Publié le Mercredi 15 janvier 2020 à 12h43.

Autriche : alliance entre Conservateurs et... Verts

Les élections du 29 septembre 2019 ont désigné deux nets vainqueurs. D’une part le Parti conservateur (ÖVP : Parti populaire autrichien) avec 37,5 % des voix et d’autre part le Parti vert (Grüne Partei) avec 14 % (+ 10,1 %). Les sociaux-démocrates (SPÖ : Parti social-démocrate d’Autriche) ont reculé à 21,2 % (– 5,7 %), comme la droite xénophobe du FPÖ (Parti de la liberté d’Autriche), qui est tombée à 16,2 % (– 9,8 %).

Deux ans auparavant seulement, le Parti vert avait subi une défaite douloureuse. Cette fois, porté par la vague du mouvement pour le climat, il a bénéficié d’une progression considérable. Le score des conservateurs du Parti populaire est l’expression d’une véritable hégémonie conservatrice dans le pays. Mais l’ÖVP profite aussi de la saignée subie par le FPÖ, formation nationale-populiste et post-fasciste, qui paye ainsi l’addition du scandale de corruption qui a touché sa direction, tout en arrivant à se stabiliser à un niveau important. La défaite du SPÖ est cuisante, puisque le Parti social-démocrate obtient son pire résultat depuis cinq décennies.

Impératif de compétitivité 

Après trois mois de négociations pour former une coalition, les dirigeants Sebastian Kurz (ÖVP) et Werner Koegler (les Verts), ont présenté le programme de cet attelage le 2 janvier. La classe dirigeante, à travers ce programme, signifie clairement qu’elle veut soumettre tous les secteurs de la société à l’impératif de la compétitivité des entreprises exportatrices.

Le nouveau gouvernement ne touchera à aucune des mesures antisociales et racistes du gouvernement ÖVP-FPÖ de 2017-2019. Le programme de gouvernement poursuit une politique d’asile inhumaine et la migration est aussi subordonnée à l’impératif de la compétitivité.

L’exécutif ÖVP-Verts veut baisser de manière significative les impôts sur le revenu et sur les bénéfices des entreprises. Le taux d’imposition maximal des millionnaires doit être revu à la baisse. La seule réduction de la fiscalité des entreprises amènera une diminution de 2 milliards d’euros des rentrées fiscales. En même temps, ce gouvernement entend respecter la règle du zéro déficit et a pour objectif de ramener à moins de 60 % du Produit intérieur brut la dette publique, soit en dessous de la norme fixée par l’Union européenne.

Enfumage écologique 

Les médias et le Parti vert ont propagé l’idée que le programme gouvernemental contenait tout de même des avancées vers la réduction des émissions de gaz à effet de serre. C’est faux et cela revient à tromper l’opinion publique.

Le texte gouvernemental ne se prononce pas sur les grands projets fossiles en cours, comme l’agrandissement de l’aéroport de Vienne-Schwechat ou divers projets autoroutiers. Le chancelier Kurz a souligné que tous ces projets seraient réalisés. Un choix qui pèse d’autant plus lourd que l’on a appris que les émissions de CO2 du trafic routier avaient de nouveau augmenté en 2019, et cela pour la cinquième année de suite.

Le programme veut que la production d’énergie provienne totalement des énergies renouvelables jusqu’en 2030. Il postule même pompeusement qu’à partir de 2040 l’Autriche sera neutre sur le plan des émissions de gaz à effet de serre. Mais comme il ne mentionne pas une seule mesure concrète pour y arriver, ces passages ne sont que des béquilles pour la propagande des Verts.

Les Verts ne sont pas un parti œuvrant pour la protection du climat, mais un parti libéral soutenant la compétitivité des multinationales autrichiennes. Les mobilisations du mouvement pour le climat ont entraîné le succès électoral du Parti vert, sans qu’il y contribue lui-même. Entré au gouvernement, il mène une politique contre des acquis sociaux à défendre et utilise la protection du climat comme une pure opportunité de propagande.

L’alternative est claire : il s’agit de construire une opposition large, au niveau de la société, à ce gouvernement et un puissant mouvement pour la protection du climat, un mouvement capable d’imposer des mesures réelles.

Christian Zeller

Article publié dans le n°361 (9 janvier) de solidaritéS (Suisse).