En plein mouvement contre la réforme des retraites, le 8 mars a été construit comme une occasion de faire le lien entre le mouvement ouvrier et le mouvement féministe. Partout les manifestations ont exprimé des revendications contre les violences faites aux femmes, pour la défense de nos droits reproductifs, pour les salaires mais aussi contre la réforme des retraites, faisant le lien entre les violences, les attaques sur nos droits et l’exploitation économique des femmes. Un exemple à Toulouse où ce lien a été particulièrement réussi.
Ce 8 mars 2023, 25 000 personnes ont défilé dans les rues de Toulouse, derrière une banderole de tête unitaire réunissant les organisations féministes de la ville et les huit syndicats mobilisés contre la réforme des retraites.
Cette année, la journée internationale de lutte pour les droits des femmes a pris place dans le contexte d’une mobilisation nationale contre la réforme des retraites portée par le gouvernement de Macron. Depuis le début de l’année, les analyses se succèdent pour démontrer les conséquences désastreuses qu’aurait la réforme pour les femmes, creusant davantage les inégalités et les plongeant toujours plus dans la précarité et la dépendance financière. Car en effet, si les salaires des femmes sont inférieurs de 27 % à ceux des hommes, leurs retraites sont quant à elles inférieures de 40 %. Contrairement au discours du gouvernement qui prétend faire des femmes les « grandes gagnantes » de la réforme, celle-ci aura pour effet de décaler l’âge de départ à la retraite sans pour autant annuler les écarts de pension.
Organisations féministes, syndicats et partis politiques coordonnés
Les syndicats appelant à la grève et à des manifestations le 7 et le 8 mars, une réflexion autour de la date spécifique du 8 mars s’est rapidement amorcée entre la coordination toulousaine — qui regroupe un grand nombre d’organisations féministes, de syndicats et de partis politiques — et l’intersyndicale départementale.
La dynamique s’était lancée dès le mois de février à l’initiative de la coordination féministe locale, lors d’une soirée débat portant sur le caractère sexiste de la réforme des retraites qui avait réuni plus de 200 personnes à la Bourse du travail. À la tribune, des travailleuses majoritairement issues de secteurs très féminisés (AESH, infirmières, aides à domicile, employées du commerce) mais aussi une cheminote y avaient témoigné de la réalité de leur métier, des carrières hachées, des temps partiels imposés ou choisis par défaut, des bas salaires et du manque de reconnaissance qui leur est dévolu. L’économiste Geneviève Azam, membre d’Attac, avait quant à elle décrypté la réforme sous l’angle d’une analyse féministe, rappelant les inégalités économiques mais nous invitant également à reconsidérer le modèle de société que nous souhaitons construire, en replaçant au centre les métiers essentiels de la santé, de l’alimentation, de l’éducation et du social, majoritairement occupés par des femmes. Car si les femmes s’arrêtent, le monde s’arrête !
Manifestation unitaire
C’est dans la continuité de cette initiative que l’organisation du 8 mars s’est déroulée, au cœur de la mobilisation contre la réforme, avec la volonté de ne pas éclipser les autres revendications de cette journée : droit et accès effectif à l’IVG, lutte contre les violences patriarcales et les inégalités, droit à disposer de nos corps... Ainsi s’est dégagée la perspective d’une manifestation unitaire, regroupant aussi bien les organisations féministes que les syndicats et partis politiques. Le jour J, la manifestation s’est structurée avec un cortège de tête féministe en mixité choisie, suivi des cortèges syndicaux habituels, et c’est au son des batucadas et des slogans féministes que le défilé s’est élancé.
Regroupant 25 000 manifestantEs, contre 4 500 en 2022, le 8 mars toulousain est une réussite qui marque un tournant majeur dans la mobilisation contre la réforme des retraites par son inscription dans le mouvement féministe et qui porte l’espoir d’une convergence des luttes victorieuse.