Le 14 mai dernier, les sénateurs et sénatrices ont adopté à la quasi-unanimité un projet de loi visant à « améliorer le dispositif de protection temporaire » activé dans la foulée de l’invasion russe de l’Ukraine, qui octroie le droit au séjour et à l’emploi à ses bénéficiaires.
Ce dispositif, mis en place pour que les populations déplacées d’Ukraine — en majorité ukrainiennes — ne demandent pas l’asile, s’est révélé un échec. La demande d’asile ukrainienne a en effet été multipliée par 3,7 en trois ans et les UkrainienNEs étaient, au premier trimestre 2025, la première nationalité à demander l’asile à l’OFPRA (Office français pour la protection des réfugiés et apatrides). Les perspectives de retour s’amenuisent, et la protection internationale offre plus de droits sociaux que la protection temporaire (PT).
De nouveaux droits mais pas trop, et toujours temporaires
Afin de dissuader les UkrainienNEs de demander l’asile, les sénateurs leur ont accordé le droit à l’allocation personnalisée d’autonomie (APA), à l’allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA) et l’allocation adultes handicapés (AAH). Le texte adopté prévoit aussi que les bénéficiaires de la protection temporaire soient éligibles au dispositif dérogatoire de vérification des connaissances pour les professionnels de santé hors UE, ce qui les dispense d’un concours et les admet à une épreuve de vérification des connaissances (EVC).
Le projet, porté par la sénatrice Nadia Sollogoub, incluait le bénéfice du RSA, mais cette proposition a été rejetée, les bénéficiaires de la protection temporaire n’auraient pas vocation à s’installer en France, selon les sénateurEs. Ces derniers, dans cet esprit, se sont donc bien gardés de toucher à la durée de l’autorisation provisoire de séjour (APS) de six mois qui entraîne des démarches incessantes en préfecture, pour que les bénéficiaires ressentent bien le caractère « provisoire » de cette protection « temporaire ». Le texte devra être discuté maintenant à l’Assemblée nationale. Ces menues avancées arrivent bien tard.
Séjour basé sur l’emploi
Depuis quelques mois, au niveau européen, les gouvernements songent à l’après-protection temporaire et offrent des alternatives de séjour basées sur l’emploi. C’est aussi le cas en France où la directive du Premier ministre du 4 décembre 2024 incite à des régularisations mettant l’accent sur l’emploi et la formation, régularisations au cas par cas et lourdes de danger pour les handicapéEs, les étudiantEs ou les personnes âgées.
C’est pourquoi un collectif d’une centaine d’organisations à travers l’Europe exige « une autre prolongation de la protection temporaire d’un an » et « une solution coordonnée et collective qui offrirait un statut plus durable et une voie vers la résidence à long terme » 1. En France, cela s’appelle une carte de séjour de dix ans !
Maria Puccini