Daysi Zapata est vice-présidente de AIDESEP (ASOCIACION INTERENICA DE DESAROLLO DE LA SELVA PERUANA), organisation à la direction des mobilisations pour la défense de leur peuple et des leurs territoires, contre les tentatives d’applications du Traités de libre échange négocié entre les Etats-Unis et le gouvernement du Pérou et contre les accords d’associations négociés avec l’Union européenne et ce pays.
Ces traités et ces accords signifient la mainmise des multinationales états-uniennes et européennes, par l’exploitation des richesses naturelles des territoires, le déversement des produits chimiques, des substances dangereuses dans les rivières ou dans le sol, contaminant les nappes phréatiques, l’empoisonnant les peuples indigènes et les populations entières qui, dans la plupart des cas, sont des paysans, mais aussi des ouvriers.
Sous la répression du gouvernement Garcia, même si la lutte des peuples originaires a obtenu des victoires partielles, comment se trouve AIDESEP aujourd’hui ?
En ce moment AIDESEP se trouve dans une conjoncture très difficile, parce que le gouvernement a cherché à nous diviser, il a cherché à nous priver de nos directions, ce qui a amené à notre dirigeant à se réfugier au Nicaragua1, mais malgré ces actions, nous n’avons pas baissé les bras, au contraire, nous sortons plus forts, plus puissants. Nous sommes devant une situation très difficile, dans une crise terrible, et le gouvernement au lieu d’assumer leurs responsabilités, sont en train de chercher à convaincre les indigènes à prendre la table de dialogue. Devant cela, il y a une préoccupation de AIDESEP, qui probablement sera contrainte à rompre le dialogue, parce nous ne pouvons pas continuer à subir l’effort des dépenses qui font payer aux frères dirigeants. Mais je répète, nous en sortons forts avec la conviction de continuer les luttes revendicatives parce que AIDESEP ne va pas changer son orientation.
Quelles sont les questions prioritaires posées par AIDESEP aujourd’hui devant les évènements récents en Amérique latine – le coup d’Etat en Honduras, les bases militaires en Colombie, la répression contre les Mapuches au Chili ?
En ce moment AIDESEP doit suivre un agenda très difficile. En ce moment nous demandons au gouvernement d’arrêter la persécution de nos dirigeants, car il y a une forte persécution politique du gouvernement, ainsi nous ne pouvons pas nous asseoir dans une table de dialogue pendant que nos dirigeants sont en persécutés ou sont en clandestinité, ainsi il y a un grand travail de la part de AIDESEP, et nous allons aussi vers les luttes des autres pays frères. Nous devons être respectés, ainsi que les gouvernements doivent respecter les droits humains. Nous devons avoir un regard vers les nouvelles générations parce que sinon elles vont nous rendre coupable en quelque moment pour ne pas défendre l’écologie, l’environnement, pour ne pas défendre la mère nature. Les femmes, plus que jamais, marquent l’histoire avec la ferme conviction de plus grande participation dans la politique, de faire parti des gouvernements pluralistes, parce que le gouvernement les a toujours mis à l’écart. Mais nous sommes ici pour faire entendre la voix des femmes, la voix de la jeunesse, la voix des enfants.
Qu’est ce que c’est passé à l’occasion de la 75ème section du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale (CERD) à Genève ?
Lamentablement, je n’ai pas eu l’opportunité de participer à la réunion du CERD parce que l’ambassade suisse n’a pas voulu me donner le visa pour me déplacer vers l’Europe. C’est grâce aux amis des associations et partis français que j’ai pu venir. Je suis allé à la réunion, mais j’ai du partir en pleurant, quand j’ai pris la parole pour dénoncer la situation des peuples amazoniens quand on m’a fait taire et ne plus dire une parole. Ainsi je porte une mauvaise impression des Nations Unies, parce qu’il y a beaucoup d’injustices, mais ils ne nous écoutent pas. Nous y allons pour faire savoir sur la situation des peuples indigènes et non pas nous faire taire…
Les possibilités de retour de Alberto Pizango ?
Nous avons un travail d’ordre politique et technique pour faire revenir Pizango au Pérou. Nous ne tairons pas parce que Alberto Pizango est innocent. Il est l’un de nos dirigeants, est du Conseil national de AIDESEP et tout le mouvement dans son ensemble de l’Amazonie péruvienne mène un travail très important pour que le gouvernement change de position.
Que pensez vous faire pour le 12 octobre, jour de la Madre tierra (Mère nourricière) ?
Si en octobre il y a une initiative importante en Europe, je serai enchantée d’y participer pour faire écouter la voix des peuples, alors les partis pourront s'unir avec nous. Mais nous voulons aussi écouter les mouvements en Europe.
Nous vivons le moment de s’allier avec nous avec un seul poigne, une seule voix, pour pouvoir vaincre le gouvernement néo-libéral qui veut tuer le mouvement indigène et du Pérou entièrement.
Entretien fait le 16 agosto 2009 par Beatrice Whitaker.