Ce lundi 22 juin, suite à différentes réunions au sommet, Tsipras s’est dit une nouvelle fois confiant dans la possibilité d’un accord favorable au peuple grec. Pourtant, si différentes propositions fiscales grecques visent les riches, entreprises et individus, d’autres propositions toucheront aussi les couches populaires, sur les retraites notamment. Le grand cirque pour soumettre la Grèce à l’obéissance libérale va donc continuer dans les jours qui viennent...
La semaine écoulée, un pas supplémentaire a été franchi dans l’offensive de la réaction contre les prétentions grecques à vouloir lutter contre l’austérité et les mémorandums.
Une offensive sous pression médiatique et politique
Si la bourgeoisie hésite désormais à utiliser de la force militaire comme elle l’avait fait en 1967, son offensive est plus globale, reposant en particulier sur une manipulation effrayante de l’information. Un ancien dirigeant du Pasok vient d’ailleurs d’expliquer que des journalistes grecs avaient été formés lors de séminaires du FMI à présenter la « bonne » information ! Et même si la chaîne publique grecque ERT a rouvert, les chaînes privées restent dominantes et ont participé à la semaine de la grande peur : rumeurs sur la faillite et la fermeture des banques, relais des mensonges de la troïka...
La droite descend dans la rue, en apparence pour réclamer de « rester dans l’Europe », en vérité pour accentuer la campagne pour abattre le gouvernement. À la manifestation du jeudi 18, où les bourgeois des quartiers riches se comptaient par centaines, on protestait contre la stalinisation de la Grèce et contre les communistes ! Plus grave, un des dirigeants du Pasok, Loverdos, vient de menacer le gouvernement de connaître le sort des militants de gauche exécutés sous le dictateur Plastiras... ça donne une idée de l’ambiance.
Aucun compromis avec l’austérité
Cette ambiance est en symbiose avec la campagne internationale, dans laquelle par exemple un journal comme le Monde joue tout son rôle, relayant l’image méprisante d’un Tsipras comparé à un étudiant inexpérimenté qui « ne semble pas comprendre » ou « ne semble pas vouloir non plus accepter le processus de décision européen ». Et toute l’entourloupe consiste à faire croire que face aux propositions d’aide généreuse de la troïka, le gouvernement grec refuse tout compromis, alors que c’est malheureusement un « bon » accord que Tsipras croit pouvoir trouver dans ces négociations !
Or, le problème est très simple : l’objectif de cette immense campagne nauséabonde est de mettre la pression maximum pour obtenir la soumission du gouvernement Syriza à un accord pourri qui le déconsidérerait. Et c’est bien la troïka qui, après chaque nouvelle concession grecque, en demande alors un peu plus, avec des conséquences catastrophiques : les dernières exigences sur la TVA menacent entre autres l’activité du tourisme, l’éventuel sursis sur le droit du travail s’accompagnerait de l’annulation du SMIC à 751 euros, le montant des pensions des retraitéEs ne baisserait pas mais les retraites anticipées seraient supprimées...
Et on peut s’attendre ces prochains jours à de nouvelles exigences, malgré – ou à cause – de l’éloignement progressif de ce gouvernement des promesses de campagne.
Mettre fin à la mascarade, mobiliser !
Tsipras a un peu haussé le ton ces derniers jours, mais c’était pour exiger que « l’Europe retrouve ses valeurs » ! Cela ne prépare pas à une mobilisation radicale dans cette « guerre de tranchées » (journal Ef Syn), alors qu’il existe pourtant de nouveaux point d’appui pour le développement urgent de la solidarité contre les mémorandums.
Ainsi, la semaine dernière a été rendu public le rapport du comité pour la vérité sur la dette grecque, fruit d’un gros travail lancé par la présidente du Parlement, avec l’aide d’experts comme Éric Toussaint. S’appuyant sur des témoignages très concrets, le rapport a fait l’effet d’une petite bombe, et la conclusion du rapport a eu un certain écho : dette illégale, illégitime, insoutenable ! Du coup, celle-ci redevient un enjeu de la confrontation, le vice-président de la Commission européenne se déclarant contre toute mesure d’annulation. La dette pourrait donc devenir un axe important des mobilisations, même si la majorité de Syriza avait mis cette question de côté.
Enfin, dernier aspect essentiel, les mobilisations, plus importantes, même si limitées : celle du dimanche 21 juin, à laquelle appelaient Adedy (la fédération du secteur public), Syriza et Antarsya, marque un progrès, comme cela a été le cas ce même week-end dans quelques villes d’Europe.
Mais ce lundi 22, avec ces négociations dramatisées à souhait, donne peut-être le ton des prochains jours, en particulier de la réunion de l’Eurogroupe mercredi 24 et du Conseil européen des 25 et 26 juin. Sans contrôle sur les capitaux et les banques, le temps joue pour les classes dirigeantes européennes, et l’étranglement continue... Face à ce jeu perdant, nos mobilisations, ici et dans toute l’Europe, sont le seul moyen pour empêcher la troïka de pousser les enchères toujours plus loin, et pour rompre enfin avec la soumission à l’austérité.
D’Athènes, A. Sartzekis