Ces derniers temps, on voit grandir les clivages entre le gouvernement formé par la droite et le Pasok, et ses donneurs d’ordre : FMI, UE et Banque européenne. C’est dans ce climat qu’a eu lieu une grande journée de grève la semaine dernière.
Certains articles comme celui paru le 24 novembre dans le Figaro montrent en particulier les inquiétudes de l’OIT devant l’impasse des mesures imposées : la moitié des 1,3 million de chômeurs est privée d’emploi depuis deux ans ou plus, et même si l’emploi repartait avec une hausse annuelle de 1,3 % par an, le niveau d’emploi d’avant crise ne serait atteint qu’en 2034. Et l’OIT dénonce les « excès d’austérité » et prône le dialogue social ! À vrai dire, le rapport de l’OIT montre bien la crainte de la bourgeoisie libérale ou réformiste : les mémorandums qui ont fait augmenter la misère de 20 à 44 % en 5 ans sont contre-productifs, et cette ligne dure produit une radicalisation de classe qui fait peur, d’autant qu’elle pourrait être contagieuse !D’où les tensions actuelles entre les instances européennes et un gouvernement grec menacé d’une grosse défaite électorale (dernier sondage : Syriza en tête avec 10 points d’avance, Antarsya à 1,5 % des votes). Le conflit porte donc sur la poursuite des mémorandums et des mesures draconiennes voulues par la troïka, alors que le Premier ministre Samaras voudrait faire croire à la fin de cette politique, au moins jusqu’aux élections (probablement au printemps) !Mais ce que voient les travailleurEs, avec ou sans emploi, et les jeunes, c’est une aggravation de la situation : malgré une intense résistance, poursuite de la politique d’évaluation-licenciement, baisse des rémunérations, absence de perspectives pour les jeunes, et caporalisation des universités.
Une combativité maintenueFace à tout cela, avec comme mot d’ordre central « Non au retour au Moyen Âge pour les travailleurs », la confédération (unique) GSEE et la fédération du public Adedy avaient appelé à la grève le jeudi 27 novembre, dans une perspective de renversement non seulement de ces politiques de misère, mais aussi de « ceux qui les décident et les soutiennent », ce qui témoigne bien de l’enjeu politique massivement ressenti. Si la grève semble avoir été bien suivie, les manifestations n’ont pas été aussi massives que le relèvent des médias de gauche. De bons cortèges, autour de 20 000 à Athènes (on est quand même loin des 200 000 en 2011), mais bien moins battants que le 17 novembre, et avec toujours le sectarisme du KKE, massif mais peu dynamique. Donc reste posée la question centrale de l’unité dans les luttes.À noter dans la manifestation d’Athènes : les enseignantEs, toujours déterminés, les nettoyeuses licenciées du ministère des Finances, solidaires de la mobilisation en cours des réfugiéEs syriens, des cortèges étudiants battants, et la présence des syndicats de base, sans oublier les grévistes de 3E distribuant des ballons appelant au boycott de Coca Cola... De bonnes mobilisations aussi dans d’autres villes du pays.Cette mobilisation montre certes une combativité maintenue après 5 ans de combats durement réprimés, mais aussi de la fatigue, et l’espoir qu’un gouvernement Syriza puisse arriver prochainement au pouvoir. Or, une tendance à accepter cette option est désormais claire au sein des instances bourgeoises. Ainsi, pendant que se préparait la grève, Stathakis et Millios, deux responsables de la politique économique de Syriza, rencontraient à Londres des investisseurs pour les rassurer… Voilà pourquoi, s’ il reste urgent de chasser la « troïka intérieure », l’auto-organisation ouvrière et la volonté de rompre avec la logique capitaliste sont aujourd’hui vitales !
D’Athènes, A. Sartzekis