C’est donc parti pour une nouvelle année qui a inévitablement débuté par les traditionnels « vœux » du président. Du baratin, des grands mots, de fausses grandes idées, des banalités... Juste de quoi nous enfumer pour nous anesthésier, encore et encore...
La situation est plus difficile, voire catastrophique, pour une majorité de la population : il y a plus de chômage, de précarité, de pauvreté pour des millions de personnes, plus de violence sociale, plus de répression, plus de brutalité policière... et toujours moins de services publics, moins de libertés publiques. Mais pour le gouvernement, sa politique va dans le bon sens : avec un peu de patience, on sortirait même du tunnel de la crise !
Résister à la machine à piller les richesses
Il faut beaucoup d’hypocrisie et de cynisme pour afficher une telle satisfaction de leur action. Il faut aussi une grosse dose de mépris et d’arrogance, qui correspond à celle du camp des possédants qui profitent de la crise d’un système pour s’enrichir encore plus aux dépens du camp des travailleurs et des plus démunis.
Leurs richesses indécentes (profit, fortunes, dividendes, fraudes…) sont le résultat d’une machine infernale de pillage des richesses collectives, une machine qui détruit tout – les protections sociales comme l’environnement –, qui casse les solidarités, produit des préjugés qui divisent et fragilisent la population.
Il s’agit d’un système économique complètement fou que le pouvoir accompagne logiquement d’une politique qui vise à empêcher la contestation. Cela se traduit par la remise en cause des droits économiques et politiques, les limitations des libertés de protester et de manifester. Une machine qui dans le même temps refoule les migrantEs et exclut les pauvres.
Il n’y a aucune fatalité là-dedans. Tout cela relève d’une véritable guerre de classe menée par les possédants. Plus ils détournent entre leurs mains, plus le rapport de forces est en leur faveur... et plus ils volent, ils prennent, ils reprennent !
Combattre la résignation, se préparer à riposter
Un réel danger existe pour nous, pour notre camp social. De fait, il y a urgence à stopper les politiques d’attaques et de reculs sociaux. Et ce n’est pas en baissant la tête, en espérant passer à travers les coups, pas plus qu’en attendant que ça passe... Il faut riposter, ou plus précisément préparer rapidement une riposte. Plus facile à dire qu’à faire tant la résignation, la démoralisation touchent nombre d’entre nous, y compris dans les rangs militants.
Mais 2016, ce ne sont pas que des motifs de désespérer, bien au contraire. Le gouvernement et le pouvoir sont bien placés pour le savoir. À nous surtout d’en prendre conscience. Malgré tous les dispositifs mis en place pour étouffer les contestations, les résistances se sont avérées nombreuses et diverses durant l’année écoulée. Des luttes qui ont su faire reculer ou au moins faire trembler les dominants. C’est le cas de la bataille contre l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes ou celle contre l’enfouissement de déchets nucléaires à Bure dans la Meuse. Combien aussi de luttes dans la santé, à la poste, ont permis de contrer les mauvais plans des directions ?
Et puis surtout, les quatres mois de mobilisation contre la loi travail ont montré la capacité des jeunes, étudiantEs ou précaires, des salariéEs, tout simplement du monde du travail de relever la tête, de s’opposer aux projets ultralibéraux. Un mouvement qui a remis au goût du jour les idées de la contestation, les aspirations au progrès social, à une autre société, à un autre monde... Certes nous n’avons pas gagné : la loi travail est bien passée parce que nous n’avons pas réussi à inverser le rapport de forces du fait de nos faiblesses, particulièrement parce nous n’avons pas abouti à un mouvement d’ensemble profond, capable de bloquer l’économie. Mais les possibilités existent, et les raisons d’y croire sont bien réelles.
Porter largement une perspective de rupture anticapitaliste
Pour nous, l’espoir est bien là pour cette nouvelle année. C’est d’ailleurs tout le sens de notre campagne ces prochaines semaines dans le cadre de l’élection présidentielle : défendre une perspective de rupture anticapitaliste. Une perspective non pas électorale, mais pour les résistances, pour les luttes de notre camp, pour le progrès social, pour changer nos vies : cela passe par interdire les licenciements, réduire massivement le temps de travail, socialiser les banques, développer les services publics de l’énergie et des transports, arrêter le nucléaire…
Nous défendrons l’idée qu’une autre société est possible, et que pour cela, il faut se représenter soi-même, prendre nos affaires en main, faire de la politique nous-mêmes pour une vraie démocratie. Cela passe ici par l’égalité des droits entre toutes et tous, ainsi que par l’ouverture des frontières et la liberté de circulation, pour une solidarité internationale entre les travailleurEs et les peuples.
Tout un programme, le nôtre. Le défendre, le porter largement, c’est tout ce que nous nous souhaitons, collectivement, pour cette nouvelle année.
Philippe Poutou