Pour mener l’offensive contre le rejet de la France sur le continent, Macron a organisé une tournée africaine précédée d’un discours qui se voulait « de rupture » mais reprend les vieilles sornettes sur la fin de la Françafrique. Le décalage entre affichage et réalité est tel que son coup de com’ risque bien de produire l’effet inverse.
Avant de visiter quatre pays d’Afrique centrale, où les dirigeants sont au pouvoir à coups de fraudes électorales et les opposantEs régulièrement emprisonnés, Macron comme ses prédécesseurs a dans son discours proclamé une fois de plus que la Françafrique était du domaine du passé.
Langue de bois
Ce discours est dans la continuité du sommet Afrique-France de Montpellier en 2021. Sa principale fonction est de reprendre l’initiative face aux profondes oppositions que suscite la politique de la France sur le continent.
En dénonçant « le confort des grilles de lecture du passé, mesurant notre influence au nombre de nos opérations militaires », Macron tente de faire croire que le départ de l’armée française de Centrafrique, du Mali et dernièrement du Burkina Faso est du ressort de sa volonté politique. Si tel était le cas, rompre véritablement avec les « grilles de lecture du passé » supposerait notamment la fin de la présence militaire sur le continent. On en est loin, même si le maintien des troupes françaises en Afrique se pare dorénavant de l’ornement du partenariat. Une rengaine entendue depuis des décennies avec de piètres résultats. Et ce pour la simple raison que la plupart des armées africaines, comme les autres appareils de l’État, sont gangrénées par l’incurie, la corruption et le clanisme. Ces armées ont comme fonction première d’organiser des putschs et de protéger les dictatures.
Brochette de dictateurs
Ce que la presse a retenu du discours de Macron est sa prétendue volonté d’humilité. Une qualité que l’on n’attribuerait pas spontanément au président français, mais qui lui sert bien pour justifier son absence de critique des dictatures. Il avait déjà fait le coup en juillet 2022 à propos du pouvoir despotique de Biya au Cameroun en déclarant : « La France n’a pas de leçon à donner à qui que ce soit »
Vu le programme du voyage, de l’humilité il en a fallu des tonnes ! Puisque les quatre pays sont le Gabon avec un pouvoir des Bongo de père en fils depuis 1967, l’Angola dirigé par le même parti depuis son indépendance en 1975, le Congo-Brazzaville où Sassou-Nguesso tient les rênes du pays depuis 44 ans après un coup d’État sanglant, soutenu par Elf ancêtre de TotalEnergies et enfin la RDC où Tshisekedi a inversé le résultat des élections en magouillant avec Joseph Kabila. Tout ceci adoubé par le ministre des Affaires étrangères de l’époque Jean-Yves Le Drian, qui déclarait en février 2019 : « L’élection s’est achevée finalement par une espèce de compromis à l’africaine. Je ne vois pas pourquoi on le remettrait en cause aujourd’hui. Félix Tshisekedi est devenu président dans une configuration très particulière et propre à la République du Congo ».
Marketing verdâtre
C’est donc auprès de ces hôtes peu reluisants que Macron a joué les VRP pour les grandes industries françaises. Ainsi en Angola, outre TotalEnergies qui exploite 45 % du pétrole, Macron a tenté de vendre les industries agroalimentaires.
Au Gabon, dont l’espace forestier recouvre près de 80 % du territoire, Macron aide le fils Bongo à se parer d’une image écolo en co-organisant l’événement One Forest Summit. Une façon bien commode de faire oublier la passivité des autorités avec la société pétrolière française Perenco coupable de pollution. Un pouvoir qui fait aussi l’impasse sur les mines d’uranium de Mounana qui ont déversé pendant des décennies des produits radioactifs et laissé, avec la complicité d’Areva, les populations utiliser du matériel radioactif de la mine pour construire hôpitaux et écoles.
Dans sa déclaration, Macron affirme que « la France est un pays qui soutient, en Afrique comme ailleurs, la démocratie et la liberté ». Le bilan de son récent voyage est un démenti de son discours, son accointance avec les dirigeants corrompus était flagrante. Fortement rejetée en Afrique de l’Ouest, la politique française risque fort de l’être aussi en Afrique centrale.