Le cas de l’École supérieure d’art d’Avignon est l’exemple éclatant de la régression sociale consécutive aux décennies de réformes libérales visant à faire rentrer le service public d’éducation dans le moule idéologique du capitalisme. Depuis 18 ans, l’école est dirigée en despote par Jean-Marc Ferrari : recrutement du personnel, admission des étudiantes, projet d’école… tout ! Ce rêve libéral aboutit aux pires abus : harcèlement, éviction arbitraire des contestataires, absence de syndicat, chaos revendiqué, totalitarisme réel… Deuxième personnage de cette mauvaise pièce : Yvon Lambert, marchand-spéculateur millionnaire en art contemporain. Le musée de ce dernier étant mitoyen de l’école, il troque avec la mairie d’Avignon et l’État un fond de tiroir estimé à 90 millions d’euros contre les locaux de l’école remis à neuf aux frais du contribuable. M. Ferrari accepte immédiatement, en inventant le concept « d’école nomade », rendant ses étudiants sans locaux fixes dès juillet 2014. Coup de théâtre début juin : le roi vacille sur son trône. Trois plaintes sont déposées contre lui pour harcèlement moral et sexuel, et un groupe d’étudiants, soutenus par une ultra-majorité d’étudiants de l’école, par SUD Étudiant et SUD Éducation, se lance dans une lutte radicale. L’affaire est bien relayée par les médias locaux et fait même l’objet de cinq articles dans la presse nationale. Dans le domaine de l’art contemporain, ce type de soulèvement semble être attendu par beaucoup et depuis longtemps. Dès le début du conflit, Mme Roig, maire UMP d’Avignon, se prononce en faveur du directeur qui aurait « toutes les compétences ». M. Burdeyron, préfet du Vaucluse (aujourd’hui muté à Angers), convoque lui la presse locale pour lui demander d’arrêter de parler du conflit : « les difficultés de quelques étudiants [font couler plus d’encre qu’un] enjeu international : la donation de la Collection Lambert, plus grosse donation privée faite à l’État depuis le début du xxe siècle ». M. Ferrari ne trouve d’autre façon de répliquer que d’attaquer en justice le syndicat SUD Étudiant. Une plainte pour diffamation est toujours en cours d’instruction. Il demande également la fermeture du blog des étudiants en lutte… Mais le 12 septembre 2012, la justice donne raison au syndicat : le directeur ne pouvait porter plainte sans décision du CA de l’école. Il est donc condamné au dépens et à verser 1 500 euros au syndicat étudiant ! Mme Filippetti, ministre de la Culture, que les étudiants avaient interpellée lors du festival d’Avignon, a missionné un haut fonctionnaire, M. Oudart, pour mettre fin à ce conflit en ouvrant une commission de « conciliation ». Mais la balle reste dans le camp de Mme Roig, présidente de l’EPCC, la structure juridique qui régit l’école. Cette lutte est donc loin d’être terminée, une occupation de l’école est prévue pour début octobre et tout soutien moral ou financier est plus que bienvenu.Le Collectif de lutte de l’École supérieure d’art d’AvignonPlus d’infos sur : www.esa-avignon.fr