Victor Hugo en 1849 appelait à la construction d’une « fraternité européenne » des nations. Les politiques capitalistes éloignent de plus en plus l’Europe de cet idéal, même si, à chaque étape de la construction européenne, les dirigeants ont promis des « lendemains qui chantent »...
L’Union européenne est née après la Seconde Guerre mondiale avec une double détermination : l’aspiration des peuples à ce qu’il n’y ait plus de guerres en Europe, mais aussi (et surtout, pour les dirigeants européens et des États-Unis) reconstruire au plus vite une Europe capitaliste. À chacune des étapes, les dirigeants ont vendu leurs décisions avec deux slogans : « l’Europe, c’est la paix », « Plus d’Europe, c’est plus de prospérité ». Par « plus d’Europe », il fallait comprendre le renforcement de « leur Europe ». L’Acte unique européen de 1986 a représenté une étape décisive : il fonde désormais l’Union européenne sur la libre-circulation des marchandises et des capitaux. Pour le soutenir, la Commission européenne (présidée par le « socialiste » Jacques Delors) présente alors des prévisions économiques mirifiques sur son impact. Elles ne se concrétiseront pas... Même scénario avec la création de l’euro par le traité de Maastricht en 1992. L’euro protégerait les Européens des chocs extérieurs, et favoriserait la croissance et donc l’emploi. Il ferait de l’Europe une grande puissance monétaire, etc. Et à chaque étape importante, le scénario se répète : c’est le choix entre l’Europe et le chaos, la régression. Dans une tribune récente, Hollande avance même que « sortir de l’Europe, c’est sortir de l’Histoire » !
L’euro n’a tenu aucune de ses promessesLe problème, c’est que l’Union européenne actuelle, modelée par la droite et les « socialistes », offre de plus en plus un visage repoussant pour « ceux d’en bas ». L’euro n’a tenu aucune de ses promesses : il n’a protégé, ni de la crise, ni du chômage de masse, ni de la concurrence entre économies capitalistes. Au contraire, il est le prétexte à une austérité budgétaire sans précédent et à une attaque généralisée contre les droits sociaux. Retraites, salaire minimum, protection sociale, système de négociations collectives : désormais, la Commission (avec le soutien du Conseil européen ou siègent les États membres) se mêle de tout, allant au-delà des compétences budgétaires que lui donne le TSCG (traité sur la stabilité et la gouvernance budgétaire de 2012). Il existe une inégalité grandissante entre les États membres : certains (Grèce, Portugal, Espagne, Chypre, Irlande) sont sous tutelle et, pour ceux-là, pas question de ne pas se plier aux injonctions de la Troïka (BCE, Commission, FMI). Dans ces pays, ce n’est pas seulement l’austérité qui règne mais une remise en cause systématique des accords collectifs, des règles du contrat de travail : tout vise à ce que le salariéE soit privé de protection collective. Les évolutions en cours dans ces pays annoncent ce qui sera généralisé demain si les travailleurs ne s’en mêlent pas.
Contre les mensonges des fossoyeurs de l’EuropeLe décalage est désormais évident entre les discours des gouvernants et l’Europe réelle à laquelle sont confrontés salariés, petits agriculteurs, retraités, chômeurs. Les mensonges des gouvernements actuels, de gauche et de droite, sont les fossoyeurs de l’idée européenne aux yeux de « ceux d’en bas ». En France, le PS fait campagne aux Européennes avec comme mot d’ordre « l’austérité en Europe est une erreur ». De qui se moque-t-on ? Jamais aucun gouvernement français de gauche (avec Mitterrand, Jospin ou Hollande) n’a voulu taper du poing sur la table et mettre en avant une autre politique. Ne nous trompons pas de responsables : il ne s’agit pas de dénoncer « l’Europe allemande » mais les mensonges répétés des tenants de l’Europe du capital et d’avancer une autre politique : en rupture totale avec les traités de l’Union européenne, mais dans la logique de la solidarité internationale des travailleurs et des peuples.
Henri Wilno