Publié le Jeudi 24 novembre 2011 à 12h47.

« Démocratie réelle, maintenant »

Au moment où les marchés financiers font et défont les gouvernements, seules des luttes massives pourront imposer une vraie démocratie.Le slogan des IndignéEs espagnolEs est plus que jamais d’une actualité brûlante au moment où les dirigeants européens viennent de montrer jusqu’où ils peuvent aller dans le mépris de la démocratie.

En octobre, l’annonce d’un référendum par Papandréou faisait chuter toutes les Bourses. Alors que l’on demande chaque jour l’avis des marchés financiers, la simple idée de consulter le peuple grec était jugée « irresponsable ». Convoqué et sermonné par Merkel et Sarkozy au G20, Papandréou, usé jusqu’à la corde par sa politique antisociale, a donc remballé son référendum et laissé la place à un gouvernement d’union nationale incluant l’extrême droite, le LAOS (Rassemblement populaire orthodoxe), violemment anti-immigrés et nostalgique de la dictature des colonels. À bon entendeur, salut… Le peuple grec, dont la révolte contre l’austérité est de plus en plus profonde, est ainsi sommé de se résigner. Et le journal le Monde (du 20/11) de titrer en toute franchise : « La Grèce dévoile un projet de budget 2012 élaboré sous la tutelle du FMI et de l’Europe. » Car ce qu’ils osent appeler l’Europe, c’est la troïka BCE-FMI-Commission européenne qui s’est installée à demeure à Athènes.

En Italie, Berlusconi a de même été chassé, ni par la rue, ni par les urnes, ni par les juges, mais par les marchés financiers. Gauche parlementaire et droite berlusconienne se sont entendues là aussi sur un gouvernement d’union nationale, composé de technocrates, béni par la « Merkozie » et la finance.

Ces deux nouveaux gouvernements sont présidés par des anciens de Goldman Sachs, l’un, Papadémos, ancien vice-président de la BCE, l’autre, Monti, ancien commissaire européen à la Concurrence. Le pouvoir de la finance capitaliste sur les États ne se cache plus !

Les luttes pour une démocratie réelle et contre la crise capitaliste sont bien indissociables. Il faut pour cela ruiner le pouvoir de la finance. Ce qui ne peut être fait qu’en imposant l’annulation des dettes qui ruinent les États et les soumettent aux grands groupes financiers. Il faut saisir ces groupes, sans indemnité ni rachat, pour constituer un monopole financier public. Placé sous le contrôle des travailleurs et de la population, il permettrait de transformer l’économie et d’engager une révolution sociale et écologique. C’est une telle mesure qui donnerait un sens à l’idée de « démocratie réelle » !

Seules des mobilisations sociales massives peuvent inventer, et imposer, une telle démocratie. Déjà, en Grèce, parmi les travailleurs et citoyens qui se révoltent contre l’austérité, certains s’organisent pour mettre en procès la dette publique. Des IndignéEs espagnolEs s’organisent pour empêcher l’expulsion des familles surendettées de leurs logements. En France, comme dans bien d’autres pays, des salariéEs se battent pour garder leur emploi, épluchent les comptes des patrons qui veulent les jeter à la rue, s’adressent à d’autres boîtes pour construire un front contre les licenciements.

À Marseille, les Fralib revendiquent la propriété de leur usine et de leur marque, contre leur patron licencieur.Ces luttes, aussi limitées soient-elles pour l’instant, montrent le chemin de la démocratie réelle et de ce qui pourrait vraiment l’inscrire dans la durée, lui servir de clé de voûte : un gouvernement des travailleurs.

On est loin du choix lamentable qui vient d’être proposé aux citoyens de l’État espagnol, entre l’austérité de la droite et celle des socialistes. Avec pour sanction une participation historiquement faible à ces élections législatives ! La vraie démocratie est ailleurs, et notre campagne se fera porte-parole de toutes les initiatives, des efforts, des luttes des oppriméEs et des exploitéEs pour affirmer leur droits, dénoncer leur condition, gagner le droit à la parole, conquérir la démocratie.

Yann Cézard