Le président de La Poste est clair : ses objectifs pour 2020 sont avant tout financiers. Ainsi, selon son plan stratégique, le chiffre d’affaire devrait s’établir à 30 milliards et les bénéfices à 2 milliards d’euros...
À titre de comparaison, en 2015, La Poste a réalisé 23 milliards de chiffre d’affaire pour 635 millions de bénéfices. Pour réaliser cette « progression » impressionnante, ce même président déclare qu’il s’appuiera sur le développement et sur la maîtrise des charges. Force est de constater que cette affirmation ne résiste ni à l’épreuve des faits ni à l’épreuve des chiffres !
Les tarifs s’envolent, les effectifs s’effondrent !
Si La Poste réalise des bénéfices depuis plusieurs années, il ne s’agit nullement de la conséquence de son développement. Les nouveaux services du facteur, par exemple, sont aujourd’hui essentiellement une entreprise de communication. Ils font beaucoup parler dans les journaux mais restent très marginaux : 40 millions de chiffre d’affaire attendus cette année et 200 millions en 2020, c’est-à-dire rien face au 10 milliards du courrier ! Il est vrai qu’il serait difficile de proposer de nouvelles prestations, alors que les facteurs ne peuvent même plus assumer leur tâche prioritaire, celle de distribuer le courrier ! Pas étonnant puisque en deux ans, depuis le lancement du nouveau plan stratégique, près de 15 000 emplois ont été détruits ! Au courrier, les résultats ont été obtenus par des augmentations de tarif historiques (jamais vu auparavant) et une saignée des effectifs. Dans son ignoble rapport de début d’année sur le courrier, la Cour des comptes félicitait les patrons de La Poste de leur politique antisociale... mais était contrainte de reconnaître qu’elle avait des limites pas loin d’être atteintes !
Pour y remédier, les pistes évoquées étaient alors de réduire les obligations de service public en ne distribuant plus le courrier tous les jours (ce qui se fait en Italie depuis la privatisation) ou de centraliser les points de distribution dans des batteries de boîtes aux lettres où les usagers viendraient retirer leur courrier…
Réseau peau de chagrin !
Parallèlement à la casse de l’emploi, l’autre grande priorité dans la recherche d’économies réside dans le détricotage du réseau des bureaux de poste. Bien sûr, les patrons de La Poste comme son actionnaire principal, l’État, se vanteront de conserver 17 000 points de contacts. Mais il se garderont bien de préciser le statut de ces derniers.
Jusqu’à récemment, les zones rurales étaient les victimes de la fermeture d’établissements : au 31 décembre 2014, les deux tiers des établissements ruraux étaient des agences postales communales ou des relais poste commerçants, c’est-à-dire au 'RSA du service public' ! Cela ne suffisait pas aux patrons de l’entreprise « publique » qui lancent une attaque de très grande envergure contre le réseau urbain : dès 2016, 250 fermetures de bureaux sont programmées, dont 30 à Paris. Et que l’on ne nous serine pas qu’il s’agit de bureaux en sous-activité ! Ainsi le bureau de Paris-Gare-du-Nord connaît régulièrement de longues files d’attente : fermé ! Il n’a pas la chance de recevoir des « clients à potentiel », des « patrimoniaux », nouvelle cible de La Banque postale...
Le nouveau contrat de présence postale territoriale doit être signé mi-novembre entre l’État, La Poste et l’Association des maires, dont le président est Barouin. Sans surprise, il est encore moins protecteur que ces prédécesseurs pour le service public. Ainsi, avant une fermeture de bureau de poste, une délibération du conseil municipal était nécessaire. Avec ce nouveau contrat, une simple acceptation du maire suffit ! La création du 49.3 municipal !
Sans réaction volontariste des syndicats, des usagerEs et de certains partis et éluEs, le dépérissement accéléré du service public postal est sur orbite !
Bruno Quignard