Publié le Jeudi 23 juillet 2009 à 10h00.

Elections en Indonésie : militaires et agenda néolibéral au programme....

Dix ans après la fin de la dictature militaire conduite par Suharto, les électeurs devaient choisir, le 8 juillet, entre trois duos de candidats, comprenant chacun un militaire à la retraite et partageant le même agenda néolibéral. 

 

 

Bien que les résultats ne soient pas définitifs, le président actuel, Susilo Bambang Yudhoyono (SBY) est donné vainqueur, dès le premier tour, avec environ 60 % des votes. Il devance son vice-président, Jusuf Kalla, et l’ancienne présidente – de 2001 à 2004 – Megawathi Sukarnoputri, fille du premier président après l’indépendance de l'Indonésie, Sukarno.

Jusuf Kalla (chef du Golkar, le parti de Suharto durant la dictature), avait pour colistier Wiranto, ancien adjudant de Suharto et accusé de crime contre l’humanité, au Timor oriental. Prabowo Subianto, le colistier de Megawathi, chef du Parti démocratique indonésien de lutte (PDI-P), fut l’un des chefs du Kopassus, une unité militaire réputée pour ses atrocités durant la dictature. Il est accusé de la disparition de militants démocrates, en mai 1998, et de violations des droits humains au Timor oriental et en Papouasie occidentale. Enfin, SBY est lui-même un général en retraite. Dirigeant du Parti démocrate, il conduisait, durant ces élections, une coalition de dix-huit partis, dont plusieurs partis islamiques. Par ailleurs, son colistier, Boediono, était précédemment le chef de la Banque centrale.

Bien que leurs campagnes respectives aient revêtu des accents différents, les trois candidats ont joué un rôle actif dans la mise en place des politiques néolibérales qui ont conduit à l'augmentation de la pauvreté, du chômage et des destructions environnementales. Jusuf Kalla a joué la carte nationaliste et protectionniste en promouvant le renforcement du capitalisme domestique et un affaiblissement de la domination des capitaux étrangers. Megawathi a utilisé une rhétorique populiste, peu en accord avec la politique qu'elle menait lorsqu’elle était présidente. En revanche, SBY bénéficie d’une grande popularité, en partie grâce à la lutte contre la corruption. Des mesures économiques, telles que des aides directes en liquide et les soins gratuits aux familles les plus pauvres, ont contribué à assoir sa notoriété.

Les règles électorales ne permettent pas aux partis de gauche, trop petits, de présenter une candidature. C’est pourquoi la plupart des organisations de gauche indonésiennes ont mené une campagne, pour le boycott militant des élections. Ce choix n’est pas partagé par une partie du People's Democratic Party (PRD), un parti de gauche qui a joué un rôle majeur dans la lutte contre Suharto, dans les années 1990. Le PRD a décidé de soutenir une candidature présidentielle contre SBY, argumentant que c’était le meilleur moyen de promouvoir un programme antilibéral à grande échelle. A cette occasion, la principale dirigeante du PRD, Dita Sari, a lancé un nouveau groupe, les Courageux volontaires pour ressusciter l’autosuffisance (RBBM), afin de soutenir le tandem Kalla-Wiranto, censé, selon eux, avoir les positions les plus proches de la gauche indonésienne. Malheureusement, une telle tactique électorale risque de créer des illusions sur les candidats et d’affaiblir la gauche indonésienne. Ces choix politiques posent problème au sein du PRD. Une dissidence, trouvant ce discours opportuniste, a été exclue du parti. Elle a, depuis, formé le Comité politique pour les pauvres-PRD (KPRM-PRD), prenant une part active dans la campagne de boycott des élections.

Danielle Sabai