Le 21 novembre, un nouveau confinement est entré en vigueur en Autriche, a priori pour trois semaines. Le taux d’incidence nationale a dépassé 1 000. C’est encore pire en Haute-Autriche et autour de Salzburg, où les hôpitaux trient les patientEs à leur arrivée car les services sont saturés… Depuis fin octobre, les nouvelles infections montent en flèche mais le parti conservateur au pouvoir, l’ÖVP, a longtemps refusé de prendre des mesures. Un mélange de tactique électorale, d’intérêts économiques et d’arrogance idiote.
En Haute-Autriche le nombre de contaminations est d’autant plus haut que le taux de vaccination est bas… et les résultats électoraux de la droite et de l’extrême droite élevés. Le nouveau parti des opposants aux mesures sanitaires, le MFG (« L’humain, la liberté, les droits fondamentaux ») y a obtenu 6 % des voix aux élections régionales de septembre. L’ÖVP a cherché à s’adresser à cet électorat, ainsi qu’à la base du FPÖ d’extrême droite… en évitant de renforcer les mesures sanitaires pour ne pas « perdre » ces électeurEs – un calcul électoral lourd de conséquences.
De la « lumière au bout du tunnel », vraiment ?
L’été dernier, l’ex-chancelier Kurz1 parlait déjà de la « lumière au bout du tunnel ». Cet été, il a encore déclaré que la pandémie était finie, en pariant sur un taux de vaccination assez élevé en automne mais celui-ci stagne depuis à environ 60 %. Un nouveau confinement était catégoriquement exclu – du moins pour les vaccinéEs. Mais, tout a vite changé. Le gouvernement a d’abord imposé une sorte de pass sanitaire sur les lieux de travail, puis évoqué un confinement des non-vaccinéEs pour pousser à la vaccination, avant de se résigner à un confinement national et généralisé.
Avec les malades et les victimes du covid, ce sont les travailleurEs qui portent de nouveau le poids de la crise sanitaire. En premier lieu les soignantEs, qui se trouvent une fois de plus surchargés de travail. Le manque de personnel est pire qu’avant la pandémie, car beaucoup ont démissionné l’an dernier. La charge de travail s’accroît aussi dans les écoles, avec la mise en place chaotique d’une garderie au service du patronat : les cours sont à distance, mais les écoles doivent accueillir les enfants dont les parents ne peuvent pas télétravailler. Pour beaucoup de travailleurEs, le confinement se résume encore une fois à : travail, oui, loisirs, non.
À qui profitera la colère ?
Deux jours avant le nouveau confinement, une manifestation contre les restrictions sanitaires rassemblait des dizaines de milliers de personnes à Vienne. Il y en avait déjà eu l’hiver dernier, mais le mouvement s’était « endormi » en été. En première ligne, le FPÖ, les « Identitaires » et des groupuscules fascistes arborant une banderole « Contrôlez la frontière, pas votre peuple ».
Mais touTEs les manifestantEs ne sont évidemment pas d’extrême droite. Si celle-ci occupe le terrain, c’est aussi à cause de l’absence de contestation de la gestion catastrophique du gouvernement. Pourtant il y a de quoi dénoncer sa politique, sans pour autant nier le danger de la pandémie.
Il y a quelques semaines, des milliers de soignantEs manifestaient dans toute l’Autriche contre les mauvaises conditions et la surcharge de travail. Mais la bureaucratie syndicale n’a pas cherché à amplifier ces mouvements pour leur donner une chance de gagner. Cette nouvelle vague épidémique pourrait bien rallumer la colère des soignantEs et donner l’occasion aux travailleurEs de faire entendre leurs véritables intérêts.
- 1. Sur les déboires de Kurz, voir « Autriche : "Qui paie, décide" ou la chute du chancelier qui voulait tout acheter », paru dans l’Anticapitaliste n° 587.