À la demande du gouvernement, le parlement israélien vient de voter la loi de dissolution et de fixer les prochaines élections parlementaires pour le 22 janvier prochain.
Rien ne menaçait la stabilité de la coalition de droite au pouvoir depuis trois ans : la droite extrême voit ses objectifs réalisés et toutes les tentatives de mettre un frein à ses projets colonisateurs, par la Cour suprême par exemple, sont mis en échec par de nouvelles lois totalement antidémocratiques ; les partis religieux intégristes sont inondés d'aides pour leurs institutions (et les poches de certains de leurs dirigeants) ; quant à l’opposition du centre (Kadima) et du centre gauche (les restes du parti travailliste et le Meretz), elles sont dans un état de décomposition sans précédent. Tous les sondages le confirment, la droite a de bonnes chances de se renforcer encore aux prochaines élections, même si, au sein de cette droite, le Likoud peut perdre quelques points au profit de ses alliés encore plus à droite. Alors pourquoi dans ce cas des élections anticipées ? Un rempart électoral aux pressions américaines et à la grogne populaire La première raison est liée à un trait de caractère de l’Israélien qui n’aime pas attendre et adore l’excitation qui accompagne les redistributions de cartes. C’est une des raisons pour lesquelles depuis les années soixante-dix toutes les élections ont été anticipées.La seconde raison est d’ordre stratégique : tout en espérant une victoire de Romney aux élections présidentielles étatsuniennes, et en s’investissant publiquement dans cette campagne, Netanyahou sait qu’Obama a de bonnes chances d’être réélu. Dans ce cas, il pourrait être tenté de mettre en œuvre les lignes développées dans son discours du Caire et de régler quelques comptes avec les néoconservateurs israéliens qui n’ont pas hésité à l’humilier publiquement à plusieurs occasions. Le chef du Likoud veut pouvoir opposer à d’hypothétiques pressions américaines un mandat populaire le plus large possible. La troisième raison est liée au contexte social israélien. Si pour l’instant l’économie israélienne est épargnée par la crise et que les indicateurs économiques utilisés par les institutions financières internationales sont plutôt positifs, les risques d’un mouvement social sont réels. Certes, les grandes mobilisations de l’été 2011 n’ont pas pu être renouvelées l’année suivante, mais le sentiment général dans le public, et en particulier les classes moyennes, est que les maux qu’ils dénonçaient, à savoir les effets d’un néolibéralisme débridé et d’une dérégulation généralisée, n’ont fait qu’empirer. Netanyahou est un intégriste du néolibéralisme comme on n’en fait plus, un ami des riches qui ne cache pas son mépris envers les couches populaires. Même les timides recommandations de la Commission Trachtenberg que Netanyahou avait été obligé de mettre en place à la suite des immenses manifestations de l’été 2011 ont été rejetées par le gouvernement, et nombreux sont les Israéliens qui se déclarent prêts à sortir une fois de plus dans la rue, mais cette fois-ci ouvertement contre le gouvernement. Un réveil nécessaireCe qui, par contre, est moins évident, c’est l’éventuel réveil d’un mouvement antiguerre susceptible de créer un mouvement efficace contre une attaque dite préventive contre l’Iran. Le paradoxe de ces derniers mois, c’est que, à l’exception de quelques centaines de militants, l’opposition à la guerre provient des cercles militaires – anciens généraux et chefs des services de renseignements dont les prédictions catastrophistes en cas d’attaque contre l’Iran font les titres des quotidiens. Si les sondages montrent une large majorité contre la guerre, rares sont ceux qui expriment leurs craintes à travers la mobilisation. Tout se passe comme si on faisait confiance à Obama pour calmer le jeu. Mais la question qui accompagne d’une manière récurrente les relations Israël-USA reste d’actualité : qui bouge qui, le chien américain bouge-t-il la queue israélienne, ou, comme le disait Ariel Sharon, « chez nous c’est la queue qui arrive souvent à faire bouger le chien ». Michel Warschawski