Publié le Jeudi 4 juin 2020 à 16h12.

« Nissan ne fermera pas » : expropriation et reconversion écologique

Communiqué d’ « Anticapitalistes » de Catalogne, traduit et publié le 1er juin 2020 par NPA Auto Critique. 

« Anticapitalistes » apporte son soutien à la grève illimitée des travailleurEs de Nissan commencée le 4 mai dernier, et à leur lutte contre la fermeture des usines de Zona Franca à Barcelone, Montcada i Reixac et Sant-Andreu-de-La-Barca.

Nous voulons également adresser cette solidarité à touTEs les employéEs qui peuvent indirectement être jetés en dehors de l’entreprise par la multinationale. L’objectif de ce conflit est de réussir à maintenir des conditions de travail dignes pour les 25 000 familles de travailleurEs immédiatement menacées.

Nous considérons que la lutte contre la fermeture de Nissan va au-delà d’un conflit dans une seule entreprise spécifique – de grande taille – et que son résultat, par les problèmes qu’elle illustre, sera d’une grande importance pour l’ensemble de la classe ouvrière.

Le projet de l’Alliance Renault-Nissan-Mitsubishi de licencier des milliers de travailleurEs dans le monde entier s’inscrit dans une restructuration globale du secteur automobile mondial, à l’instar des 20 000 licenciements annoncés par la multinationale Continental. L’industrie automobile est dominée par une poignée d’entreprises multimillionnaires qui veulent garder leurs profits en aggravant l’exploitation et en détruisant des emplois. Le gouvernement Catalan a calculé que, dans la seule Catalogne, 40 000 emplois – soit le tiers du total – seraient menacés par le passage à la voiture électrique. Nous devons aussi nous préparer à de nouvelles offensives chez les équipementiers et Seat.

Un modèle désastreux

Le modèle qui a été suivi jusqu’à présent pour faire face à la crise de ce secteur – et d’autres similaires comme les mines de charbon – est inefficace et représente un échec social, économique et écologique. Les grandes entreprises ont reçu toutes sortes de subventions publiques, directes et indirectes, et s’en prennent aux droits des salariéEs en usant du chantage à la délocalisation. Cette dynamique a érodé le pouvoir des syndicats, à travers la concurrence entre les différentes usines, et a accentué la dépendance de toute la société aux caprices des directions des firmes multinationales.

Nous sommes au début d’un nouvel épisode de la crise capitaliste qui va aggraver la dureté de la lutte des classes. Dans ce contexte, les licenciements sont l’un des moyens des classes dominantes pour nous faire payer la facture et ainsi continuer l’énorme transfert de richesse, de bas en haut, au sein de toute la société. De même, chaque nouvelle implantation se traduit par une dépendance économique accrue au secteur finance-tourisme, construction qui domine le régime d’accumulation et produit des conditions de vie et de travail précaires.

Une défaite de la lutte engagée contre Nissan serait un coup dur pour les 25 000 personnes touchées et toutes les autres menacées de licenciement dans d’autres entreprises. En revanche, une victoire romprait avec le « pas d’alternative » et serait un tournant.

Reconversion sociale et écologique 

La crise écologique impose de réorganiser rapidement les moyens de production et de consommation pour en finir le plus vite possible avec les émissions de gaz polluants, réduire les consommations énergétiques et ralentir la perte de biodiversité. Nos vies valent plus que les combustibles fossiles et l’utilisation de voitures particulières.

Des secteurs tels que l’industrie automobile doivent jouer un rôle clé dans cette transition écologique, si nous ne voulons pas que les travailleurEs soient lésés par ces transformations nécessaires. Autant par leurs expériences de lutte que par leurs qualifications professionnelles, ils et elles sont en situation de pouvoir répondre aux changements drastiques qui s’imposent en matière de mobilité. Nous devons dès maintenant exiger un changement pour orienter la production vers du matériel de transport collectif, des composants pour les énergies renouvelables et un volume limité de voitures électriques.

La force de l’agression de la direction de Nissan rend obligatoire la question : « Comment gagner ce combat ? » Nous considérons, dans le but de protéger l’emploi, que l’issue est l’expropriation sans indemnités de Nissan, et qu’elle est plus que justifiée par les millions de subventions reçus.

Ce contrôle public et la reconversion de la production, avec des critères sociaux et écologiques, sont nécessaires pour engager un plan industriel de transition écologique de l’ensemble du secteur de l’industrie automobile. Ce processus pour l’avenir des usines Nissan doit être dirigé par les travailleurEs eux-mêmes et elles-mêmes, grâce à leur droit à l’autogestion et à la participation démocratique dans la société. Il est vrai que la mise en place d’un modèle de production socialement utile et durable nécessiterait une injection d’investissements publics notables. Il est également vrai que ce n’est pas une voie facile, mais c’est la seule option qui réponde aux défis qui nous attendent.