Publié le Mercredi 28 novembre 2018 à 08h17.

Les nouveaux CSE à la SNCF, élus mais pas approuvés !

Du 16 au 22 novembre, des élections professionnelles se tenaient à la SNCF. Les cheminotEs étaient appelés à désigner leurs représentantEs dans les nouveaux CSE (Comité social et économique), par vote électronique. Beaucoup de nouveautés pour un scrutin qui n’a pas bouleversé les équilibres syndicaux. Voici ce qu’on peut d’ores et déjà en dire, avant inventaire plus approfondi.

Les CSE, instaurés par une ordonnance de Macron de septembre 2017, ont été conçus pour remplacer, dans toutes les entreprises, d’ici le 1er janvier 2020, les anciens DP, CE et CHSCT par des éluEs moins nombreux et plus éloignés de leurs camarades de travail. 

Une instance contre les militantEs de terrain…

L’objectif avoué est de pousser plus loin le « partenariat » entre patronat et syndicats. Muriel Pénicaud vantait récemment, devant un parterre de patrons et chefs syndicaux allemands, les CSE comme s’inscrivant dans cette « cogestion à l’allemande » instaurée il y a cent ans outre-Rhin. 

La direction de la SNCF, dans son empressement à mettre en place les nouvelles instances, s’est illustrée d’une part en renvoyant à plus tard, après les élections, les négociations nationales et locales sur les modalités de fonctionnement des CSE (représentantEs de proximité, nombre et mode de désignation des déléguéEs syndicaux, etc.), d’autre part en affichant dès le début sa volonté de réduire drastiquement le nombre d’éluEs et mandatéEs. S’il devait y avoir un représentantE de proximité pour 200 salariéEs, le nombre total d’éluEs titulaires passerait de 6 250 à moins de 2 000. 

... dont s’accommodent volontiers les bureaucraties syndicales

Officiellement, toutes les directions syndicales ont protesté contre la mise en place des CSE. Mais au sommet des appareils, on ne voit pas d’un mauvais œil cette mise à distance de la base et cette instance unique où toutes les informations seraient centralisées et les choix négociés. Ici ou là, la direction de la CGT a ainsi saisi l’aubaine de mettre à l’écart des listes électorales des militantEs syndicaux combatifs et/ou d’extrême gauche, tout particulièrement celles et ceux qui avaient milité pour la grève reconductible au printemps dernier. Comme par hasard, plus de place pour eux !

Les bidouillages de la direction de la SNCF ont échoué

Il s’agissait cette année de la 9e élection professionnelle en 20 ans. Au gré des restructurations et des changements administratifs visant à l’ouverture à la concurrence, la direction a espéré à chaque scrutin voir progresser les organisations syndicales promptes à se faire son relais sur le terrain et à signer les accords proposés : la CFDT et l’UNSA. 

Cette année – au motif de modernité –, Pépy et Cie leur ont fait le cadeau du vote électronique qui, partout où il a été mis en place, a fait baisser le niveau de participation à l’« exécution », c’est-à-dire parmi les plus petites catégories. Au point que des quorums n’y ont pas été atteints, d’où un second tour. La participation par rapport au précédent scrutin de 2015 a baissé de 3,67 % à l’exécution et de 2,68 % à la maîtrise, mais a augmenté de 2,03 % chez les cadres. Pour bien des collègues, il a fallu se prendre la tête avec des problèmes de codes qui ne sont pas arrivés par courrier, ou illisibles, et passer des salles de vote avec urnes et assesseurs, où le vote était concentré sur une seule journée, avec lieu de rencontre et discussion, à des salles vides auxquelles on pouvait accéder pendant une semaine pour trouver comme interlocuteurs... des PC portables esseulés faisant office de bornes de vote. 

Et si l’on se penche sur les effectifs globaux de la SNCF, suppressions de postes oblige, on constate entre 2015 et 2018 une chute modulée : – 6 576 agents d’exécution, – 1 118 agents de maîtrise et + 106 cadres. 

Malgré ces données, les scores des syndicats n’ont pratiquement pas changé comparativement à 2015 : au niveau national, la CGT fait 34,02 % (– 0,31 %), l’UNSA 23,96 % (+ 0,10 %), SUD Rail 17,28 % (+ 0,45 %), la CFDT 14,30 % (– 0,85 %), FO 7,63 % (– 1,53 %).

Quelles que soient les chimères de Macron et Pépy quant à une collaboration heureuse dans de nouveaux cocons appelés CSE, c’est sur le seul terrain de la lutte que continuera à se jouer l’avenir des cheminotEs.

Frédéric Rouvier