Entretien avec Alain Ruscio*
À l’occasion de la sortie de son dernier ouvrage La première guerre d’Algérie, une histoire de conquête et de résistance, nous avons interviewé Alain Ruscio, historien, spécialiste de l’histoire coloniale notamment en Indochine et en Algérie.
Au-delà du coup de l’éventail de 1827, quelles sont les motifs de l’engagement des différents gouvernements, des différentes directions de l’État français dans la première guerre d’Algérie ?
Plusieurs générations de Français ont été éduquées dans l’idée qu’un affreux dey d’Alger qui avait souffleté un brave consul français, c’était la seule cause de l’intervention française. Plus personne aujourd’hui ne s’arrête à cette « explication ».
Cette conquête venait de loin. Il s’agissait surtout de conquérir Alger, Oran et peut-être une partie de la bande septentrionale de l’Algérie, mais ces projets existaient déjà depuis pratiquement le 17e siècle. Ensuite, le passage à l’acte a été fait par la Restauration en 1830.
Les causes sont multiples, comme toujours en histoire. La première est géostratégique, à savoir la volonté de contrecarrer la domination britannique en Méditerranée en général, occidentale en particulier, puisque les Anglais possèdent Gibraltar, Malte comme colonies et que les Français n’avaient que Toulon et Marseille comme positions sur la Méditerranée et voulaient absolument un point d’appui sur la côte nord de l’Afrique. C’est le facteur premier, en tout cas chronologiquement.
Après, il y a eu plusieurs raisons. D’abord une raison qui est très ancienne dans l’histoire française, c’est la notion de mission de la France dans le monde. En particulier auprès des peuples considérés comme inférieurs. N’oublions pas que la France avait déjà perdu un grand atout colonial avec Haïti, qui s’était révolté victorieusement 25 ans plus tôt, et donc imposait à la France la recherche d’un autre territoire colonial. Ensuite l’idée c’est de conquérir, pas seulement l’Algérie mais de commencer à contrôler une partie du nord de l’Afrique pour civiliser les populations, avec la notion de race, d’inégalité des races, qui est très forte. Troisième facteur l’idéologie coloniale, c’est-à-dire la volonté de conquérir des terres nouvelles pour « le bien de la France », donc la volonté d’aider l’économie française par la conquête et l’exploitation de nouvelles terres. Quatrième facteur, la volonté de combattre la pauvreté, en proposant la colonisation comme solution à la question sociale. Le drapeau rouge réapparait sur les barricades lors de la révolte des Canuts (1831 – 1834). Quinze ans plus tard, c’est l’époque du Manifeste communiste qui dit « un spectre hante l’Europe, le spectre du communisme ». Les classes dirigeantes se disent que l’une des façons de détourner la colère des populations exploitées, c’est de leur proposer une solution idyllique : partir sur les terres nouvelles, s’enrichir, devenir propriétaire. Tout se met en place progressivement, même si ce n’est pas dans la tête de chacun des dirigeants, mais il s’agit des facteurs principaux qui expliquent la volonté de conquérir l’Algérie.
L’armée française sort des guerres napoléoniennes, et va être confrontée à un nouveau type de guerre. Quelle forme va prendre cette « première » guerre d’Algérie ?
