Le 16 octobre 2021, à l’initiative du Comité du souvenir des fusillés de Châteaubriant, Nantes et de la Résistance en Loire-Inférieure, nous rendions un hommage particulier aux trois otages fusillés par les nazis et enterrés anonymement dans le cimetière du Petit-Auverné. Ici se sont trouvés réunis les corps de Guy Mocquet, militant des Jeunesses communistes, de Jules Auffret, syndicaliste et élu du PCF à Bondy et de Marc Bourhis, militant trotskiste.
Né en 1907 à Lézardrieux, dans les actuelles Côtes-d’Armor, Marc Bourhis avait 34 ans. Avec Alice son épouse, ils étaient tous deux instituteurs à Trégunc, commune du Finistère située à une dizaine de kilomètres au sud de Concarneau. Dès sa sortie de l’École normale de Quimper, en 1926, Marc Bourhis s’engagea dans la Fédération unitaire de l’enseignement. C’est dans ce syndicat qu’il fit la connaissance d’un autre fusillé de Châteaubriant également instituteur avant de devenir professeur de mathématiques, Pierre Guéguin.
Militant actif du Parti communiste et voisin, à Concarneau, des parents de Marc Bourhis, Pierre Guéguin se lia très tôt au jeune instituteur qu’il convainquit d’adhérer au Parti communiste en 1930. En désaccord avec l’évolution politique de l’Union soviétique et avec le cours suivi par le PC, Marc Bourhis quitta ce parti en 1933, l’année où Hitler devint chancelier du Reich et où il ouvrit les premiers camps de concentration. Marc Bourhis s’abonna alors au journal trotskiste la Vérité et, au niveau syndical, devint le porte-parole de l’École émancipée, l’organe de la Fédération unitaire de l’enseignement.
« L’âme du Parti révolutionnaire dans sa commune »
Dès 1935, ses liens avec les militants trotskistes devinrent plus suivis, notamment au retour dans le Finistère d’Alain Le Dem, avec qui il rejoignit, en 1936, le Parti ouvrier internationaliste. Après l’exclusion du courant de la Gauche révolutionnaire au sein de la SFIO, son animateur Marceau Pivert constitua un nouveau parti, le Parti socialiste ouvrier et paysan (PSOP). Avec la plupart des militants trotskistes français, Marc Bourhis y adhéra et y milita activement.
Mobilisé dès la déclaration de guerre en septembre 1939, Marc Bourhis fut envoyé à la caserne dite « Le Bagne » à Brest, avant d’être muté en mai 1940 comme élément suspect au 137e Régiment d’infanterie de Quimper. Quelques semaines plus tard, en juin, cette unité était bloquée dans sa caserne par l’armée allemande. Libéré rapidement pour reprendre sa classe à Tregunc, Marc Bourhis reprit rapidement contact avec Pierre Guéguin qui avait rompu publiquement avec le Parti communiste à la signature, en août 1939, du pacte de non-agression entre Staline et Ribbentrop, permettant quelques jours plus tard à l’Allemagne nazie d’envahir la Pologne et à l’URSS d’envahir les Pays baltes et une partie de la Pologne.
Dans tout le Finistère, Marc Bourhis et Pierre Guéguin – qui avait été déchu de tous ses mandats comme tous les élus communistes – agirent dans la clandestinité contre l’occupation nazie. En juin 1941, Hitler envahit l’URSS. Le 23 juin 1941, Pierre et Marc improvisèrent un meeting dans un café de la pointe de Trévignon et firent savoir publiquement leurs opinions et leur satisfaction de voir l’URSS dans le camp des alliés.
Le 2 juillet 1941, suite à une dénonciation, Marc Bourhis – que le Commissaire des renseignements généraux présentait comme « l’âme du Parti révolutionnaire dans sa commune » – et Pierre Guéguin furent appréhendés comme agitateurs par la gendarmerie sur mandat d’arrêt du préfet du Finistère et internés au camp de Choisel à Châteaubriant.
Désignés comme otages, Marc Bourhis, Pierre Guéguin et leurs 25 camarades tombèrent sous les balles nazies l’après-midi du 22 octobre à la carrière de la Sablière à Châteaubriant.
Jean-Noël Badaud, David Blanchard, Jean Brunacci, Sandra Cormier, Robert Hirsch, Henri Le Dem, François Preneau, Éric Thouzeau, Catherine Touchefeu
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