Publié le Mercredi 9 mars 2011 à 20h07.

Côte d’Ivoire, le risque de guerre civile

L’Union africaine est désormais divisée sur le dossier de la Côte d’Ivoire où Gbagbo et Ouattara se disputent le pouvoir. Chacun défend la légalité de son élection, le Conseil constitutionnel pour Gbagbo, la Commission électorale indépendante pour Ouattara. L’option militaire pour défaire Gbagbo n’est pas partagée par certains pays comme l’Afrique du Sud, l’Angola ou le Ghana. Le panel des cinq chefs d’États1 qui devaient remettre des propositions contraignantes n’a pu rendre sa copie dans les délais, faute d’unanimité. Aussi le délai est-il rallongé d’un mois. Ce qui évolue – mais dans le mauvais sens – c’est la situation sur le terrain. Dernièrement, une manifestation pro-Ouattara a été réprimée par les Forces de défense et de sécurité (FDS) du clan Gbagbo, avec comme bilan sept femmes tuées.Le dernier rapport d’Amnesty International, corroboré par celui de Human Rights Watch, confirme que les violations des droits de l’homme sont en augmentation. Les escadrons de la mort, épaulés par les FDS, font régner la terreur dans Abidjan, la capitale économique. Les militants ou même de simples sympathisants de l’opposition deviennent des cibles potentielles. Dans la partie nord du pays contrôlée par les Forces nouvelles qui appuient Ouattara, les droits humains ne sont pas mieux respectés. Cette dislocation de la société ivoirienne génère une mutation inquiétante du conflit où les forces politiques sont assimilées aux différentes communautés du pays. Persuadés que l’option militaire est un élément déterminant dans le rapport de forces, les deux camps se réarment massivement malgré l’embargo qui frappe le pays. Le Nigeria et le Burkina Faso aident les Forces nouvelles, pour le camp Gbagbo, l’Angola a dépêché instructeurs spécialisés dans la lutte antiguérilla et les Biélorusses des instructeurs pour l’armée de l’air. Des affrontements ont déjà eu lieu entre Forces nouvelles et FDS dans la région de Duékoué, la partie ouest du pays, la plus instable. Les sanctions économiques font augmenter les prix des produits de première nécessité. Le kilo de viande passe d’un peu moins de 3 dollars à 5 dollars, le sac de riz connaît une augmentation de 9 dollars, le sac de charbon de 10 dollars est vendu le double. Cette inflation a des conséquences dramatiques pour la population dont la moitié est en deçà du seuil de pauvreté, c’est-à-dire moins de 1,25 dollar par jour. Depuis vingt ans, les Bédié (l’ancien président arrivé en troisième position lors des présidentielles), Ouattara et Gbagbo monopolisent la vie politique du pays. Entre eux, les alliances se sont faites et défaites avec chaque fois des morts à la clef. Ils ont tous été au gouvernement. Aucun n’a amélioré la vie des populations, tous ont bradé les richesses du pays au profit des pays impérialistes. C’est dire qu’aucun de ces trois ne mérite que le peuple verse une seule goutte de sang. Leur combat n’est pas celui des populations ivoiriennes. Des voix commencent à se faire entendre pour s’affranchir de la bataille entre Ouattara et Gbagbo et proposent que les populations interviennent, refusent de se faire manipuler, refusent de tomber dans les provocations xénophobes et ethnicistes pour « Construire une véritable alternative politique et citoyenne en Côte d’Ivoire »2. Assurément, dans ce climat de pré-guerre civile, des notes d’espoir apparaissent.À nous de soutenir ces initiatives. Paul Martial1. Voir Tout est à nous ! n° 90 du 17 février 2011.2. http://www.afriquesenlutte.org/afrique-de-l-ouest/cote-d-ivoire/article/petition-internationale-pour-une