Les ordonnances n’ont pas suffi. Avec la loi Pacte présentée le 18 juin par Bruno Le Maire, ministre de l’Économie, le gouvernement entend continuer à dépouiller les salariéEs de leurs droits.
Le cynisme est total puisque l’avant-projet de loi accorde d’un côté aux entreprises la faculté d’inscrire dans leur objet social une prétendue « responsabilité sociale »… tout en leur permettant de l’autre de s’exonérer d’une série d’obligations vis-à-vis de leurs salariéEs en révisant les effectifs à atteindre pour les déclencher (les fameux « seuils »).
Des nouveaux « seuils »
Le droit du travail est en effet différencié : les droits des salariéEs dépendent de la taille de l’entreprise. Quand on sait que le salariat se répartit à parts à peu près égales entre entreprises de plus ou moins de 50 salariéEs (l’effectif qui obligeait à mettre un place un comité d’entreprise et un CHSCT), on comprend l’enjeu pour le patronat : diminuer la part des salariéEs ayant un peu plus de droits que les autres.
Une fois les droits rognés par les ordonnances, le gouvernement décide donc maintenant à qui ils vont s’appliquer en trafiquant les chiffres. Les seuils seront réduits au nombre de trois (11, 50 et 250 salariéEs) et les seuils intermédiaires seront relevés au seuil supérieur. Et ce n’est que s’ils sont dépassés pendant cinq années consécutives que les salariéEs pourront réclamer les droits en découlant. Cerise sur le gâteau, une baisse d’effectif en dessous du seuil sur une seule année remettra le compteur à zéro et les salariéEs devront patienter cinq ans supplémentaires… Autant dire que les boîtes auront, au gré des licenciements ou des ruptures conventionnelles, les mains libres pour s’en affranchir totalement !
Des salariéEs vont perdre des droits
On ne pleurera pas sur le règlement intérieur, code interne de discipline qui concernera moins d’entreprises (le seuil passe de 20 à 50 salariéEs). Mais les droits et obligations concernés sont loin d’être anodins. On citera notamment le barème des indemnités perçus en cas de licenciement abusif, moins favorable quand l’effectif n’atteint pas 11 salariéEs ; le seuil pour l’établissement d’un plan social qui reste à 50 salariéEs mais qui sera plus difficile à franchir ; le taux de majoration de la compensation obligatoire en repos en cas de dépassement du contingent annuel d’heures supplémentaires (pour avoir 100 % il faudra désormais travailler dans une boîte de plus de 50 salariéEs, contre 20 aujourd’hui) ; le local de restauration (seuil relevé de 25 à 50 salariéEs) ; le local syndical (seuil relevé de 200 à 250) ; le financement de la formation professionnelle ; le versement transports (réservé aux entreprises de plus de 11 salariéEs)…
Le gouvernement annonce ne pas vouloir toucher au seuil pour l’emploi de personnes handicapéEs (20 salariéEs) ni au calcul des effectifs pour la mise en place du comité social et économique. Pour le moment ? Nul doute que les parlementaires LREM à sa botte sauront rivaliser d’imagination pour aggraver le texte comme ils l’ont fait pour d’autres…
Comité NPA de l’inspection du travail