De nouvelles législatives auront lieu le 25 juin : la droite, avec la Nouvelle démocratie (ND), semble devoir l’emporter largement, mais tout reste possible, personne ne sachant expliquer la forte victoire de ND et la chute considérable de Syriza qui a profité avant tout à ND et au Pasok, ce parti autrefois de gauche qui tente de réapparaitre après avoir cogéré avec ND la soumission à la troïka.
Nouvelle Démocratie joue d’ailleurs la prudence avant le 25 juin, incertaine encore de la solidité de son renforcement. Si ND l’emporte, les attaques s’aggraveront, vu les recommandations d’austérité de Bruxelles, dans un contexte où en outre l’extrême droite avec ses différentes composantes, hormis celles intégrées dans ND, a obtenu entre 8 et 9 %.
Un enracinement profond de la droite ?
Tout annonçait sinon une défaite, au moins un fort tassement de ND (39,85 % en 2019) : si elle a rempli à 200 % sa mission pour son électorat, elle a par ailleurs prouvé son incompétence face aux épreuves (Athènes paralysée par la neige, incapacité devant les incendies en Eubée, responsabilité écrasante dans la catastrophe ferroviaire de Tèmbi…), elle a suscité une forte résistance face à ses attaques sociales, culturelles, sa répression, elle est impliquée dans des scandales et des pratiques illégales (écoutes, refoulement de réfugiéEs)… Et pourtant, elle gagne un point et 150 000 voix, et elle est le premier parti même chez les jeunes de 17–24 ans (31,5 %, contre 28,8 % pour Syriza). Certains y voient un recul profond de la conscience de classe (post-covid), on s’interroge sur l’effet « lavage de cerveaux » de la plupart des médias aux mains d’oligarques liés à ND. La campagne basée sur la peur, les cadeaux de dernière minute ont pu jouer aussi, mais il n’empêche : le renforcement à droite du rapport de forces est peut-être fragile, quand on apprend que 20 % des électeurEs ont choisi le dernier jour, votant à 51 % pour ND et 13 % pour Syriza, ou quand 43 % des votantEs expliquent la victoire de ND par les faiblesses de la gauche, 25 % par le soutien des médias, seuls 28 % par le travail du gouvernement…
Quelles perspectives à gauche ?
Depuis dimanche, on s’interroge sur les raisons du surprenant recul de Syriza (– 11,5 points, – 600 000 voix), sans que cela profite aux autres partis de gauche (un peu au KKE PC grec : + 1,9 point, + 130 000 voix ; Mera, de Varoufakis : – 0,8 point, – 40 000 voix ; Antarsya + 0,13 point, + 8 500 voix). Certains craignent qu’en juin, la baisse s’accentue, prémisse de l’effondrement ; d’autres comme le KKE, le Pasok et la droite l’espèrent. Difficile de prévoir même ce court terme ! Ce sur quoi nous insistons ici depuis les premiers succès de Syriza (quand il a décollé des 3 %), c’est sur sa faiblesse : Syriza, même passé de 30 000 à 170 000 adhérentEs, ne s’est jamais construit comme parti militant, il est peu présent dans les luttes (aux récentes élections étudiantes, gagnées par le KKE, son courant obtient 4 %…). Son positionnement voulu de « centre-gauche » n’a pas convaincu grand monde, et sa campagne « pour un gouvernement de progrès » en direction du Pasok a surtout permis à la direction de celui-ci de se refaire une santé tout en crachant sur cette proposition. Mais malgré cette impasse stratégique dans le cadre de l’impasse réformiste, ce qui est sûr, c’est que si la Bourse grecque était euphorique cette semaine, c’est bien en raison de cette défaite de Syriza : contrairement à la plupart des directions de la gauche politique, les capitalistes savent qu’une victoire de Syriza, aurait été avant tout une victoire des travailleurEs avec « danger » de mobilisations pour remettre en cause la casse ultralibérale. Et le fait que tous les groupes à gauche de Syriza ne progressent que de 2,8 points malgré le recul de 11,5 % de Syriza indique l’urgence : tout faire pour que la gauche ouvrière et populaire s’unisse contre la droite, avec, comme le souhaite justement Antarsya, une gauche anticapitaliste forte.
À Athènes