Une longue litanie de licenciements et de fermetures de sites industriels commence. Face à cette situation insoutenable, ce ne sont pas des mesurettes qui donneront une perspective aux salariéEs concernéEs. PSA, Technicolor, Air France, Arcelor, Sodimédical, Carrefour, Novatrans, Sealynx, SevelNord, SFR... ce n’est plus seulement une longue litanie de plans « sociaux », de fermetures de sites, de licenciements programmés. C’est la réalité immédiate de milliers de salariéEs qui vont se retrouver dans une semaine, un mois, trois mois, sans travail, c’est-à-dire sans moyen de vivre, sans perspective de retrouver un boulot dans des régions dévastées par le chômage, au tissu industriel miné par des décennies de restructurations de groupes qui avaient bénéficié des aides à la décentralisation. Pour violents et spectaculaires qu’ils soient, ces drames sont loin de couvrir l’entièreté des attaques contre l’emploi. Si les statistiques officielles sont devenues muettes sur la question, les ruptures conventionnelles semblent tomber au rythme de 15 à 20 000 par mois, soit environ 200 000 par an. Un gigantesque PSE invisible. De la même façon, les plans de départs « volontaires » et autres accords de méthode épargnent aux entreprises les aléas des procédures légales de PSE et les recours devant les tribunaux de prud’hommes. Et, dans la fonction publique, la « rumeur » du non-remplacement de deux fonctionnaires sur trois partant à la retraite pourrait bien se vérifier rapidement.Faire payer la crise aux classes populaires signifie, entre autres, pour la bourgeoisie, réduire de manière drastique les capacités de production, notamment en Europe et aux États-Unis. La mondialisation, les délocalisations, le coût du travail sont autant de prétextes à ces attaques frontales qui, avec la montée du chômage, fait peser une chape de plomb sur les possibilités de riposte des salariéEs.Sauvetages bidonsAu-delà de cette propagande, tout un arsenal juridique et des mesures de sauvetage bidons sont mis en œuvre pour tenter d’amoindrir les ripostes et d’empêcher les révoltes. Le ministère du Redressement productif et sa cohorte de technocrates se démènent et jouent les pompiers sur les situations les plus urgentes. Plan de sauvetage de l’automobile, financement des formations ou des programmes de recherche et développement, coup de pouce sur les « contrats de génération » avec 300 000 prévus sur la durée du quinquennat, développement du « contrat de sécurisation professionnelle » qui assure, durant douze mois, 80 % de leur ancien salaire à des licenciéEs économiques suivant une formation, loi visant à obliger un industriel se désengageant d’une usine française à la céder à un repreneur... Autant de dispositifs à l’efficacité douteuse et dont les coûts seront supportés par la collectivité.
Mais le patronat a aussi des idées plus radicales, dans la logique des accords « compétitivité-emplois » : réduction des salaires, perte de jours de RTT, suppression de pauses, engagements de modération revendicative des syndicats voire interdiction du droit de grève et exclusion de l’entreprise des syndicats non signataires. Autant de rêves patronaux devenus réalité aux États-Unis dans l’automobile et l’électronique et en Italie chez Fiat.Difficultés à mobiliserDans ce contexte, construire les ripostes est difficile. Les équipes syndicales, même combatives, peinent à mobiliser l’ensemble des salariéEs concernéEs. De ce fait, les nécessaires démarches d’échanges, de coordination, sont remises à plus tard. L’inacceptable absence des fédérations, des structures régionales, des confédérations dans la popularisation des luttes et des tentatives de mise en commun, rendent ces constructions encore plus difficiles. Pire : ce jeudi 28 juin, alors que les salariéEs, de Technicolor et de PSA manifestent contre les fermetures programmées de leurs sites (respectivement devant le tribunal de commerce de Nanterre à 9 heures et à l’occasion de la réunion du comité de groupe, avenue de la Grande-Armée à 10 heures), la fédération métallurgie CGT appelle à un rassemblement devant le Medef, rue de Varennes ! Pour peser sur la « conférence nationale pour la croissance et l’emploi » des 9 et 10 juillet ? Au bout des luttes sur l’emploi, les succès complets sont exceptionnels. Et peut-être provisoires. Les quelques exemples de luttes victorieuses (Ford, SBFM, Goodyear...) doivent être popularisés pour montrer la possibilité d’arrêter le massacre. À l’opposé du « dialogue social », il faut construire la mobilisation, sur des revendications qui ne dessaisissent pas les salariéEs au profit des technocrates et des bureaucrates. Un programme permettant à touTEs les salariéEs de s’impliquer dans la lutte pour interdire les licenciements et réduire le temps de travail.
Robert Pelletier