Publié le Mercredi 3 février 2021 à 10h23.

Solidarité sans frontières face à la nouvelle multinationale automobile Stellantis

Devenue effective, la fusion entre PSA et Fiat-Chrysler crée un ensemble automobile, le sixième constructeur mondial, employant 400 000 travailleurEs sur tous les continents.

Les restructurations, fusions et divorces sont une permanence de l’histoire séculaire de cette industrie. Il a fallu en France des dizaines d’années pour aboutir au maintien de seulement deux firmes, Renault et PSA. Il est des phases où les restructurations sont plus violentes et amples que dans d’autres, et la fusion entre PSA et Fiat-Chrysler intervient dans un contexte inédit marqué par quatre facteurs qui bouleversent les équilibres atteints au début de ce siècle :
– les ventes d’automobiles n’augmentent plus en Europe occidentale, aux États-Unis et au Japon ;
– le territoire le plus en croissance pour cette industrie est devenu la Chine ;
– le déclin irréversible, à l’horizon d’une génération, des motorisations essence et diesel, laisse place à de nouvelles techniques de propulsion fondées sur l’électricité ;
– la pandémie mondiale est pour tous les secteurs de l’économie, dont l’industrie automobile, un nouveau motif de crise.

Les familles Agnelli et Peugeot à la manœuvre

Les deux firmes ont une particularité commune, celle d’avoir toujours comme actionnaire de référence une famille présente depuis plus d’un siècle, à savoir Peugeot pour PSA et Agnelli pour Fiat-Chrysler. Bonjour la modernité du capitalisme 2.0 ! La famille Peugeot a conduit PSA au bord de la faillite, ne sauvant son capital que grâce au sauvetage en 2014 par le gouvernement Hollande et le chinois Dongfeng. Quant à Fiat, son rachat de Chrysler en 2009 a décentré le nouveau groupe vers les États-Unis, avec pour principale source de profits les 4×4 Chrysler à la mode dans une Amérique du Nord shootée au pétrole pas cher.

N’en déplaise à ceux qui vantent les mérites du « vieux » capitalisme industriel, les familles Peugeot et Agnelli se comportent et vont se comporter comme tout actionnaire à la recherche du profit maximum. Les actionnaires PSA, au premier rang desquels la famille Peugeot, viennent de s’attribuer une récompense de 2,2 milliards d’euros en paiement de la sortie de l’équipementier Faurecia du périmètre PSA, ainsi qu’un bonus de 308 millions d’euros.

5 milliards d’économies par an

L’objectif dûment affiché est de réaliser cinq milliards d’économies par an. C’est en Europe, base historique des deux firmes, que les doublons entre sites industriels seront les premiers ciblés. Et c’est en Europe que, pendant cette année de pandémie, les ventes de voitures ont le plus baissé.

Le patron du groupe, Tavares, en rajoute : « Parce que nous sommes défiés par des entreprises comme Tesla... nous ne deviendrons pas un sous-traitant de Tesla ». Tesla, fabricant de voitures électriques de luxe dispose d’une capitalisation boursière supérieure à celle de General Motors, et les autres GAFAM sont aux aguets pour trouver de nouveaux débouchés, tant en termes de matériel électronique que de services de mobilité accompagnant une véritable privatisation de l’espace public. Pour préserver leur capital, il y avait donc le feu au lac pour les familles Peugeot et Agnelli.

Solidarité par-delà les frontières

À méga-fusions, méga-restructurations ! C’est bien à cela qu’il faut se préparer. Le nouveau groupe n’est riche que du travail de 400 000 salariéEs. Mais cette force numérique n’est que potentielle et les directions patronales sont aujourd’hui à la manœuvre pour aiguiser la concurrence entre sites industriels et salariéEs. Nombre de directions syndicales, tant en France qu’en Italie, applaudissent à cette fusion, croyant dans les promesses de Tavares de ne pas fermer immédiatement d’usines.

Les responsabilités des militants, syndicats et courants politiques se réclamant de l’internationalisme, n’en sont que plus précises. À l’opposé de bien des positions conciliatrices, la CGT-PSA a déclaré : « Notre seule perspective d’avenir repose sur la défense inconditionnelle de nos intérêts de salariés en ayant conscience qu’il faudra nous mobiliser par-delà les frontières ». La solidarité entre militantEs et salariéEs du nouveau groupe Stellantis doit se construire, y compris internationalement, dans la ­pratique et dès maintenant.