C’est Charles X qui met en route le départ de l’Armada vers l’Algérie dans les tout derniers moments de la Restauration qui prendra fin avec les Trois glorieuses (27-29 juillet 1830). Il s’agit de ne pas prendre les choses à la légère, et de, non seulement de bombarder Alger, mais de débarquer avec des plans de débarquement très bien faits. C’est une armée considérable à l’époque, qui représente, à peu près, la moitié de l’armée du Premier empire. Ce sont 37 000 hommes qui traversent la Méditerranée, avec un armement nettement supérieur à celui des populations locales, et qui vont très rapidement écraser toute résistance, aussi bien celle des Turcs — puisque à l’époque l’Algérie, la régence d’Alger, est une possession ottomane — que celle les cavaliers arabes et kabyles. Il y a une sorte de « sidération » qui va durer à peu près deux ans, et pendant lesquels l’armée française, si elle ne va pas trop à l’intérieur des terres, contrôle Alger et Oran. La réaction se développe sous la direction de chefs de tribus, élus par leurs pairs, des grands chefs, comme Abd el-Kader. À l’est, c’est le bey Ahmed qui organise une résistance très opiniâtre. Ces deux résistances ne se joindront jamais. Face à cette résistance presque inattendue, l’armée française a de très longues traditions de violence contre les populations civiles, depuis l’armée napoléonienne, à la conquête de l’Espagne, une véritable armée contre un peuple. Les colonnes de cavaliers d’Abd el-Kader et d’Ahmed, mais aussi et surtout la population civile vont souffrir énormément d’une politique d’éradication locale, pas globale. Je récuse le terme de génocide parce que ça n’a pas été un projet : le système avait besoin d’une main-d’œuvre locale, indigène comme on disait. Mais, par contre dès qu’il y avait des germes de résistance ou même sans germe de résistance d’ailleurs, les colonnes françaises qui ont sillonné l’Algérie sont véritablement des colonnes infernales. Avec Bugeaud, il y avait 100 000 soldats français en Algérie qui pillent, qui razzient. Les razzias sont le principal facteur de la destruction de la société algérienne puisque la razzia c’est une colonne française qui arrive dans un village ou dans une petite région et qui prend tout, qui vole le grain, le bétail, (attesté par la presse de l’époque : le nombre de bœufs, de moutons, le tout vraiment extrêmement documenté), et puis qui tue les populations sur place. Le moindre germe soit de résistance, soit même tout simplement le refus, ne serait-ce que la protestation contre les viols car évidemment les hommes des villages qui assistent au viol de leur femme ou de leur mère ou de leur fille se révoltent et sont immédiatement assassinés. La razzia c’était le facteur numériquement le plus dramatique. Il y a d’autres pratiques d’éradication comme des décapitations ; il y a énormément de témoignages sur le fait que des chefs de guerre étaient sommés de ramener des têtes d’ennemis ou des têtes de soi-disant ennemis pour prouver leur valeur au combat et pour éventuellement toucher une prime. Il y a aussi les enfumades, j’en ai référencé trois dans ce livre parce qu’elles n’ont pas toutes été révélées. Quand des populations civiles se réfugiaient dans des grottes, par crainte des colonnes françaises ou tout simplement parce que certains avaient fait le coup de feu avec celles-ci, les Français pour éviter de perdre des hommes mettaient le feu à des fagots à l’entrée des grottes et laissaient les gens mourir soit brûlés vifs, soit asphyxiés. Des destructions auxquelles s’ajoute une répression « légale », comme la guillotine qui a été presque immédiatement importée, en 1842, par la « civilisation » française en Algérie.
Bien avant la guerre d’indépendance, il y a eu des centaines d’Algériens, soit considérés comme droits communs, soit comme résistants, qui ont été guillotinés en place publique. Au total, une estimation qui à mon avis est difficilement contestable, est que la population algérienne en général, une très grosse majorité de civils, a été éradiquée à peu près de 500 000 morts. Sur une population qui était à l’époque entre 3 et 4 millions d’Algériens au début de la conquête, soit entre 12 et 20 % de la population, ce qui est un chiffre énorme rarement atteint dans l’histoire.
Comment s’est manifestée, organisée la résistance des Algériens ? Il y a l’image d’Abd el-Kader, bien sûr, sa résistance militaire, mais aussi la construction, d’un État, d’une administration dans cette situation de guerre.
