Publié le Vendredi 12 juillet 2024 à 12h00.

Centrafrique : le pillage comme rétribution

Mercenaires russes et soldats rwandais protègent le pouvoir autoritaire en Centrafrique. En retour, ils font main basse sur les richesses du pays.

 

Hier, aux portes de Bangui, la capitale de la République centrafricaine (RCA), les différents groupes armés qui sévissent dans le pays ont été en partie défaits sous l’action conjuguée des troupes de Wagner, de la mission onusienne, la Minusca, et des forces spéciales rwandaises.

Politique de la terre brulée

Cette contre-offensive s’est prolongée sur les principales villes du pays mais elle a été accompagnée par de nombreuses violences contre les populations civiles perpétrées par les mercenaires de Wagner. Des villages entiers ont été rasés, les soudards russes ont fait bien plus de victimes que tous les groupes rebelles armés réunis.

L’enjeu pour Wagner n’est pas seulement de préserver le pouvoir du Président de la République, Faustin-Archange Touadéra, mais de mettre la main sur les mines de diamant et d’or exploitées avant par les milices armées. Bien qu’elles soient affaiblies, elles restent présentes sur les territoires ruraux du pays.

Si à la mort de Evgueni Prigojine, le fondateur de Wagner, les autorités russes ont repris la main sur ses activités en RCA, les mercenaires gardent une large autonomie et continuent à faire prospérer leurs affaires en tentant de les diversifier dans l’exportation des grumes et les activités de brasserie.

Mais les Russes ne sont plus seuls et doivent désormais compter sur les Rwandais. Pour l’instant, chacun respecte un modus vivendi.

Une aide intéressée

Le contingent du Rwanda représente 20 % des 14 000 soldats de la Minusca dirigée par Valentine Rugwabiza, femme d’affaires et diplomate rwandaise. Par ailleurs, d’autres Rwandais dirigent les agences locales onusiennes comme le programme de développement (PNUD) ou alimentaire (PAM) mais aussi des structures comme la Banque mondiale. En parallèle, près de 850 militaires des forces spéciales relevant directement du gouvernement rwandais ont été déployés.

Si les forces du Rwanda ont bien meilleure réputation auprès des populations civiles que les mercenaires de Wagner, elles sont elles aussi largement utilisées pour sécuriser les activités économiques des entreprises minières qui relèvent de la holding Crystal Ventures liée au FPR, le parti au pouvoir de Paul Kagamé. Ces mines exploitent les terres rares, notamment le tantale utilisé dans l’électronique et le niobium pour produire des alliages d’acier. Au-delà des nombreuses entreprises créées et bénéficiant d’exemptions fiscales, les accaparements de terres arables, plus de 40 000 hectares où sont installées des grandes fermes rwandaises, ont été dénoncés par l’opposition.

Qu’elles soient russes ou rwandaises, ces forces armées issues de pays bien peu démocratiques contribuent à renforcer le pouvoir autoritaire de Touadéra. Elles sont ainsi sécurisées, le référendum constitutionnel abrogeant la limite du nombre de mandats. En récompense, leur pillage des ressources naturelles du pays se fait en toute impunité.