L’année passée a vu les dépenses militaires mondiales augmenter de 2,6 %, pour atteindre 1 620 milliards d’euros, selon l’Institut international de recherche sur la paix de Stockholm (Sipri), qui a publié ces chiffres la semaine dernière.
En hausse pour la deuxième année consécutive, ce budget atteint ainsi son plus haut niveau depuis 1988. Une nouvelle démonstration qu’après la chute du mur et l’effondrement de l’URSS, le triomphe, à l’échelle mondiale, du capitalisme, du marché et de la concurrence effrénées, ne pouvaient déboucher que sur une instabilité et des tensions exacerbées.
America first !
Avec une augmentation de 4,6 %, les États-Unis représentent à eux seuls 36 % de ces dépenses, suivis par la Chine (14 %, en hausse de 83 % depuis 2009). La France arrive en cinquième position avec un budget de 57,16 milliards d’euros. Elle passe devant la Russie (54,5 milliards)…
En 2018, les États-Unis ont dépensé plus de deux fois et demi le budget militaire de la Chine, et plus de dix fois celui de la prétendue grande menace que représenterait la Russie.
Alors que leur poids dans l’économie mondiale diminue, les USA entendent bien rester la première puissance militaire, main dans la main avec leur allié, l’Arabie saoudite, qui occupe le troisième rang avec 60,5 milliards d’euros. Sans oublier Israël… Depuis plus de quatre ans, l’Arabie saoudite mène sa sale guerre contre le Yémen avec des armes fournies par les USA et la France contre une population sans défense, semant la mort et la famine. Les dépenses militaires au Moyen-Orient ont augmenté de 6,2 %, et représentaient 5,2 % du PIB de la région, alors que dans aucune autre région du monde elles ne dépassent 1,8 % du PIB.
Instabilité et tensions mondiales
Après le Moyen-Orient, c’est en Asie que les tensions militaires sont le plus fortes. La guerre commerciale des USA contre la Chine se double d’une compétition militaire. La Chine est désormais sur ce terrain aussi la deuxième puissance mondiale. L’Inde vient en quatrième position avec 3,1 % de hausse pour atteindre 59 milliards d’euros.
Boostés par la pression des USA par le biais de l’Otan – dont les 29 membres ont réalisé la moitié des dépenses mondiales l’an dernier – face à la Russie, plusieurs pays d’Europe ont aussi fortement augmenté leurs dépenses, comme la Pologne (+ 8,9 %) ou l’Ukraine (+ 21 %).
À l’opposé, les dépenses militaires des pays africains continuent de baisser pour la quatrième année consécutive. Elles représentent 2,2 % des dépenses militaires mondiales. Le Nigeria et l’Afrique du Sud (18 % de hausse) y sont les principales puissances militaires, mais des petits pays comme le Burkina Faso ou le Zimbabwe se trouvent entraînés dans cette dévastatrice et ruineuse escalade militariste.
Un marché sans limite
Les affaires des marchands de canons sont florissantes et ont de solides perspectives. Un tiers du marché est entre les mains d’entreprises US. La Russie reste à la deuxième place, avec 25 % des exportations mondiales. La France occupe quant à elle 5,6 % du marché.
La Chine parvient au troisième rang. Ses exportations ont augmenté de 88 % par rapport à la période de 2006-2010, même si elle n’occupe encore qu’une faible part du marché. Les exportations militaires d’Israël, le pays le plus militarisé du monde, ont augmenté de 40 % en 2017.
Au cours des trois dernières décennies, les États ont englouti plus de 41 000 milliards de dollars dans ces arsenaux de mort et de destruction. Cette fuite en avant militariste, nourrie par la logique de crise de la valorisation du capital et par la concurrence acharnée qui oppose les nations, participe d’un état de guerre permanent dont il serait illusoire de croire qu’il ne pourrait pas déboucher sur des conflagrations majeures. La paix est dans le camp des travailleurEs du monde...
Yvan Lemaitre