Il faut savoir que les Français ont contrôlé toute la bande nord de l’Algérie, donc Oran, Alger et, à partir du 1837, Constantine, plus une bande de terre étendue progressivement vers l’intérieur, ne serait-ce que pour implanter les colons, ce qu’on pourrait appeler l’Algérie utile. Mais Abd el-Kader et Ahmed avaient de vastes espaces où ils pouvaient se replier et commencer à engager la résistance armée, à mettre en place des structures. Je ne sais pas si on peut parler d’un État algérien déjà à l’époque, j’utilise l’expression « d’élément d’une administration centralisée ». On peut dire qu’Abd el-Kader a un raisonnement politique visant à mettre en place une administration centrale contrôlant des régions assez vastes même si elles étaient moins peuplées. C’est aussi la levée de l’impôt, la mise en place d’une administration, de fonctionnaires qui rendaient des comptes à « l’État » central, au pouvoir central, avec la naissance d’une industrie. Il y a des témoignages de Français, surpris de constater qu’il y avait des ateliers, un début de sidérurgie, d’industrie d’armement. Abd el-Kader a combattu avec des armes qui étaient liées au trafic international et les Anglais, par exemple, ont armé la résistance.
S’il n’y a pas eu d’alliance entre Ahmed et Abd el-Kader, ce dernier a tenté une alliance avec les Kabyles, parce que la Kabylie était une entité quasi autonome au cœur de l’Algérie ; mais il n’y a pas réussi, et la Kabylie a été une sorte de réduit qui a résisté très longtemps, puisque Bugeaud a échoué à deux reprises et c’est seulement Saint-Arnaud, qui a réussi vers 1845-146, à « soumettre » la Kabylie, alors que c’était une zone d’insécurité pour l’armée française.
On a une unification sur la base de l’unité religieuse, de l’unité linguistique, mais je ne m’aventure pas sur le terrain de savoir si c’était une nation. Je pense qu’il y avait les ingrédients d’une nation qui ont été un peu cristallisés par la présence étrangère. À partir de ce moment-là, même si les Algériens ne se considéraient pas comme Algériens en tant que tels, ils considéraient qu’ils appartenaient à un même peuple, qui était soumis aux mêmes pressions d’un pouvoir, d’une armée et d’une administration étrangères, et qui donc par réaction, commençaient à se resserrer autour de chefs charismatiques. Dès ce moment, il y a les embryons d’une nation, et en même temps d’un État, la construction progressive d’une unité nationale, en gestation.
À la fin de la guerre, quelle est la réalité de l’implantation française, ses rapports avec l’existence de la société algérienne ? La France est implantée dans les grandes villes côtières, et puis ici ou là dans les autres régions, mais faiblement. Et comment est-ce que ça ouvre la porte à la deuxième phase des rapports entre l’Algérie et la France, c’est-à-dire la colonie de peuplement après 1852.
La conquête n’était pas une fin en soi. Elle avait comme objectif premier d’implanter des populations pour ne serait-ce que répondre à la nécessité de lutter contre la misère en France, en montrant qu’il y avait la porte pour une vie nouvelle pour ces populations. Dans un premier temps, et pendant pratiquement toute la période que j’ai étudiée, en tout cas jusqu’à 1848, les colons non-français ont été majoritaires. Il y a eu énormément de pauvres du sud de l’Europe, de Malte, d’Italie, d’Espagne, et d’Europe centrale, d’Allemands, de Suisses, qui sont partis en Algérie, sur ce mythe de la vie nouvelle. Et beaucoup de Français. Les colons sont partis en toute inconscience ; des familles entières sont parties, trois générations, les grands-parents, les parents, les enfants, même en bas âge, pensant trouver une vie nouvelle. Ils ont effectivement bénéficié de la situation coloniale, c’est-à-dire la spoliation des propriétaires, des paysans algériens littéralement privés de toute propriété, ne serait-ce que parce qu’ils n’avaient pas d’actes de propriété. Les colons ont appliqué leur propre loi en disant « vous n’avez pas d’actes, donc cette terre est libre et donc je la prends ». Cette spoliation a porté sur des centaines de milliers d’hectares littéralement volés aux paysans algériens, pour l’implantation des colons. Cette première génération est arrivée avec plein d’illusions, mais des conditions matérielles très pénibles, puisqu’il y a eu là aussi des dizaines de milliers de morts, ne serait-ce que par les conditions d’hygiène. Ils sont arrivés sur des terres qu’on leur avait présentées comme idylliques, fertiles, alors que souvent elles ne l’étaient pas. Il leur a fallu les travailler, les débroussailler parfois. Beaucoup sont arrivés alors qu’il n’y avait même pas de maisons pour les accueillir, donc ils ont construit leur propre maison. Parfois il n’y avait pas de bétail, pas d’instruments aratoires. C’est cette première génération de colons — contrairement à celle qui a suivi avec l’immensité des fortunes, avec les gros colons, la vigne, le blé, enfin les gens qui avaient des milliers d’hectares — qui s’est battue en Algérie. Cette première génération c’était vraiment des pauvres bougres attirés par une propagande mensongère. Ça ne retire rien au fait que c’était une spoliation, mais eux-mêmes ont été en quelque sorte des victimes collatérales de la propagande colonialiste. L’implantation européenne a été une spoliation de l’immense majorité des paysans algériens.
