Publié le Mercredi 20 janvier 2016 à 11h37.

Renault : Pris la main dans le pot… d’échappement !

Il y a trente ans le nuage radioactif de Tchernobyl devait s’arrêter aux frontières de la France. Il y a trois mois, le scandale Volkswagen ne devait concerner que cette firme automobile allemande. Les mensonges finissent toujours par éclater... Renault, aujourd’hui rattrapé par le scandale, montre que c’est bien toute l’industrie automobile mondialisée qui est frappée.

Il a suffi d’un tract de la CGT-Renault pour que les bourses s’affolent et que l’action Renault perde jeudi dernier 10 % en une seule séance. Dans ce tract dénonçant le manque de moyens et réclamant des embauches, la simple mention de perquisitions faites par la direction générale de la répression des fraudes a provoqué une véritable panique boursière. Cette descente faisait visiblement suite à des tests menés dans le cadre d’une commission technique indépendante, tests qui montraient que des véhicules Renault émettaient trop de polluants.

Le secret de polichinelle

Derrière ces gros titres, il n’y a là qu’un secret de polichinelle connu de tous les salariéEs de l’automobile. Les conditions des tests pollution des moteurs n’ont rien à voir avec les conditions de conduite « normales ». Les conditions « test » sont fabriquées sur mesure pour les constructeurs automobiles. Elles permettent à ces derniers de régler les systèmes de dépollution des moteurs dans des conditions favorables, c’est-à-dire peu coûteuses. Qu’importe que ces systèmes ne fonctionnent pas correctement en conditions réelles, une fois les tests passés, les profits sont encaissés... Une énième illustration de la logique du capitalisme : produire en fonction des profits, quelles que soient les conséquences, notamment pour la santé publique.

Pourtant, il existe aujourd’hui des moyens et des connaissances technologiques pour réduire les émissions de polluants sur les moteurs automobiles. Mais la mise en place de ces procédés impliquerait des moyens – et donc des coûts – que les constructeurs automobiles rechignent à mettre en place. Bien au contraire, Renault a supprimé 7 500 postes depuis 3 ans, dont 2 000 dans son ingénierie. Pour réduire ses coûts d’ingénierie, Volkswagen avait cru trouver la parade en installant un logiciel capable de n’actionner les systèmes de dépollution qu’en conditions de test. Les autres constructeurs font peu ou prou la même chose en optimisant les systèmes de dépollution pour les tests. La nuance est fine…

Le gouvernement au secours de la direction

Face à ces pratiques, le gouvernement s’est empressé de voler au secours de la direction de Renault. Ségolène Royal jurait la main sur le cœur que Renault n’avait pas fraudé, tandis que le député PS de Paris, Christophe Caresche, accusait la CGT-Renault d’avoir fauté en mettant en cause l’entreprise. De son côté, le secrétaire de Force ouvrière, Jean-Claude Mailly, ose condamner la communication du syndicat CGT, la qualifiant de « prématurée », alors que l’événement était déjà discuté sur place par des centaines de salariéEs. A contrario, le secrétaire de la CGT, Philippe Martinez, ancien salarié de l’ingénierie Renault, a rappelé que « dans l’entreprise, il y a eu de l’émotion de voir des policiers arriver ».

Depuis des années, Renault le savait et a les moyens d’y remédier. C’est ce qu’expliquent les syndicats CGT et SUD des établissements de Lardy et de Guyancourt, là où se conçoivent les nouveaux équipements. Cela aurait voulu dire ou des voitures plus chères ou des profits révisés à la baisse. Mais Renault a choisi l’automne dernier de retourner  dans le spectacle du gaspillage et du fric, les courses automobiles de Formule 1 (une dépense d’au moins 500 millions d’euros !), de maintenir les 15 millions de salaire de Ghosn, et d’augmenter sans discontinuer depuis 2010 les dividendes des actionnaires.

Pour les salariéEs, il est temps de passer aux actes !

La direction de Renault a reçu le soutien de Macron qui n’a même pas attendu  pour cela le résultat des enquêtes de ses propres services du ministère de l’Économie ! Couvrant des émissions polluantes bien trop élevées en conditions réelles, Macron et Ghosn doivent rendre des comptes aux salariéEs de l’automobile, ainsi qu’à toute la population. Santé et environnement contre profits, ils ont choisi. Le cirque médiatique que le gouvernement orchestrait autour de la COP21, dont Renault était un des sponsors (sic), n’aura donc pas tenu bien longtemps.

Face à cette complicité coupable, il faut saisir l’occasion pour revendiquer des embauches, en particulier dans les secteurs de la dépollution. Après la COP21 et le plan d’urgence pour l’emploi, il est temps de passer aux actes. Mais ces actes, ce n’est pas le gouvernement qui est capable de les réaliser, c’est aux salariéEs de se saisir de ces questions et de les régler eux-mêmes.

Correspondant