Enfin ! Le gouvernement grec a fait adopter les premières mesures concrètes allégeant le poids de la crise sur les couches populaires. Mercredi 18 mars, le Parlement a ainsi voté une loi contenant un paquet de mesures sociales.
Le texte propose de rétablir l’électricité pour les ménages ne pouvant payer leurs factures et de leur fournir jusqu’à 300 kWh d’électricité gratuite jusqu’à la fin de l’année. Près de 30 000 foyers vont aussi recevoir une aide au logement et 300 000 personnes une aide alimentaire. Le texte comprend également des mesures pour des personnes qui ont perdu leur emploi et sont privées de couverture sociale. Une deuxième loi votée deux jours plus tard permet aux contribuables et aux entreprises, qui n’ont pas pu payer leurs impôts ou leurs cotisations, de régler leurs dettes en 100 versements en bénéficiant de réductions sur la surtaxe des arriérés. Le gouvernement en attend une augmentation des recettes fiscales. Enfin, le Parlement grec a décidé de lancer un audit de l’exorbitante dette publique grecque, afin de déterminer si une partie de cette dette peut être déclarée « illégale », selon la présidente de l’assemblée.Ces deux lois sont bien loin des engagements passés et des annonces de Tsipras après son installation au poste de Premier ministre (retour du salaire minimum à son niveau antérieur, réembauche des fonctionnaires licenciées, etc.). Pourtant, des réserves avaient été émises du côté de la Commission européenne.Cependant, rien n’est entrepris pour dégager réellement la Grèce de l’austérité et des contraintes de la finance. Les retraites de fonds des banques grecques continuent et les mettent en péril. Face à cela, pas une seule mesure de contrôle du secteur bancaire n’a été prise. En matière de privatisations, l’organisme qui en est chargé n’a pas été dissous. Quant à la dette, elle est toujours payée : ainsi, la Grèce a déboursé 1,5 milliard d’euros en mars en faveur du FMI.
Ne pas renoncer aux engagements de SyrizaPar le prétendu compromis du 20 février, le gouvernement s’est mis dans une nasse. Tsipras se débat mais reste dans ce cadre. Il sollicite juste un peu d’oxygène financier : c’est le sens du mini-sommet avec Hollande et Merkel et de sa visite à Merkel à Berlin. Tsipras a adressé une lettre aux principaux dirigeants européens dans laquelle il annonce que sans déblocage de fonds à court terme, « il sera impossible d’assurer le service de la dette d’ici les prochaines semaines ». Et une nouvelle liste de réformes doit être transmise à Bruxelles. Même si ces dirigeants se laissaient convaincre d’accélérer le versement de crédits à la Grèce, ce serait en échange du renoncement des objectifs fondamentaux de Syriza.Selon les sondages du mois de mars, le soutien de l’opinion demeure élevé, mais comme le dit un éditorial récent du journal de DEA, composante de la gauche de Syriza : « Avant que s’évanouisse le soutien populaire à Syriza – en Grèce et à l’étranger – il est temps pour le gouvernement de mettre en œuvre de manière complète et immédiate les engagements pris à Thessalonique le 14 septembre 2014. » Et d’ores et déjà, un article du quotidien To Vima du 24 mars souligne que Tsipras va se heurter à des critiques et à des résistances renforcées au sein de Syriza. Certes, des pressions trop arrogantes de l’Union européenne pourraient acculer Tsipras et peut-être même provoquer une crise, mais le renversement des risques majeurs découlant de la politique jusqu’ici suivie par Tsipras dépendra surtout des capacités de mobilisation des forces populaires grecques.
Henri Wilno