Pour son premier voyage en Israël, François Hollande a clairement marqué sa complicité avec les dirigeants israéliens actuels.
En trois journées de visite, seules quelques heures auront été consacrées aux « territoires palestiniens », et encore pour rencontrer un « président de l’Autorité palestinienne » qui ne détient plus de légitimité populaire depuis fort longtemps ! Point de visite des villes palestiniennes étranglées par les colonies et les routes réservées aux colons. Pas de rencontre avec les entreprises palestiniennes entravées par la colonisation et les restrictions imposées par l’occupant. Et une seule demande aux Palestiniens qui subissent le joug de la colonisation : renoncer au droit international, renoncer à la résolution 194 du conseil de sécurité de l’ONU et abandonner le droit au retour des réfugiés de 1948 !
Tais-toi quand tu parles !Sur injonction de Yuli-Yoel Edelstein, président de la Knesset, le président français s’est exprimé devant cette assemblée. Avec une audace incroyable, François Hollande a rappelé la position française : deux États avec Jérusalem partagé en deux capitales, et l’arrêt de la colonisation de la Cisjordanie. En 2008, Nicolas Sarkozy avait rappelé devant la Knesset « l’adoption d’une loi qui inciterait au départ les colons de Cisjordanie, moyennant compensation et relogement en Israël ». Mais chez François Hollande, point d’allusion au démantèlement de toutes les colonies.Il se dit heureux de s’adresser aux élus nationaux du peuple israélien, en taisant que cet État maintient en prison 13 députés palestiniens ! L’audace s’arrête donc à la déclaration de principe : point de condamnation sur la judaïsation à marche forcé de Jérusalem par l’expulsion de milliers de Palestiniens et la destruction de maisons, ou l’expulsion de leur demeure des habitants arabes de Jérusalem pour l’installation de colons juifs.Hollande ignore les discriminations subies par la population non juive d’Israël, pourtant dénoncées dans un rapport des 27 ambassadeurs de l’Union européenne en 2011 : « Nous devons considérer la façon dont Israël traite ses minorités comme un problème central, et pas secondaire, par rapport au conflit israélo-palestinien... ». Hollande oublie la tragédie à venir : ce parlement israélien s’apprête à voter une loi permettant l’expulsion de dizaines de milliers d’habitants non juifs du Néguev ! Les droits de l’homme, dont la France serait le phare, s’arrêtent pour le président français à la frontière sioniste...Voilà donc un président se revendiquant de gauche qui déclare sa flamme au très raciste ministre Liberman et à Netanyahu, Premier ministre le plus à l’extrême droite qu’ait pu connaître cet État.
Un État comme les autres ?Deux faits révèlent le sens de la visite de Hollande en Israël. Face à la détérioration de l’image de l’État colonialiste, aux avancés de la campagne internationale de Boycott - désinvestissement - sanctions (BDS), le président français relance la coopération des entreprises nationales avec Israël. Plusieurs accords économiques ont été ainsi signés, notamment la SNCF avec Israël Railways, faisant fi des atteintes aux droits de l’homme. Hollande prétend que cet État criminel est un État comme d’autres. Concernant l’Iran et l’énergie atomique, en fidèle soutien à Israël, François Hollande mène une politique de tension accrue avec Téhéran, allant même jusqu’à s’engager à participer à la guerre contre l’Iran ! Il aura fallu le renoncement des USA à ce funeste projet, pour que tout penaud, l’Élysée stoppe illico son chant guerrier. Et devant la Knesset, le discours du président reprend les termes qui avaient provoqué l’échec des premières négociations entre Iran et le groupe des 5+1 (les cinq États permanents du conseil de sécurité de l’ONU plus l’Allemagne) le samedi 9 novembre 2013. Mais la diplomatie française isolée n’a pu empêcher qu’un accord avec l’Iran se conclut dans la nuit du samedi 23 novembre au dimanche 24 novembre.Intransigeant face à l’Iran, François Hollande a de fait soutenu l’armement nucléaire israélien, connu de tous... fidèle en cela à la vieille tradition du Parti socialiste qui dès 1956, avec le gouvernement de Guy Mollet, participa à la construction de la bombe atomique israélienne.
Marc Prunier