Publié le Vendredi 7 juillet 2017 à 13h15.

Hambourg : le G20 sous état de siège ou le nouveau désordre mondial…

Le G20 s'est ouvert vendredi à Hambourg devenue une forteresse survolée par une nuée d’hélicoptères. Une zone d'interdiction de manifester de 38 kilomètres carré aux alentours du parc des expositions, où a lieu le G20, et de la nouvelle Philharmonie a été instauré. Les jours précédents l'ouverture de nombreuses manifestations ont eu lieu, marquées par les violences policières.

En toile de fond, la crise du Qatar et les tensions avec la Corée du Nord donnent à ce sommet son contenu et sa fonction. Il n'en sortira rien, comme des précédents, il ne servira qu'à mettre en scène les nouveaux rapports de forces internationaux, les rivalités politiques, économiques militaires qui façonnent le nouveau désordre mondial, les lourdes menaces qu'elles engendrent.

C'est aussi le bal des débutants : Trump, Theresa May, Macron… alors que Merkel, organisatrice de la réception, en fait une tribune électorale avant les élections de septembre.

Maintenir le... désordre mondial

Les 20 plus grandes puissances mondiales sont confrontées au chaos qu'elles ont elles-mêmes produit à travers le développement des multinationales et la concentration du pouvoir économique à l'échelle internationale en un nombre de mains de plus en plus réduits qui pillent les travailleurs et les peuples.

Leur concurrence acharnée aboutit à des tensions exacerbées, une guerre permanente au nom de la prétendue lutte contre le terrorisme, une montée des égoïsmes nationaux et du protectionnisme. L'élection de Trump, le Brexit en ont été les manifestations.  « Quiconque pense pouvoir régler les problèmes de ce monde par l’isolationnisme et le protectionnisme fait une énorme erreur », prévient Merkel  mais c'est pour l'Allemagne comme pour la Chine une politique qui vise à accroître leur propre influence mondiale. Tout comme Poutine qui se permet de dire : « Je suis convaincu que seules des relations commerciales ouvertes, basées sur des normes et des standards uniformes peuvent stimuler la croissance de l'économie mondiale et favoriser une progression des relations entre États ».

Les causes du désordre mondial, la concurrence, la course à la rentabilité financière, à la baisse du coût du travail ou au contrôle des sources d'énergies et de matières premières sont organiquement liées au capitalisme mondialisée. Et le G20 n'est qu'un théâtre d'ombres destiné à laisser croire que les maîtres du monde auraient des réponses aux maux dont ils sont la cause.

L'impossible paix

Ce n'est pas de la paix dont ils discutent mais de la façon de gérer entre eux les rapports de forces qui se négocient sur le dos des peuples. Les poignées de main n'y changent rien !

Poutine et Xi Jinping minimisent la portée du missile intercontinental lancé « en cadeau » par Pyongyang le 4 juillet « aux salauds d’Américains » qui célébraient leur fête nationale. Ils défendent la Corée du Nord contre les USA qui ont fait de l'autre Corée une de leur base militaire...  De même sur la question ukrainienne entre les USA, la Russie et l'Europe. De même pour la guerre en Syrie.

Loin de discuter de la paix, ils gèrent une montée du militarisme. Trump, à Varsovie la veille du G20, a rassuré ses alliés est-européens de l'Otan tout en exerçant la pression des USA pour l'augmentation des budgets militaires…

L'enterrement de l'accord de Paris

« Nous prenons note de la décision des États-Unis d'Amérique de se retirer de l'accord de Paris » est-il écrit dans le projet de communiqué  du G20, donnant satisfaction à Trump qui voudrait un nouvel accord « dont les termes seront justes pour les États-Unis, ses entreprises, ses ouvriers, son peuple et ses contribuables ».  Là encore se négocient des rapports de forces politiques sans qu'aucun des pays engagés n'ait ni la volonté ni la possibilité de lutter réellement contre le réchauffement climatique puisque que tous défendent « leurs » capitalistes.

Alors que les pays du G20 représentent à eux seuls environ 80% des émissions mondiales de gaz à effet de serre, l’ONG Oil Change International dénonce que plus de 215 milliards de dollars (190 milliards d’euros) ont été alloués entre 2013 et 2015 par eux aux secteurs du charbon, du gaz et du pétrole – un montant quatre fois supérieur aux subventions consenties aux énergies renouvelables.

Sous la menace d'une crise financière

Un rapport du FMI publié  juste avant le sommet du G20 met en avant les « risques négatifs » pour l'économie globale que peuvent représenter « l'incertitude sur les politiques dans les économies avancées, les vulnérabilités du secteur financier et un soudain durcissement des conditions financières ». « Si on n'agit pas, cet ensemble de préoccupations pourrait constituer une recette pour une crise financière brutale ».

Le FMI s'inquiète aussi du fait qu’ « un démantèlement du renforcement de la régulation financière » intervenu après la crise de 2008, « ne conduise à un affaiblissement des capitaux propres et des réglementations, entraînant des conséquences négatives pour la stabilité financière mondiale ».



La réalité de la menace est illustrée par la situation des banques européennes, appelées à renforcer leur bilan, alors qu'il y a eu récemment un sauvetage de banques italiennes et espagnole au bord de la faillite. En Chine, le FMI relève que la trajectoire « de l'endettement public comme privé » pourrait s'avérer « intenable »« Manquer de répondre aux risques pesant sur la stabilité financière et réduire la croissance excessive du crédit pourraient résulter en un fléchissement brutal de la croissance » chinoise « entraînant des répercussions négatives dans les autres pays »...

Les maîtres du monde vont discourir sur  la nécessité de s'attaquer aux inégalités, d'enrayer la famine, de relancer l'économie, etc.,   jeu de rôle qui ne vise qu'à masquer leur responsabilité dans les drames de la planète.

Comment pourrait-il en être autrement tant que la logique du capitalisme que tous défendent fait que huit personnes possèdent 

aujourd'hui autant de richesse que la moitié la plus pauvre de la population mondiale.
                               
Yvan Lemaitre