Les conséquences de l’affaire Cahuzac n’en finissent plus pour le gouvernement Hollande-Ayrault. Après les questions démocratiques, l’affaire a ouvert un débat sur l’opportunité et l’efficacité de la politique d’austérité du gouvernement. Ce débat a été opportunément ouvert à l’intérieur même du gouvernement par trois ministres, Montebourg, Duflot et Hamon, qui se positionnent en faveur d’une autre politique économique. Une grande première car, jusqu’à aujourd’hui, aucune critique sur l’orientation économique n’avait été émise et encore moins au sein même du gouvernement. Seul Montebourg avait déjà osé hausser le ton par rapport à Florange, tout en acceptant et avalisant la politique d’austérité, les 20 milliards données au nom de la compétitivité aux entreprises sans aucune contrepartie, ou encore le bien mal nommé accord national dit de « sécurisation de l’emploi ». Bref des ministres qui ont défendu jusqu’à présent en toute solidarité l’ensemble de la politique du gouvernement auquel ils appartiennent.
Des ministres se lâchent...En moins de 24 heures, ces trois ministres sont sortis du bois la semaine dernière pour dire du mal, avec une très grande prudence, de la politique d’austérité du gouvernement. C’est le ministre du Redressement productif qui, dans une interview au journal le Monde, a commencé, fustigeant la politique d’austérité… « imposée par l’Europe ». Il accuse l’Europe et en particulier les Allemands et Merkel, mais n’émet aucune condamnation claire et nette de la politique économique menée en France… ce qui lui permet ainsi d’exonérer de ses responsabilités l'orientation du gouvernement et donc d'y rester ! Puis ce fut le tour de la ministre du logement, Cécile Duflot, dans une interview à Mediapart, de dénoncer « le coup de rabot ». Enfin, Hamon qui défend l'idée au micro de RMC que le gouvernement n’est pas responsable de la politique d’austérité mise en œuvre, mais qu’elle était appliquée en Europe « sous la pression de la droite allemande », propos réaffirmé une nouvelle fois dans le Parisien : « L'austérité (appliquée) en Europe (…) peut nous conduire dans une impasse et à une France low-cost ».Face à ces critiques timorées, Hollande a été clair : « Aucun ministre ne peut remettre en cause la politique qui est conduite, qui n'est pas l'austérité » et même d’ajouter que « la politique que je conduis est celle qui permet d'éviter l'austérité ». En un mot, on maintient le cap !
Affronter notre gouvernement Mais le mécontentement de la politique menée dépasse largement ce triumvirat ministériel. Reflet du discrédit vitesse grand V dont souffre ce gouvernement, il est aussi présent chez bien des députés et au sein même du Parti socialiste. Un mécontentement tellement important que certains ont cru que le texte de la direction du PS serait minoritaire lors du conseil national du parti le week-end dernier. Il a fallu que certainEs récalcitrantEs, en particulier du courant Hamon, rentrent dans le rang pour éviter la berezina…Il ne faut pas tourner autour du pot, et toutes les critiques, voilées ou non, ne permettront pas de faire l’économie de la question centrale : combattre le monde de la finance ou se soumettre ? Porter le fer contre la domination de l’argent, des relations avec les milieux affairistes et financiers, ou la subir ? Aujourd’hui, aussi bien les trois ministres récalcitrants que la majorité des députés ont acté le fait de s’y soumettre, en continuant de voter des lois de régression sociale, entre autres la récente loi dite de « sécurisation de l’emploi ».Nous sommes confrontés à une offensive générale du gouvernement qui ne cesse d’accentuer les politiques d’austérité, et faire porter la responsabilité sur Merkel et les « allemands » est un enfumage, s'appuyant sur le chauvinisme le plus réactionnaire. L’austérité, c’est la marque de fabrique bien nationale de ce gouvernement et de l’ensemble de ses ministres, ici comme au niveau européen. Ainsi, pour choisir de pressurer de façon odieuse le peuple chypriote, les socialistes français étaient bien de la partie ! Comme quoi, le problème n'est pas de changer la gauche, c'est bien de changer de gauche… Pour une gauche de combat !Sandra Demarcq