À propos de souffrances, j’ignorais complètement la souffrance des soldats français, de l’armée française...
Je l’ai découverte même si je m’en doutais un peu parce que j’avais travaillé sur la conquête de l’Indochine. C’est bien plus grave dans le cas de la conquête de l’Algérie, tout simplement parce que les officiers étaient soit des nobles, les Saint Arnaud, La Moricière, issus de familles aristocratiques, soit des gens de l’élite « sociale » comme Bugeaud ou Clauzel. Tous ces gens-là étaient immensément riches ; un Bugeaud était propriétaire terrien dans le Périgord, Clauzel avait été colon en Haïti, à l’époque Saint-Domingue. Tous étaient d’une part très riches, d’autre part avaient un mépris complet pour le peuple en général, comme ils l’ont prouvé dans les répressions de 1848. Cavaignac par exemple, un des conquérants de l’Algérie, lors de la révolte des ouvriers de juin 1948, a pris la tête des colonnes pour briser la résistance, tuer des centaines d’ouvriers dans les rues de Paris, en les assimilant aux bédouins avec des expressions comme « tuer les bédouins ». Ces gens-là étaient des aristos à l’ancienne, qui considéraient que leurs soldats c’était la piétaille. Certains étaient très démagos comme Bugeaud qui se présentait comme le père de ses soldats. L’immense majorité des soldats, qui n’étaient pas tous volontaires, étaient des conscrits qui avaient été tirés au sort et, lorsqu’un riche dans un village ou un bourgeois tirait un mauvais numéro, il rachetait son mauvais tirage en mettant à sa place un pauvre bougre de paysan, d’ouvrier ou d’artisan. C’est vraiment le peuple français qui a fourni un grand contingent de soldats à l’armée d’occupation. Ces soldats ont été victimes des mauvais traitements, de brutalités, des coups de cravache. Il y a même un article de la presse de l’époque qui s’appelle La torture en Algérie, contre des soldats qui s’étaient rebellés, ou simplement avaient désobéi ou avaient essayé de déserter. Les conditions d’hygiène étaient absolument terribles. Il n’y avait aucune protection contre ce qu’on appelait les fièvres, c’est-à-dire le paludisme. Le choléra est arrivé très vite en Algérie. Inconnu en terre africaine avant la conquête, ce sont les colons, certes involontairement, qui l’ont apporté. Les populations algériennes, civiles et les soldats sont morts par milliers, par dizaines de milliers. Les conditions d’hygiène, les marches harassantes dans les campagnes lors desquelles ils pouvaient faire plusieurs dizaines de kilomètres par jour sans protection particulière contre le soleil, parfois avec des nourritures insuffisantes, pas d’eau... La conquête de l’Algérie n’a fait pratiquement que des victimes, les seuls qui s’en sont sortis, ce sont les classes dirigeantes de France, les idéologues du Parti coloniste, dans les termes de l’époque, et puis ce sont les officiers qui se sont fait des galons sans trop de gloire militaire avec les pratique décrites...
