La tension monte entre le régime nord-coréen et les États-Unis. Alors que Kim Jong-un veut prouver qu’il est à la « hauteur » de ses sanguinaires prédecesseurs, Washington fait peser sur la population la suppression de l’aide alimentaire dont elle a besoin.S’il n’était pas mort en 1994, Kim Il-sung, fondateur de la Corée du Nord en 1948, fêterait cette année ses 100 ans. Une date importante que les dictateurs au pouvoir dans ce pays en pleine transition se devaient d’honorer. Le fils de Kim Il-sung – Kim Jong-il – est lui-même décédé en décembre dernier et son troisième fils Kim Jong-un, nouveau despote en place, cherche à asseoir son autorité.
La pièce maîtresse des festivités devait être le lancement d’un satellite Kwangmyongsong (Lodestar) 3 censé relever les conditions météorologiques et diffuser des musiques célestes en l’honneur du défunt « grand dirigeant ». En gage de bonne volonté pacifique, le régime nord-coréen a joué l’ouverture, invitant des journalistes et choisissant une trajectoire de tir qui n’était dirigé ni vers les États-Unis ni vers le Japon.Cela n’a pas empêché Washington, Tokyo et Séoul d’affirmer qu’il s’agissait en fait du lancement d’un missile balistique violant une résolution des Nations unies qui l’interdit et représentant une menace régionale.Le branle-bas de combat a finalement tourné à la farce. Vendredi 13 avril, le satellite n’aura pris son envol que deux minutes avant d’exploser. Il s’agit de la troisième tentative ratée de la mise en orbite d’un satellite par la Corée du Nord, après deux échecs en 1998 et en 2006.
Dans son premier discours public, Kim Jong-un a néanmoins affirmé que le renforcement de sa capacité militaire restait une priorité et que la supériorité technologique n’était plus un monopole des puissances impérialistes. Ainsi, dimanche dernier, lors de l’un des plus grands défilés militaires organisés en Corée du Nord, un nouveau missile balistique, plus puissant, a été présenté. Mais la fiabilité de la technologie nord-coréenne est largement remise en question par de trop nombreux « ratés ».
Sur le plan intérieur, c’est un bien mauvais début pour Kim Jong-un qui doit encore consolider son pouvoir. Sur le plan international, l’échec du 13 avril fragilise la position du régime. Enfin, dans le domaine commercial, la Corée du Nord coopère sur des missiles avec l’Iran, notamment, et quelques autres puissances. Ces échanges étaient déjà très limitées vus les contrôles internationaux et ne semblent pas promis à un grand avenir…
Par mesure de rétorsion, les États-Unis ont annulé une aide alimentaire de 240 millions de tonnes négociée quelques semaines plus tôt contre le gel du programme nucléaire nord-coréen et l’arrêt d’essais de missiles à longue portée et d’armes nucléaires, ce qui risque de peser lourd pour une population confrontée à la disette.Cette mini-crise intervient alors que les tensions entre les deux Corées, du Nord et du Sud, juridiquement toujours en guerre, restent vives. Le Conseil de sécurité de l’ONU annonce un renforcement des sanctions contre Pyongyang. Ledit conseil est pourtant resté muet quand les États-Unis ont eux-mêmes violé des engagements qu’ils avaient pris pour favoriser le processus de paix dans la péninsule. La présidence Bush a notamment joué un rôle majeur dans le sabordage des accords précédemment conclus par Washington. Quant à Obama, il n’a rien fait pour relancer sérieusement le processus.
Danielle Sabai et Pierre Rousset