La situation syrienne semble stagner. Affrontements armés sur la majeure partie du pays, avec des avancées et des retraits des forces armées du régime, mais sans changement stratégique dans les rapports de forces militaires sur place.
Après la chute de Palmyre, la ville historique, dans l’est du pays, entre les mains de Daesh en mai, l’armée régulière mène une offensive depuis une semaine pour la récupérer. L’armée du régime soutenue par des combattants de Hezbollah étend son contrôle dans la montagne de Qalamon et attaque depuis peu la ville stratégique de Zabbadani. Une ville connue pour être un lieu dynamique des coordinations révolutionnaires.
L’ASL en tenaille
Aussi, les attaques contre les forces du régime à Alep depuis environ un mois battent de l’aile. Il y a deux regroupements de bataillons armés : un prénommé « Fatah Alep » regroupant une trentaine de bataillons, la plupart de l’Armée syrienne libre (ASL) et quelques bataillons islamiques « modérés », à l’exclusion de Jabhat al-Nusra et d’autres forces armées réactionnaires qui elles sont regroupées sous le nom de « Ansar Alsharia ». Ces deux regroupements militaires ont des objectifs contradictoires : le premier est pour une administration civile qui laisse la place aux conseils locaux, le deuxième est pour l’application de la charia islamique...
Cette même configuration, nous la retrouvons aussi dans le sud du pays : treize bataillons de l’ASL se sont rassemblés pour déclencher « la tempête du sud » fin juin dernier ; dans le même temps, les forces réactionnaires Jabhat al-Nusra et autres groupes djihadistes ont également créé « Ansar Alsharia » dans le sud.
L’Armée syrienne libre, bien qu’elle soit devenue la force la plus faible militairement, se trouve prise en tenailles entre les forces du régime et les forces réactionnaires de Daesh et al-Nusra et autres groupes djihadistes.
Pression kurde dans le nord
Au nord de la Syrie, les YPG kurdes, alliés à quelques bataillons de l’ASL, et aidés par les frappes aériennes de la coalition internationale dirigée par l’administration étatsunienne, ont pu libérer mi juin dernier la ville frontalière avec la Turquie Tell Abyad, mais aussi Aïn Aïssa sur la route de Al-Raqqah, le fief de Daesh, mais ils ont perdu cette dernière ville récemment.
Le contrôle par le PYD, le parti politique le plus important du mouvement nationaliste kurde, de la ville frontalière de Tell Abyad signifie qu’il contrôle aujourd’hui une bande de territoire continue de 400 km. Ce contrôle a eu pour effet une levée de bouclier du gouvernement conservateur turc qui menace d’intervenir militairement dans le nord de la Syrie : son but est d’empêcher l’émergence d’un canton kurde autonome en Syrie qui constituerait un exemple pour les Kurdes en Turquie même. Cela malgré les déclarations répétées des dirigeants des YPG et YPD que leurs actions ne constituent aucun danger pour les intérêts du gouvernement turc ni pour l’intégrité des territoires de « l’État syrien »...
Solidarité avec le mouvement populaire
Sur le plan politique, l’événement le plus marquant était l’appel du président russe Poutine le 29 juin à la constitution d’une coalition régionale contre Daesh qui doit comprendre la Turquie, l’Arabie saoudite, la Jordanie et le régime syrien du boucher Bachar el-Assad. Cette déclaration russe n’a pas encore reçu de réponse claire. L’enjeu est de reproduire le régime syrien avec quelques retouches, et d’affaiblir les capacités militaires et économiques du pays.
Malgré le recul qu’il connaît à cause de la barbarie du régime, la destruction du pays et la répression des forces réactionnaires comme Daesh et Jabhat al-Nusra, le mouvement populaire,reste vivant. Plusieurs villes syriennes ont connu récemment des manifestations contre ces forces : Beit Saham à côté de Damas, Idleb au nord–ouest ou Deraa dans le sud. Dans les régions sous contrôle du régime, les contestations se lèvent, dont l’appel à une manifestation le 18 juillet contre les exactions des milices progouvernementales dans la ville de Salamyeh dans le centre de la Syrie.
En dépit de sa faiblesse actuelle, les militants des coordinations et des groupes révolutionnaires démocratiques et de gauche s’appuient sur ce mouvement populaire, et essaient, dans les conditions les plus terribles, de forger dans la flamme d’une guerre impitoyable un avenir plus progressiste et humaniste au peuple syrien. Nous leur devons une solidarité internationaliste.
Ghayath Naisse