Six mois après son élection, Trump est le président américain le plus impopulaire depuis soixante-dix ans. Le milliardaire oscille entre 36 % et 40 % d’opinions favorables selon les sondages, soit vingt-trois points de moins que la moyenne de ses prédécesseurs...
Pris au piège de ses propres frasques, tweets et autres provocations, comme de son impuissance politique, il tente de reprendre les choses en main en faisant le ménage autour de lui.
Démissions et remaniements
Celui que le New York Times appelle le « porte-parole-Pinocchio », Sean Spicer, était fidèle à l’image de son boss, tant dans l’invective comme dans les contre vérités, bien que souvent pris de court par ses volte-face. Cependant, il a dû démissionner, invoquant un désaccord avec la nomination d’un nouveau directeur de communication, Anthony Scaramucci, un financier ancien de chez Goldman Sachs. Il est remplacé par Sarah Huckabee Sanders, une jeune Républicaine vouée à Dieu...
Trump a aussi remanié son équipe d’avocats suite à la démission de Mark Corallo qui la coordonnait face à Robert Mueller, le procureur spécial chargé de l’enquête sur une éventuelle collusion de Trump avec la Russie durant la campagne électorale. L’avocat personnel du président a, lui aussi, été écarté.
Le complot russe
Le mandat de Mueller est d’enquêter sur « tout lien et/ou coordination entre le gouvernement russe et des individus associés à la campagne du président Donald Trump », mais aussi « tout sujet » découlant « directement » de ces investigations. Il a étendu son enquête à l’éventuelle entrave à la justice qu’aurait représenté le limogeage du directeur du FBI, James Comey.
Interrogé lundi par la commission de renseignement du Sénat, le gendre du président, le millionnaire Jared Kushner, a admis avoir rencontré des Russes à quatre reprises, avant et après la campagne présidentielle, mais sans lien avec cette dernière... Le fils de Trump est entendu mercredi 26 juillet après les révélations sur sa rencontre avec l’avocate Natalia Veselnitskaïa, liée au FSB, le renseignement russe.
L’attorney général, le ministre de la Justice, Sessions, a été contraint de reconnaître qu’il avait eu deux entretiens avec l’ambassadeur russe à Washington, tout en affirmant, lui aussi, que ceux-ci n’avaient aucun rapport avec la campagne électorale... Et pour le moment, il s’accroche à son poste.
L’impuissance politique
Le psychodrame qui se joue autour de l’affaire russe est pour Trump une diversion alors qu’il affiche son impuissance politique. La réforme fiscale est toujours dans les limbes, le budget, qui doit être adopté avant le 1er octobre, n’a pas encore été examiné. Alors que les juges avaient autorisé le 30 juin une entrée en vigueur partielle du décret qui interdit l’entrée aux USA aux ressortissantEs de six pays musulmans (Syrie, Libye, Iran, Soudan, Somalie et Yémen), ainsi qu’aux réfugiéEs du monde entier, à l’exception des visiteurs pouvant prouver une « relation valable avec une personne ou une entité aux États-Unis », la Cour suprême est revenue en arrière...
Et surtout, Trump a été mis en échec par les Républicains eux-mêmes sur sa réforme de la santé, thème central de sa campagne contre l’Obamacare, aujourd’hui bien mal en point. Le nombre de travailleurEs privés de couverture progresse, alors que les compagnies d’assurance augmentent le coût des primes tout comme les franchises, alors Trump poursuit son projet d’alléger les taxes sur les hauts revenus.
Pendant que le pantin se livre à son numéro d’amuseur public, la machine fonctionne contre les travailleurEs et les classes populaires. Wall Street bat des records, les USA ont engagé les négociations sur l’Alena, le congrès s’apprête à reconduire les sanctions contre la Russie et l’Iran, les avions de chasse américains viennent de massacrer en Afghanistan 16 policiers afghans, et en Syrie, le Pentagone s’aligne sur Poutine... Mais la panique au sommet de l’État pourrait bien accélérer les manifestations d’un mécontentement exacerbé.
Yvan Lemaitre