Publié le Mercredi 5 mai 2021 à 09h36.

Notre bon client, le dictateur

En Égypte, le maréchal Sissi fait régner une dictature plus impitoyable que celle de son prédécesseur Moubarak renversé en 2011. Depuis son arrivée au pouvoir en juillet 2013, des milliers d’opposantEs au régime ont été tués ou emprisonnés et plusieurs centaines d’autres ont purement et simplement disparu. Mais Sissi mène une politique économique qui complait au FMI : les mesures d’austérité se succèdent, les subventions aux produits de première nécessité baissent, la TVA augmente tandis que l’impôt sur le revenu des sociétés est réduit. La part de la population vivant dans la pauvreté ou la précarité est évaluée à 60 % et la corruption du cercle présidentiel est patente. La dette publique explose, alimentée notamment par les importations d’armes qui ont augmenté de 215 % en 2013-2017 par rapport à 2008-2012.

Rien d’étonnant à ce que Trump, au sommet du G7 à Biarritz en 2019, ait parlé de Sissi comme de son « dictateur préféré » !

En décembre 2020, Emmanuel Macron lui a remis la grand-croix de la Légion d’honneur… Ce qui a contenté un Sissi qui n’apprécie pas la moindre allusion à la répression en Égypte (et l’avait manifesté après quelques remarques assez timides de Macron en janvier 2019).

Ce contentement de Sissi semble bien se traduire concrètement. On vient en effet d’apprendre que l’Égypte va passer commande de 30 avions de combat Rafale supplémentaires ; elle en avait déjà acquis 24 en 2015. Au total, l’Égypte viendrait de signer un contrat d’un montant total de 3,95 milliards d’euros (aux 30 Rafale s’ajoutent des missiles et autres babioles).

Pour financer ses achats, l’Égypte va souscrire un prêt supplémentaire auprès de la France que Sissi remboursera en pressurant un peu plus le peuple égyptien (ou qui sera assumé par les contribuables français si l’Égypte se trouvait incapable de payer).

Cette vente confirme le poids de l’industrie française de l’armement : les exportations d’armes de la France (3e exportateur mondial) ont bondi de 44 % en 2016-2020. Cette « performance » s’inscrit dans un contexte de hausse des dépenses militaires mondiales : en 2020, celles-ci ont atteint 1 830 milliards de dollars, soit une progression en termes réels de 3,9 % par rapport à 2019, En France, on ne produit pas de vaccin contre le coronavirus, mais le commerce des armes prospère.