En visite fin juin à Mayotte, après une première journée d’annonces sécuritaires contre les mal-logéEs et les migrantEs des Comores, Darmanin a abordé l’un des problèmes vitaux de l’île : l’accès à l’eau potable. Retour sur les causes structurelles de ce manque.
En juin, les coupures d’eau étaient imposées à Mayotte quatre jours par semaine de 17 heures à 7 heures du matin. En juillet, elles le sont six jours sur sept. Cependant Darmanin n’a pas hésité à affirmer : « On ne manquera pas d’eau potable à Mayotte, il y aura des bouteilles d’eau potable pour tous à un prix raisonnable, et le blocage de ce prix au 15 juillet ».
La sécheresse liée au réchauffement climatique
La température devrait s’élever à 32 degrés en moyenne pendant six mois par an dans les prochaines années si le réchauffement n’augmente qu’à minima, voire pendant huit mois, si la hausse est plus importante. Les grosses chaleurs actuelles produisent déjà des pluies irrégulières et torrentielles provoquant des inondations nombreuses mais très peu d’infiltrations dans le sol de villes trop bétonnées. La nappe phréatique est donc peu mobilisable et n’apporte que 15 % des ressources en eau. Le reste provient essentiellement de deux retenues d’eau collinaires et de cours d’eau. Bien sûr, plus il fait chaud, plus cette eau de surface s’évapore. Il suffit donc d’un manque constant de pluies régulières en hiver, suivi d’un été très chaud et sec pour que l’eau vienne à manquer. En plus du risque, pour les habitantEs, de déshydratation sévère ou de maladie liée à l’absorption d’une eau impropre, les richesses de la flore et de la faune sur terre et en mer disparaissent peu à peu, les cultures vivrières également, poussant à l’importation toujours plus grande de produits qui seront vendus trois fois plus cher qu’à Paris…
Une crise systémique de la gestion de l’eau
Pour obtenir de l’eau potable, il existe deux usines de dessalement et de potabilisation de l’eau, elles sont défectueuses et ne peuvent répondre qu’aux besoins de deux tiers de la population. Une extension de l’usine de dessalement gérée par une filiale de Vinci devait fonctionner à l’été 2022, mais la nouvelle date de mise en marche est maintenant pour la fin de l’année 2023. Une nouvelle usine devait aussi sortir de terre, mais les choses sont retardées. La gestion par le syndicat intercommunal d’eau et d’assainissement des infrastructures est également défaillante, les pertes d’eau traitées sont estimées à 30 %, et 30 % des habitantEs des bangas [habitations précaires fabriquées en tôles ondulées] n’ont pas l’eau. Alors, ils et elles doivent se rendre aux bornes fontaines, payantes et insuffisantes.
Une situation néocoloniale
Cette promesse minable de packs d’eau illustre bien le mépris de l’État français envers les habitantEs de cette île ! Peu lui importe le manque d’eau et le dérèglement climatique, ce qui l’intéresse dans ce département, confetti néocolonial bien situé dans le canal du Mozambique, c’est sa position stratégique en termes économiques et militaires. La France doit se plier à la volonté majoritaire des habitantEs de l’archipel des Comores et aux injonctions de l’ONU et de l’Union africaine, et quitter Mayotte !