Publié le Lundi 16 mai 2016 à 11h50.

« Appel des 100 » : 2017 comme unique horizon ?

En pleine mobilisation contre la loi travail, « gauche du PS », membres de l’ex-Front de gauche (PCF et Ensemble), d’EÉLV, syndicalistes et associatifs, lancent sous forme d’un appel une nouvelle initiative intitulée « 1er Mai, l’appel des 100 ». Cet appel se veut une alternative au PS... avec un seul objectif : les élections de l’année prochaine.

Ce texte se veut la base d’une alternative de gauche au PS en vue de la présidentielle et des législatives de 2017. Le but est d’aboutir à un socle programmatique commun et à des « mesures d’urgences » rompant avec la politique menée par Hollande. Ces mesures « constitueraient notre bien commun pour mener une campagne et construire des candidatures d’unité lors de ces échéances électorales ». De plus, ce texte servirait de base pour tenir des réunions dans toutes les régions dans les semaines à venir.Avec cet appel, alors que la candidature de Hollande s’affirme, c’est bien la fin de la primaire de la gauche qui est actée, mais aussi le refus de voir en Mélenchon le candidat naturel de l’alternative de gauche, ce qui scelle la mort du Front de gauche.

Le retour aux urnes ?

Au moment même d’une forte mobilisation contre la loi travail, du développement d’un mouvement remettant en cause à la fois les finalités et les structures du système capitaliste, dénonçant les règles antidémocratiques de la vie politique et des prises de décision, il est assez surprenant de voir un appel qui non seulement ne reprend en rien cette radicalité de contenu mais qui se moule entièrement dans le processus et l’agenda électoral.

En effet, cet appel n’a pas de contenu anticapitaliste, pourtant essentiel dans des mesures d’urgence. Dire que « Nous voulons contribuer à la transformation de notre société, par la remise en cause du productivisme et du consumérisme, par la redistribution des richesses (…), à rebours des politiques menées actuellement et sous les quinquennats précédents », et donc se contenter d’une logique redistributive et antiproductiviste sans toucher aux rapports sociaux et de propriété est loin d’être à la hauteur de la situation actuelle.Il y a urgence oui, mais à mettre en avant des exigences « transitoires » qui s’en prennent au cœur du système d’exploitation capitaliste, aux oppressions sociales qu’il structure et aussi aux institutions et aux règles antidémocratiques du système politique. Étonnant et attristant donc que la seule proposition que font les signataires de cet « appel des 100 » à toutes celles et tous ceux qui se mobilisent ces derniers mois soit simplement le retour aux urnes...

Quelles urgences ?

Les luttes sociales de ces derniers mois posent des éléments de résistance au système, des exigences, des revendications : elles tracent les voies d’une société guidée par la réalisation des besoins sociaux du plus grand nombre et se dotant d’outils politiques pour la réalisation de ces besoins, de débats, de choix, et de décisions pour une « démocratie réelle ». Luttes sociales et perspectives politiques (politiques, pas électorales) s’y mêlent en permanence.

Tous ces éléments de combat, de résistance se heurtent à la fois à une société de classe, brutale, déterminée à maintenir et à accroître l’exploitation, forgeant et reforgeant les institutions nationales et européennes pour qu’elles soient un lieu de pouvoir sans partage, entièrement dévouées au maintien du système, échappant de plus en plus à tout contrôle démocratique et populaire. À différents niveaux, l’expérience grecque, le rejet des migrantEs, les Panama papers ou le Tafta, ont mis en lumière ces derniers mois beaucoup d’éléments du fonctionnement réel de cette société.C’est de débattre de toutes ces questions qu’il y a urgence, pas de « se fondre » dans la realpolitik électorale en étant prisonnier du calendrier institutionnel...

Sandra Demarcq