Tu fais peut-être plus qu’un premier bilan de l’historiographie, beaucoup de références sur ce qui a été déjà écrit, publié. Penses-tu que, avec ce travail, tout ce qui est fait depuis quelques années maintenant, et y compris pour utiliser le fameux « en même temps » la reconnaissance des assassinats d’Audin, de Larbi Ben M’hidi, dans une société française qui se déporte vers l’extrême droite, une vraie histoire de la France Empire colonial, puisse s’imposer au-delà des effets de manches et des effets d’annonce ?
Il y a effectivement toute une école historiographique française critique. Il y a toujours eu une histoire critique, je pense à Charles-André Julien, par exemple, parmi les vétérans, qui a eu le mérite d’écrire une des premières histoires critiques de l’Algérie. Dans la génération actuelle, des gens travaillent sur la colonisation, surtout sur l’Algérie, il y a trop peu de gens qui travaillent sur la Tunisie, le Maroc, même l’Indochine. Le travail que l’on fait porte ses fruits. Parmi les historiens reconnus du fait colonial, il n’y en a quand même pratiquement plus aucun qui défend un bilan, ou même des aspects positifs de la colonisation française. Il y a la différence fondamentale, un fossé, entre cette histoire critique qu’on essaye de mettre en place, par exemple, autour d’un site qui s’appelle Histoirecoloniale.net, avec des collègues et amis comme Gilles Manceron, Fabrice Riceputi, etc. et d’autres qui y contribuent avec le monde politique. C’est ainsi qu’on a encore d’une part l’érection honteuse de la statue de Bigeard, à Toul, scandale mémoriel, humain et la résurgence effectivement de la « nostalgérie », avec des rues baptisées Hélie de St-Marc, ou d’anciens de l’Algérie française et le discours présidentiel qui fait à peu près de l’unanimité des historiens contre lui. Macron donne l’impression d’être un grand novateur lorsqu’il parle de l’assassinat d’Audin ou celui de Larbi Ben M’hidi, ou du 17 octobre 1961. Mais à chaque fois c’est pour essayer de limiter le rôle propre de l’État français. C’est indéniablement un choix politique de Macron, lorsqu’il parle du 17 octobre 1961, il parle toujours de Papon, mais il ne parle jamais de l’État français en tant que tel, donc par l’intermédiaire de Michel Debré, Roger Frey et même la figure tutélaire de De Gaulle qui portent une responsabilité première dans les massacres du 17 octobre. Pour Larbi Ben M’hidi c’est la même chose, Macron donne l’impression d’être un grand résistant face au révisionnisme, en réalité il oublie de dire qu’il y a eu des centaines de milliers d’Algériens torturés, des dizaines morts sous la torture, qui n’ont pas la chance d’avoir un nom connu, mais qui devraient être honorés de la même façon. Il y a un fossé entre l’histoire critique, qui à mon avis est l’histoire réelle, et puis le regard un petit peu paternaliste condescendant de Macron et des macronistes sur ces pages d’histoire. Le 8 mai 1945 est complètement ignoré aujourd’hui qui imposerait de dénoncer d’abord la figure de De Gaulle.
Est-ce que tu vois un point qu’il serait important de soulever et qui ne l’aurait pas été dans cet échange ?
Oui. Je ne sais pas si on peut parler de révélation, mais ce sur quoi j’ai beaucoup insisté, c’est que la véritable vague colonialiste n’a pas commencé avec la 3e République contrairement à ce que beaucoup disent encore aujourd’hui. Qu’auparavant c’était des petites escarmouches et que la véritable colonisation, c’est à partir de la 3e République, Jules Ferry, etc. Je pense que c’est la conquête avec la première guerre d’Algérie qui a été vraiment l’élément fondateur et qui ouvert la voie à d’autres conquêtes. Parce que d’une part, sous le Second Empire il y a eu la Kanaky, les premiers débarquements en Indochine, toutes ces conquêtes qui ne peuvent s’expliquer que par la persistance d’un esprit colonial dès le milieu du 19e siècle.
Entretien réalisé par Robert Pelletier.
Alain Ruscio est historien, spécialiste de la colonisation française, il vient de publier La première guerre d’Algérie, une histoire de conquête et de résistance (éditions La Découverte)