À ces élections, les plus « chaudes » depuis la dictature militaire au Brésil, Dilma Rousseff, la candidate d’une large coalition de partis dirigés par le PT, a été réélue Présidente ce dimanche 26 octobre avec 51,64 % des voix. Environ 3,5 millions de votes l’ont séparée de son adversaire, Aécio Neves (sur un total de plus de 112 millions d’électeurs)...La victoire de Dilma n’a émergée que dans la dernière semaine de campagne : les premiers sondages pour le second tour donnaient un léger avantage à son adversaire. Certaines caractéristiques de ce second tour rappelaient les élections précédentes (2006 et 2010), avec un PT au gouvernement qui se battait contre des candidats des coalitions dirigées par le PSDB : il y a bien eu une bipolarisation gauche droite. Bien que les différents gouvernements PT n’aient pas été, de fait, de vrais gouvernements de gauche, les candidats PSDB ont toujours été encore plus à droite...
Mobilisation généraleCette fois, il y avait une grande nouveauté : le risque d’une défaite de Dilma Rousseff était réel, ce qui a entraîné une grande mobilisation des militantEs du PT et des militantEs des mouvements sociaux, comme on n'en avait pas vu depuis 2002 (la première élection de Lula).Gilberto Carvalho, ministre en charge des relations avec les mouvements sociaux, a fait une déclaration peu après l’annonce des résultats du vote : « Nous avons fait plus de 260 réunions à travers le pays, avec 300, 400, 500 militants. Les mouvements sociaux nous ont dit : "nous avons de profondes critiques à vous faire, mais nous savons que l’autre projet, pernicieux, serait bien pire". Alors ils ont sillonné les villes pour faire notre campagne. (...) Nous avons fait une autocritique sur notre manque de dialogue, sur la distance, tant du parti que du gouvernement, par rapport à notre base ».Pour sa part, Lula a fait plusieurs appels au PT afin qu’il cesse d’être un « parti des cabinets » et redevienne « un parti de militants », comme si lui même ne portait pas une responsabilité majeure dans le cours que le PT a pris depuis son arrivée au pouvoir...Retour à la normale...Plus que les critiques de Gilberto Carvalho ou les appels de Lula, ce qui a contribué à la mobilisation a bien été le risque de la victoire PSDB. Une partie des militantEs du PSOL, le principal parti d’opposition de gauche aux gouvernements du PT, a participé à cette mobilisation. Ainsi le PSOL n’a pas soutenu Dilma Rousseff, mais a adopté le mot d’ordre « pas de vote à Aécio » : les militantEs du PSOL ont donc voté nul ou pour Dilma Rousseff.Ce climat « gauche contre droite » a été crucial pour la victoire de Dilma. Mais les élections passées, les choses reviennent à la normale. Ainsi, dans son discours de victoire, Dilma Rousseff s’est déclarée « ouverte au dialogue »... avec la droite défaite, et a précisé qu’elle « ne veut pas d’un pays divisé ». Rien ne dit qu’elle et le PT soient prêts à suivre une ligne s’appuyant sur la mobilisation sociale qui a commencé, pour chercher à l’approfondir contre la droite. Et vu sa composition actuelle, rien n’est plus improbable que le PT redevienne « un parti de militants ». Par ailleurs, s’il l’essayait, il provoquerait une crise immédiate avec la coalition de partis de centre-gauche, centre-droit et clairement de droite, qu’il dirige.
De Sao Paulo, João Machado