L'emploi est une question cruciale dans le cadre de la crise sanitaire et sociale que nous vivons actuellement. 900 000 emplois ont été détruits en 2020, 804 PSE ont été initiés entre mars et décembre 2020, concernant 84 000 ruptures de contrat, les services publics suppriment des postes par dizaines de milliers
D’ici fin 2021, selon l’OFCE, le taux de chômage devrait augmenter à 10,6% et 180 000 suppressions d’emplois seraient causées par des faillites.
Les chiffres rassurants du gouvernement concernant le chômage masquent le fait que la proportion de chômeurs/ses qui ne sont pas inscritEs à Pôle emploi est en constante augmentation. Lorsque les dispositifs de chômage partiel (2,9 millions de salariéEs touchés en novembre dernier…) et les aides sociales seront réduits puis annulés, lorsque les expulsions locatives reprendront, alors on franchira sans aucun doute un pas supplémentaire dans le développement de la misère, déjà bien présente.
Les mobilisations face à cette situation sont difficiles. La raison fondamentale est que les salariéEs qui sont les premières victimes des suppressions de postes sont les moins organiséEs. De plus, la dégradation des rapports de forces, sur le plan militant comme sur le plan du droit du travail, permet aux patrons d’utiliser de nombreux dispositifs pour supprimer des postes sans licencier. Les licenciements économiques ne représentent que 2 % des suppressions d’emplois, noyés dans les ruptures conventionnelles individuelles ou collectives, les licenciements pour faute, les démissions sous pression ou pour d’illusoires projets personnels, les faillites de filiales, les départs en retraite anticipée avec des primes tentantes mais pourtant bien faibles, sous la pression des accords de performance collective.
En conséquence, dans toutes les entreprises menacées de suppressions de postes, une part importante des salariéEs se résignent à partir dans le cadre de PSE ou autres, encouragés par des syndicats en accord avec les directions d’entreprises.
Dans ce contexte difficile, des luttes sont tout de même menées
Des rassemblements, des manifestations, des débrayages ont eu lieu dans un grand nombre d’entreprises et régions. On peut citer Michelin (63), Renault, Sumpar (76), sous-traitant de Safran, Verallia (16), Sanofi, Cogevi (51), L’Équipe, Prestalis, plusieurs importantes enseignes du secteur du commerce, et les TUI.
Des équipes syndicales qui partagent l’envie de lutter, ont entrepris de se regrouper, derrière les TUI. Elles ont cherché à essaimer et à préparer la manifestation du 23 janvier dernier à Paris. La grève à Grandpuits a été un encouragement.
Cette manifestation a eu un résultat numérique certes limité, avec quelque 2 000 personnes, en comparaison avec la manifestation de 2001 qui en avait regroupé 20 000 à l’initiative des LU-Danone. Ce n’est pas dû à la nature de l’initiative mais aux difficultés de la situation : à part à Total Grandpuits, il n’existe pas à cette étape de mobilisation massive contre les licenciements, de grève. La manifestation a été perçue très positivement par ceux qui en ont pris l’initiative. Il s’agissait d’une première étape, d’un premier succès à transformer.
Notre orientation pour avancer combine différents niveaux
Le premier est la tentative de construction de mobilisation contre les suppressions d’emploi, quelle que soit leur forme : refuser les licenciements, les suppressions de postes, les fermetures de sites, mais aussi la casse des outils de production, des services publics et l’augmentation des cadences de travail.
Le second niveau est le développement de revendications unifiantes, d’un programme d’autodéfense du monde du travail, en particulier de partage du temps de travail et d’augmentation des salaires : la revendication classique d’échelle mobile des salaires et des heures de travail, travailler moins, sans perte de salaire, pour travailler touTEs. Les 28 heures hebdomadaires permettraient d’éradiquer le chômage. Ces revendications se combinent avec celles de l’interdiction des licenciements et des suppressions de postes, la réquisition des entreprises qui licencient, en particulier celles qui versent des dividendes, reçoivent des subventions publiques et licencient, et avec celle de la reconversion sans perte d’emploi des entreprises qui ne peuvent plus continuer à produire pour des raisons économiques ou écologiques, après inventaire et sous contrôle des travailleurEs eux-mêmes.
Le troisième niveau est la reconstruction de mobilisations des chômeurs et précaires, en lien avec la question du partage du temps de travail et de l’assurance chômage. Nous devons encourager la reconstitution de collectifs locaux, en partant des agences Pôle emploi, d’intérim et autres.
Enfin, il faut faire de la bataille pour l’emploi une affaire politique, qui montre les contradictions de la situation : un gouvernement prêt à lâcher des milliards d’aides aux patrons mais qui ne donne pas un sou aux salariéEs, aux jeunes, à touTes celles et ceux que l’accélération de la crise sociale par la pandémie plonge dans la misère et condamne aux banques alimentaires ou aux expulsions de leurs logements. Ou qui pousse certainEs à aller travailler au risque de leur santé et celle de leurs proches, en l’absence d’une réduction drastique du temps de travail qui ralentirait la circulation du virus et permettrait de lutter à la fois contre la pandémie et contre le chômage.