Depuis lundi dernier, 23 septembre, la contestation de la hausse des prix de l'essence et du gaz s'est transformée en contestation du régime : les manifestations associent la dénonciation de la hausse des prix et celle de la chute du régime d'Omar al Bashir, une dictature militaire islamiste. Les manifestants crient le plus souvent "le peuple veut la chute du régime", slogan emblématique du "printemps arabe". Lacontestation partie semble-t-il des étudiants à Khartoum ( 7 millions d'habitants) et Ondurman s'étend peu à peu au reste du pays. Les affrontements avec les forces de l'ordre auraient déjà fait 50 morts, beaucoup plus selon certains témoins. Des stations services, commissariats, bâtiments gouvernementaux, sièges du parti au pouvoir (NCP) ont été dévastés ou brûlés. Le pouvoir a fait fermer plusieurs journaux et télés y compris certains qui passent pour être pro-gouvernementaux. Il pratique des coupures d'internet. Aujourd'hui samedi 28/09, alors que les journalistes ont appelé à une grève générale de leur profession, une nouvelle manifestation pacifique a commencé exigeant la chute du régime.Les blogs égyptiens tentent de faire passer l'information (l'Egypte et le Soudan ont formé pendant longtemps un seul pays)On peut suivre sur twitter #sudanrevolts ou #sudanchangenowLe site de "Sudan Change Now" avec une galerie de photoshttps://secure.flickr.com/photos/103117088@N06/Le site d'un blog égyptien (Egyptian Chronicles ) qui relate ce qui sepasse au Soudan avec vidéo et galeries photos.http://egyptianchronicles.blogspot.fr/2013/09/sudanrevolts-sudanese-are-doing-it.htmlhttp://egyptianchronicles.blogspot.fr/2013/09/sudanrevolts-returning-back-online.htmlhttp://egyptianchronicles.blogspot.fr/2013/09/sudanrevolts-it-is-martyrs-friday.htmlJacques Chastaing
Extrait de "Soulèvement contre la dictature au Soudan" de Gérard Prunier, paru sur le site Orient XXI http://orientxxi.info/magazine/soulevement-contre-la-dictature-au,0371IIl existait au Soudan ce vestige du « socialisme arabe » des années 1960 qui avait créé un relatif État-providence offrant de nombreux bénéfices à la population la moins aisée. Cet État-providence a peu à peu été démantelé par un mouvement « islamiste » dont les vues économiques étaient proches du libéralisme de Margaret Thatcher et Ronald Reagan.
Dans les années 1990, l’éducation est devenue un système à deux vitesses : il fallait payer pour avoir accès à un bon enseignement. Puis la santé a suivi le même chemin dans les années 2000. Toutefois, les subventions alimentaires qui permettaient de fournir les denrées de base à des prix raisonnables avaient été maintenues. C’est précisément leur abolition le 23 septembre 2013 qui a tout fait exploser. Pourquoi ? Parce que cette mesure intervient alors que le pays connait un taux de chômage de 20 %, que l’inflation tourne autour de 40-45 % depuis dix-huit mois et que d’après la chambre de la Zakat (charité islamique liée au gouvernement), le pays compte quatorze millions de pauvres (sur trente millions d’habitants). Le régime se justifie en avançant que leur financement coûte 3,5 milliards de dollars par an alors qu’il faut « réformer l’économie ». Mais ce qu’il omet de dire, c’est qu’au même moment, les dépenses militaires se chiffrent à 70 % du budget — dont 20 millions de dollars par jour pour la guerre.
Les choix du pouvoir sont clairs : les Soudanais doivent se résoudre à ne plus manger à leur faim (y compris les personnes ayant un emploi régulier) pour que le gouvernement puisse poursuivre une politique de militarisation à outrance et de lutte désespérée contre la majorité de la population