En ce début d’automne, la situation continue d’empirer en Grèce, et on peut s’interroger sur des chiffres récents indiquant par exemple que la mortalité infantile est passée de 3,75 pour 1 000 en 2014 à 3,96 en 2015, ou que le nombre de morts et de départs à l’étranger dépasse celui des naissances et des arrivées en Grèce...
Ces chiffres à eux seuls justifieraient une rupture politique majeure, pour sortir de cette évolution catastrophique. Mais ce n’est pas la voie suivie par Tsipras et son gouvernement : il applique en élève consciencieux les ordres de la troïka qu’il avait acceptés en été 2015, et la phase actuelle, c’est celle des privatisations et de nouvelles attaques contre le droit du travail. Dans le collimateur, les compagnies nationales comme DEI (électricité) ou EYDAP (eau). Même si le ministre de l’Économie jure que l’eau ne sera pas privatisée, sa distribution à Salonique relève en partie du privé (d’autant plus intéressé que le dernier exercice y est fort bénéficiaire !) et des mobilisations ont commencé contre cette menace.
Mais de manière générale, le découragement que l’on notait avant les vacances n’est pas fini, face à un gouvernement dont beaucoup avaient cru les promesses de changement radical. Or, il suffit de voir la réforme des chaînes de télévision pour mesurer à quel point Syriza refuse tout changement du système : alors que la presse de droite est déchaînée (campagnes mensongères faisant passer Syriza pour le parti bolchevique !), le gouvernement, qui avait l’occasion de lancer une mobilisation pour des médias au service des intérêts de la population, s’est contenté de réduire le nombre de chaînes généralistes en les attribuant au plus offrant, c’est-à-dire aux plus efficaces des requins mafieux !
Nazis à l’offensive...
Aussi, dans ce climat, rien d’étonnant à ce que les nazis, stimulés par la libération de leurs chefs et par l’aide que leur apporte l’aile extrême du parti de droite, fassent leur réapparition dans les rues. Ainsi on voit aujourd’hui revenir des scènes de violence contre les immigréEs et les militantEs de gauche, comme avant l’arrivée de Syriza au pouvoir, cela sous l’œil bienveillant de flics qui viennent par exemple de garder 7 heures au poste, au centre d’Athènes, des enfants immigrés, sans les nourrir ou leur donner à boire, en les frappant et en les insultant !
C’est bien sûr sur le terrain de la question des réfugiéEs que les nazis essaient de se refaire une santé, impulsant des mouvements de prétendus « citoyens indignés » et les poussant à s’en prendre physiquement aux réfugiéEs. Et cela marche en partie, y compris sur des îles jusqu’ici solidaires comme Mytilène. Ils tentent aussi de retourner des mouvements solidaires, comme celui qui refuse de céder aux banques des maisons de familles endettées, en faisant adopter des revendications telle que « refus que les banques redonnent nos maisons pour y loger des réfugiés » (vu en Crète, une île pourtant antifasciste !).
Face à tout cela, il est donc indispensable que le mouvement populaire accentue ses mobilisations. Or, en cette rentrée, l’unité est peu au rendez-vous, comme on l’a vu lors de l’anniversaire du meurtre du rappeur Fyssas par les nazis : au moins six manifs différentes… Dans ce climat, il est donc très important de s’appuyer sur des victoires locales, comme cela vient de se passer à Salonique, avec une mobilisation populaire obtenant du tribunal qu’une famille menacée d’expulsion (père infirme…) garde son logement. Comme le dit le NAR (une des composantes d’Antarsya), cette petite victoire ouvre la voie : on lâche rien !
D’ Athènes, A. Sartzekis