le corps est décrété en extinction, sans attendre le passage de la loi1, et les admis envoyés en formation, ce qui désorganise les services. Les premières annonces sur les effectifs sont lourdes de menaces !
Et maintenant le grand-guignol continue...Sapin, bon maquignon qu’il est, glisse son projet au Parlement, sous couvert d’un ANI sur la formation professionnelle qui n’a rien à voir pour se justifier d’un accord qu’il n’a pas : alors qu’il appartenait au ministre chargé du Travail de consulter ses instances (CT, CHSCT), aucune, à l’échelle ministérielle ou régionale, n’a été consultée. Pas grave, on les rassemble dans le désordre ; les votes de consultation, tous négatifs, sont obtenus malgré l’alerte du CSHCT et le lancement d’une expertise sur les répercussions profondes sur les conditions de travail.Face à ces supercheries, une interprofessionnelle regroupant les syndicats du ministère, des UL et UD ( regroupant, avec des variantes locales, CGT, Solidaires, FSU et FO) et élargissant ainsi le champ de la mobilisation aux questions de la formation professionnelle, des prud’hommes, du droit du travail en général, a opposé jusqu’ici une résistance opiniâtre, mêlant grèves, actions et interpellations. Elle peut encore porter ses fruits. Le caractère convergent des préoccupations, la nécessité de défendre ensemble le socle commun de droits pour les salariés, font de cette lutte un combat à vocation plus large. Les difficultés à trouver une majorité au Parlement ont déjà fait reculer le gouvernement sur les prud’hommes. Une brèche ouverte qui permet d’espérer d’autres reculs sur l’inspection du travail et la formation professionnelle et les nouvelles atteintes au droit du travail. Sapin joue gros : si une lutte déterminée arrive à ne serait-ce qu’à le faire reculer, la question de son mandat est en jeu.
Un inspecteur du travail en lutte