Publié le Mercredi 9 novembre 2011 à 22h17.

Un G20 contre les peuples

Les peuples grec et italien ont été invités malgré eux à la réunion du G20. En revanche, toutes les promesses de régulation des marchés financiers sont passées par pertes et profits. Le G20 a été instauré en 1999 après la crise asiatique de 1998. Son objectif officiel était de réunir les dirigeants des principaux États de la planète dans le but d’une « gouvernance mondiale » permettant de dépasser les intérêts propres de chaque État, la coordination de leurs différentes politiques économiques et l’établissement de cadres juridiques communs pour l’activité économique. Derrière cet affichage, il s’est toujours s’agit pour les États les plus puissants, USA en particulier, d’imposer la défense de leurs intérêts au nom de l’ensemble.

Il convient de donner l’apparence, comme le déclarait le président américain à Cannes, que « les gouvernements peuvent agir et ne sont pas condamnés à subir». Malheureusement pour les illusions, il ressort clairement du sommet de Cannes, et des précédents, que le monde de la finance dicte ses exigences aux gouvernements élus. Le premier invité fut, non pas le peuple grec, mais le référendum proposé par Papandréou. Quelles que soient ses motivations propres, il était insupportable à Merkel et Sarkozy, que l’on puisse convier des gueux à leur table. Depuis la Commission trilatérale de la fin des années 1970, (dont Barre et Delors étaient d’éminents membres), il est bien connu que les affaires économiques sont beaucoup trop sérieuses pour être soumises aux aléas électoraux qui constituent « un obstacle au développement économique ». La convocation pure et simple de Papandréou, par le couple franco-allemand, est une manière d’humilier non seulement le peuple grec, mais tous les dominés de la planète. Leurs génuflexions ultérieures vis-à-vis tant d’Obama que du président chinois Hu Jintao, que Sarkozy a attendu de longue minutes sur le perron, en dit long sur les rapports hiérarchiques entre ceux-là mêmes qui nous dirigent.

Le second invité a été le peuple italien auquel on a signifié sa mise sous tutelle par le FMI, chargé de vérifier que les injonctions des marchés financiers étaient bien suivies. Dans ces conditions, tout vote est inutile : les décisions sont prises ailleurs et par d’autres. Mais cela se justifie par le fait que l’Italie représente 17 % du PIB de la zone euro (contre 3 % pour la Grèce). Comme l’a souligné Barack Obama, « S’il y a contagion à des pays plus importants, nous pourrions finir dans une situation ingérable. » Outre le mépris affiché de toute démocratie, il est intéressant également de juger les résultats de ce sommet par rapport aux objectifs assignés par Sarkozy dans son discours du 21 janvier 2011.G vainCertes, les capacités financières du Fond de solidarité européenne (FSE) passent de 440 milliards d’euros à 1 000 milliards d’euros. Mais les modalités de cette augmentation ne sont pas définies. Sur ce point, il est clair que le président français a été renvoyé dans les cordes par les puissances dominantes. Alors qu’il entendait privilégier une articulation avec la BCE, favorisant une création monétaire propre, tant l’Allemagne que les USA ont tenu à garder la haute main sur le contrôle du crédit en contraignant le FSE à rester dépendant des marchés financiers. L’éventualité même d’une contribution chinoise a été examinée.

La déclaration finale du sommet se contente de vagues intentions ne comportant aucune contrainte pour les États sur la taxe sur les transactions financières dont seule la possibilité est évoquée ; le même flou est de mise en ce qui concerne l’harmonisation des conditions sociales. Quant à la régulation des marchés financiers, elle est renvoyée à la compétence du Conseil de stabilisation, créé en 2009, qui doit collaborer avec l’Organisation internationale des commissions de valeurs (OICV) pour une mise en place d’une maîtrise des marchés financiers. L’OICV a déjà tellement fait la preuve de sa capacité à contrôler les marchés financiers qu’elle a pour but de développer !

Lors du précédent G20 de Londres, l’engagement avait déjà été pris de lutter contre les paradis fiscaux. Dans un premier temps, nous avons vu la liste de ces derniers fondre comme neige au soleil, nous attendons toujours les mesures concrètes destinées à les contraindre de remettre en cause leurs activités…

La déclaration finale affiche la volonté d’augmenter la production agricole de 70 % d’ici 2050, ce qui doit ravir les producteurs d’OGM et autres pesticides et engrais chimiques. Tant pis, notamment, pour les algues vertes… L’idée de doter le G20 d’une institution stable permettant d’organiser la coopération permanente entre ses membres a été clairement refusée, les USA et l’Allemagne préférant garder les mains libres sur les décisions mettant en cause leurs intérêts propres. Seule concession apparente, le rythme des G20 va s’accélérer puisque le prochain est prévu dès juillet 2012, au Mexique.

En revanche, n’ont pas été invités les participants au Forum des peuples qui s’est tenu au même moment à Niono au Mali. Sans doute parce que leurs exigences étaient difficilement compatibles avec celles des maîtres de la finance…

Louis Adam