Publié le Vendredi 3 octobre 2025 à 11h00.

Stellantis Poissy, trois semaines d’arrêt, et après ?

L’usine Stellantis de Poissy, la dernière usine de fabrication d’automobiles de la région Île-de-France, va connaître trois semaines de chômage technique à partir du 13 octobre 2025. 

Les 2 000 salariéEs de l’usine vont donc voir leurs salaires amputés, en ne touchant que 72 % de leur salaire habituel. Soit 240 euros en moins pour une paie de 2 000 euros ! Cette mise au chômage est la conséquence à la fois d’une attaque générale de Stellantis, au niveau européen, et de sa stratégie pour asphyxier spécifiquement l’usine de Poissy.

Six usines en Europe

Cet automne, cinq autres usines d’Europe connaîtront du chômage technique. En Allemagne, l’usine d’Eisenach est mise à l’arrêt les 1er et 2 octobre. En Italie, le site de Pomigliano, près de Naples, sera fermé du 29 septembre au 6 octobre. En Espagne, les usines de Madrid et de Vigo, près de Saragosse, le seront du 6 au 10 octobre 2025. L’usine polonaise Stellantis de Tychy fermera elle aussi pendant huit jours.

La direction de Stellantis justifie ces mesures par la baisse des ventes d’automobiles en Europe. S’il est vrai que la politique de Tavares, l’ancien patron de Stellantis renvoyé par les actionnaires du groupe, avait abouti à des baisses des ventes plus importantes pour Stellantis que pour ses concurrents européens, tout cela est du passé. Avec 1,65 million de voitures vendues au 1er semestre 2025 en Europe, Stellantis y est toujours le numéro deux. Selon ses propres chiffres, fournis pour rassurer les actionnaires, ses commandes ont augmenté de 10 % sur cette même période.

Pas de réelle panique commerciale donc, mais une volonté d’ajuster le plus rapidement possible les niveaux de production aux niveaux des ventes, pour diminuer les stocks et augmenter les profits.

Les patrons opérationnels de Stellantis changent — de Tavares à Filosa, le nouveau depuis le mois de mai, en passant par John Elkann, l’héritier de la famille Agnelli toujours aux commandes. La recherche du profit maximum est toujours là.

Menaces pour Poissy

Aujourd’hui, l’usine de Poissy est l’une des usines les plus menacées du groupe Stellantis en Europe. Le fait que le chômage technique dans cette usine y soit le plus long vaut avertissement.

Les directions patronales ont appris des épreuves de force précédentes, notamment dans les grandes usines de l’industrie automobile. Les décisions de fermeture ne sont annoncées qu’à la fin d’un long processus où les effectifs salariés sont progressivement diminués et la production asphyxiée, faute de plans de charge conséquents. On est dans cette phase-là à Poissy.

Sans remonter à l’époque révolue de 1976 où l’usine employait 27 000 salariéEs, les effectifs y étaient il y a dix ans de 6 200, pour n’être plus que 4 000 en 2019 et 2 000 aujourd’hui. Et rien n’est annoncé en remplacement de l’Opel Mokka, actuellement fabriquée dans l’usine. Rendant compte de cette réalité, Jean-Pierre Mercier, l’un des animateurs du syndicat SUD de l’usine, et par ailleurs porte-parole national de Lutte ouvrière, explique : « la direction déroule son plan de fermeture de l’usine ».

Une affaire commune

Depuis déjà plusieurs mois, des discussions ont été engagées avec les actionnaires qataris du PSG pour construire, sur le site même de l’usine, le prochain grand stade du club. Finis les conciliabules secrets : un comité de pilotage de l’opération s’est tenu le 23 septembre à la mairie de Poissy, et une manifestation devant la mairie, organisée par le syndicat SUD de l’usine, l’a dénoncé.
La fin d’une usine ne concerne pas que ses salariéEs. Tout un réseau de fournisseurs et d’activités est directement impacté. La construction envisagée du grand stade qatari bouleverserait toute une commune et l’environnement géographique. Espérer mettre en échec ces plans patronaux et financiers, ce n’est plus l’affaire des seuls 2 000 salariéEs de l’usine. Au mouvement social et ouvrier d’être à la hauteur de ces menaces.

Jean-Claude Vessilier