Publié le Mercredi 6 octobre 2010 à 21h54.

Brésil : des horizons à construire

Le premier tour de l’élection présidentielle et les élections de gouverneurs, députés et sénateurs du 3 octobre ont été marqués par la commune volonté des trois principaux partis de poursuivre la politique libérale et antiécologique de Lula. Il y eu très peu de différences entre les propositions politiques des trois principaux candidats, Dilma Rousseff (46,9 %) du Parti des travailleurs (PT), José Serra (32,6 %), du Parti social démocratique brésilien (PSDB) et Marina Silva (19,3 %) des Verts. Tous les trois ont conforté le patronat avec des promesses de réforme fiscale, de réduction des cotisations sociales et de protection de leurs intérêts financiers. Dilma Rousseff, qui a utilisé l’immense popularité de Lula, est malgré cela en ballotage avec José Serra.

Toute la campagne de la dauphine de Lula a été axée sur le maintien du modèle néolibéral, assaisonné de quelques mesures sociales et « assistancialistes ». Le PT a pour cela fait alliance avec le Parti du mouvement démocratique (PMDB) qui présente comme vice-président un homme mêlé à des affaires de corruption. José Serra promet d’augmenter le salaire minimum de 5,6 %, soutient le projet très contesté d’usine hydroélectrique de Belo Monte et veut paver la route transamazonienne... Marina Silva, ex-ministre PT de l’Environnement, a mené une campagne avec des mesures productivistes labellisées « développement durable ». Son bon résultat en fait une cible courtisée pour le deuxième tour.  Une différence pourrait se faire entre les deux candidats du deuxième tour sur les rapports avec le Venezuela, la Bolivie et l’Équateur. Lula a utilisé sa réputation de président de gauche modéré pour maintenir les relations avec ces pays tout en cherchant à assurer la suprématie du sous-empire. Dilma Rousseff fera la même chose tandis que José Serra ne pourra pas jouer dans le même registre que Lula étant donné les alliances de son parti. Mais le modèle de développement appliqué jusqu’à maintenant suivra le même chemin : accroissement de la concentration du capital et de la propriété, prospérité des banquiers qui sont les grandes gagnants de cette période. La volonté des travailleurs et des masses misérables pour une transformation de la société a été amortie par les programmes assistancialistes. L’allocation familiale, touchée par 12 millions de familles et ne représentant que 1 % du PIB, a eu un résultat déterminant dans le soutien à la politique de Lula. Les dirigeants des mouvements sociaux et des syndicats les plus importants ont été cooptés par le gouvernement à des postes de responsabilité. Le niveau de syndicalisation est passé à 17,7 %, en baisse de 2 % entre 2008 et 2009. Menant une campagne avec de claires références de classe et des propositions anticapitalistes, le candidat du Parti socialisme et liberté (Psol), Plinio de Arruda Sampaio, a centré ses interventions sur les droits des travailleurs, pour une nouvelle répartition des richesses, la réorganisation des services publics, la réforme agraire, le retrait des troupes d’Haïti, la solidarité internationaliste. Avec un faible résultat (0,87 %), il obtient la quatrième place parmi les neuf candidats à la présidence de la République. Le Psol conserve trois députés fédéraux à São Paulo et Rio de Janeiro. Il passe de trois députés d’État à quatre et obtient un sénateur et probablement une sénatrice. L’ex-candidate à la présidence, Heloisa Helena, n’a pas réussi à se faire élire sénatrice de son État d’Alagoas, et la députée Luciana Genro a aussi été battue. Il s’agit maintenant d’essayer d’unifier les aspirations étouffées des travailleurs à partir des propositions faites par le Psol. Béatrice Whitaker