Publié le Mercredi 3 février 2021 à 10h09.

L’extrême droite autrichienne tente de surfer sur la colère

Après les grandes manifs anti-masques en Allemagne ces derniers mois, et les réactions violentes contre les confinements et couvre-feux à Madrid, au Danemark et surtout aux Pays-Bas ces derniers jours, l’Autriche connait depuis la semaine dernière ses premières grandes mobilisations contre les restrictions sanitaires.

Le pays a longtemps fait figure de bon élève : un confinement rapide et relativement bref permettant de tracer les cas et de faire redescendre les contaminations à un niveau quasiment nul au début de l’été. Depuis, la situation s’est fortement dégradée. En automne, une flambée épidémique a pris le gouvernement « par surprise ». Encore plus qu’autre part, le succès relatif du printemps avait servi de justification pour ne rien changer en laissant le système de santé démuni face à la deuxième vague. En novembre, l’Autriche présentait même pendant plusieurs semaines le taux de cas par personne le plus élevé au monde (atteignant presque 10 000 cas / jour dans un pays qui compte 8,9 millions d’habitantEs).

Un premier confinement « dur » fut décrété à la mi-novembre, mais assoupli le 6 décembre sous la pression de l’industrie touristique, qui pèse dans ce pays accueillant de nombreux touristes durant la saison de ski (le plus grand « cluster » de la première vague avait déjà été situé dans la station de ski d’Ischgl). Une décision rapidement mise à mal par la réalité, puisqu’un nouveau confinement strict, qui a pris fin le 18 janvier, avait commencé le 16 décembre.

Le « Jour de la Libération » ?

Avec la dégradation de la situation sanitaire et les effets économiques (au printemps déjà, le chômage avait explosé de 25 % en une semaine), c’est aussi la cote de popularité du gouvernement qui s’est érodée. Une lassitude face aux confinements répétés et une hostilité franche quoique rapidement démentie dans certains milieux hospitaliers face à une vaccination obligatoire dans la santé. Depuis plusieurs semaines, de relativement petites manifestations anti-confinement, à fort contenu complotiste, avaient lieu dans des villes de province avec un contingent de « touristes » faisant le tour de toutes les manifs.

Le 16 janvier était prévu comme « Jour de la Libération », avec une manifestation centrale à Vienne. Environ 10 000 personnes ont défilé (moins que les 30 000 initialement prévus par les organisateurs) sous un flot de drapeaux autrichiens. Une manifestation au ton très nationaliste où on retrouvait des éléments complotistes de manifs comparables en Allemagne, avec des slogans comme « Le sang du Christ protège, pas le vaccin ! », ainsi que des logos QAnon. Et aussi une présence remarquée de l’extrême droite institutionnelle, qui souhaite surfer sur un mouvement « populiste » pour se refaire une santé depuis qu’elle a été chassée du ­gouvernement en 2019.

Le week-end dernier, des manifestations anti-confinement, plutôt petites, ont eu lieu samedi, et dimanche 5 000 manifestants – sans doute plus QAnon qu’extrême droite autrichienne – étaient dans les rues de Vienne malgré l’interdiction de la manifestation.

La fin des restrictions sanitaires n’est pas en vue (AstraZeneca a récemment annoncé un fort retard dans la livraison des doses de vaccin pour l’Autriche) et, en l’absence d’alternatives, une partie de la colère pourrait bien alimenter un mouvement dont la signification politique semble assez similaire aux manifestations anti-masques qui ont marqué l’Allemagne.