Depuis la fin du mois de février, le président Donald Trump a tenu des conférences de presse quotidiennes de deux heures sur l’état du coronavirus aux États-Unis, des événements qui ont remplacé les rassemblements électoraux que le président aime mais n’a pas pu tenir en raison de la pandémie.
Les briefings de Trump sont de longs discours décousus remplis de désinformation, qui contredisent les responsables de la santé, par exemple son conseil d’utiliser des traitements non éprouvés comme l’hydroxychloroquine.
Désinfectants
La semaine dernière, ses assertions selon lesquelles des désinfectants pourraient être injectés dans les poumons comme traitement du virus ont non seulement induit le public en erreur et indigné les experts de la santé, mais semblent également avoir choqué ses propres partisans du Parti républicain. Sous la pression de ses conseillers, le lendemain, il a réduit la conférence de presse à vingt minutes et le jour d’après, elle a été annulée, Trump tweetant que cela ne valait la peine qu’il y consacre du temps. Beaucoup se demandent si c’est un tournant pour Trump, évoquant la possibilité de le renvoyer en novembre.
Alors que l’épidémie a atteint son apogée il y a deux semaines, nous avions, au 26 avril, 938 590 cas et 48 310 décès (26 avril), auxquels il faut ajouter à New York 5 300 décès à domicile. Et le virus fait toujours des morts, au rythme de plus de 2 000 par jour. Les points chauds actuels sont le couloir de Boston à Washington DC, qui abrite 50 millions de personnes ainsi qu’Atlanta, Detroit, Chicago et Los Angeles, chacun avec environ 1 000 morts recensés.
3 000 milliards de dollars
Depuis que la plus grande partie du pays a été confinée, l’impact économique a été dévastateur. Au cours des cinq dernières semaines, le nombre de chômeurEs est passé à 26,5 millions avec un taux de chômage de 20 %, le taux le plus élevé depuis 1933. Les allocations de chômage varient considérablement d’un État à l’autre, de moins de 300 dollars à plus de 700 dollars par semaine.
Le Congrès américain a adopté trois programmes de secours s’élevant à près de 3 000 milliards de dollars, dont une grande partie a été une aubaine pour les grandes entreprises, bien que des millions soient également allés aux petites entreprises, aux hôpitaux et aux travailleurEs. Le programme a également été une aubaine pour les banques, qui gèrent les programmes de prêts, et pour les riches, qui ont bénéficié de plus d’allégements fiscaux. La plupart des travailleurEs, en plus de leurs allocations chômage, reçoivent un paiement fédéral unique de 1 200 dollars, avec un supplément de 500 dollars par enfant ainsi que 600 dollars par semaine jusqu’au 31 juillet. Mais de nombreux travailleurEs, en particulier les sans-papiers, ne seront pas éligibles, et ne recevront pas l’aide fédérale.
Les travailleurEs hospitaliers et les « travailleurEs essentiels » ont organisé diverses manifestations et de courtes grèves sur les questions de santé et de sécurité, et de nombreux groupes organisent l’entraide dans les communautés.
Dangereuse réouverture
Les hommes d’affaires veulent rouvrir l’économie et de nombreux travailleurEs souhaitent désespérément reprendre le travail et gagner de l’argent. Les gouverneurs républicains des États de Géorgie, de Caroline du Sud, du Tennessee, de l’Alaska et de l’Oklahoma rouvrent leurs États dans quelques jours. Dix-neuf États au total ont des ordres de fermeture qui expireront vers le 1er mai, et bon nombre d’entre eux pourraient également rouvrir. Des groupes d’extrême droite liés à la Maison Blanche, au Parti républicain et à la campagne Trump ont organisé des manifestations, dont certaines armées, pour exiger la réouverture des États, opposant le contrôle du gouvernement à la « liberté » individuelle.
Les risques de réouverture sont importants en raison d’un manque de tests. La semaine dernière, 1,2 million de personnes ont subi le test d’écouvillonnage PCR (amplification en chaîne par polymérase) pour voir si elles étaient activement infectées, mais la population américaine est de 330 millions. Et il n’y a pas de test sanguin précis pour les anticorps ; même s’il y en avait, l’Organisation mondiale de la santé a averti que cela ne prouve pas que ceux qui ont des anticorps sont protégés. Même avec des tests, aucun gouvernement d’État n’est actuellement en mesure de faire le suivi des contacts. La réouverture ouvre donc la possibilité d’une résurgence de la maladie et de la mort. Le mois prochain sera une grande expérience avec des cobayes humains.
Traduction Henri Wilno