Publié le Lundi 8 février 2021 à 20h30.

Darmanin doit démissionner !

Nous avons tenté de lister de façon synthétique les raisons pour lesquelles nous nous battons pour la démission de Gérald Darmanin du poste de ministre de l’Intérieur. Nous ne nous faisons guère d’illusion quant à la probabilité de cette démission, ni quant à l’efficacité d'une telle décision sur le cours de l’histoire, mais ça ferait de l’air. 

Homophobie politique

Gérald Darmanin a commencé sa carrière au côtés de Christian Vanneste, dont il a été l’attaché parlementaire, ainsi que le directeur de campagne pour les législatives de 2007 et les municipales de 2008. Christian Vanneste avait été poursuivi pour complicité de provocation à la haine envers les homosexuels, puis relaxé, en avril 2014, après avoir nié la déportation des homosexuels en France durant la Seconde Guerre mondiale. L'ancien député UMP (ex-LR) en avait alors profité pour accuser le « lobby homosexuel » d'être responsable de sa « quasi-exclusion de la vie politique ».

En 2012, Gérald Darmanin était de toutes les « Manifs pour Tous », depuis l’Assemblée nationale, encore sur les bancs de l’UMP, il luttait contre l’ouverture du mariage pour tous qu’il qualifiait de « néfaste réforme de société ». Sur Twitter, visionnaire, il déclarait : « Si je suis maire de Tourcoing, je ne célébrerai pas personnellement de mariages entre deux hommes et deux femmes. »

Et le voici depuis juillet 2020 premier flic de France, dans un gouvernement qui propose l’ouverture de la PMA (marchande et discriminante, soit). Alors est-il devenu gay friendly au côté de Marlène Schiappa, ou bien la quête du pouvoir prime-t-elle? 

On se souvient que, pendant le remaniement de juillet 2020 Darmanin tenait à ce poste. Il avait, dit-on dans les salons, menacé de démission et de « retourner dans le nord » s’il n’avait pas Beauvau. Le capricieux.

Il aime les postes, c’est le ministère ou rien. Les idéaux politiques, il s’en fout. Ses années « Manif pour Tous » où il récitait le catéchisme de la famille traditionaliste est, dit-t-il, révolu. Opportunisme ou déradicalisation… nous avons notre petite idée.

Nous ne croyons pas à sa rédemption. Ni oubli, ni pardon.

Plainte pour viol et conflit d’intérêts 

Gérald Darmanin a été désigné, par le Premier ministre, à l’Intérieur, alors qu’il est accusé par deux femmes d’avoir profité de sa position d’élu pour obtenir des faveurs sexuelles. Une plainte pour « abus de faiblesse » a été classée sans suite, la seconde,  pour « viol », « harcèlement sexuel » et « abus de confiance » sera jugé prochainement. Il aurait promis, d’après le récit de la victime, d’intervenir en sa faveur concernant une demande de logement. Le ministre, qui bénéficie, comme il se doit, de la présomption d’innocence, a toujours parlé d’une relation « consentie » et réfuté plus largement tout « abus de pouvoir ».

Ne le « cancellons » pas trop vite, si ça se trouve c’est un gars bien.

Le 10 juillet dernier, Caroline De Haas résumait la situation : « Est-ce qu'on peut imaginer un seul instant qu'un homme mis en cause pour un crime soit nommé ministre ? Le seul crime pour lequel on accepte ça c'est le viol, comme si le viol n'avait pas d’importance ». La situation devient encore plus cocasse quand on considère que, comme ministre de l’Intérieur, il dirige les services d’enquête, chargés d’investiguer la plainte qui le vise comme citoyen. « Conflit d’intérêts », vous avez dit « conflit d’intérêts » ?

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La chasse aux « séparatistes »

Dans le climat de l’automne 2020, marqué par les discours sur l’été « orange mécanique » venus de l’extrême droite et ses porte-parole, marqué aussi, par la dénonciation du prétendu « ensauvagement », toujours marqué par les débats provoqués par le dossier abjectement raciste de Valeurs actuelles dessinant la députée LFI Danièle Obono en esclave, la série d’attaques dont l’immonde attentat de Conflans-Saint-Honorine ont révélé, ou réveillé, dans toute une partie de la population, la peur d’un ennemi intérieur.

Gérald Darmanin, entre deux confessions sur les rayons halal et casher qui le choquent, s’attèle au lancement de la grande loi contre le « séparatisme ». Voyant que les masses, confuses, obnubilés qu’elles sont par le séparatisme de classe qu'exercent les riches, ne comprenait pas bien ce que le « séparatisme » venait faire là-dedans, le gouvernement l’a renommée : « Projet de loi confortant les principes républicains ». Lesquels ? C’est Darmanin qui y répond dans le journal la Croix : « Les catholiques n’ont rien à craindre ». Et Schiappa de continuer sur des lamentables amalgames entre polygamie et nationalité étrangère, expliquant que les situations de « polygamie de fait » déboucheront sur… des expulsions du territoire. 

Dans sa croisade contre le séparatisme, le ministre tente de dissoudre nombre de mosquées et d'associations, dont le CCIF. 

Quelques mois plus tard, Après plusieurs provocations du groupuscule Génération identitaire, notamment dans les Pyrénées, où ils ont organisé une opération de communication pour faire la chasse aux migrantEs, la question de la dissolution de cette organisation est posée par la rue et sur internet. C’est alors que nous apprenons par un tweet de l’organisation fasciste Action française que Gérald Darmanin avait participé, dans sa jeunesse, à un camp d’été de l’organisation royaliste. L’histoire ne dit pas si c’est Nathalie Loiseau qui réveillait au clairon la bande de scouts homophobes.

Ministre de la « haine anti-flic »

À la sortie du premier confinement, la première manifestation d’ampleur a été une manifestation contre les violences policières organisée par le collectif Justice et Vérité pour Adama. En résonance avec la puissance du mouvement Black Lives Matter aux USA, répondant à l’assassinat de George Floyd et suite aux nombreuses violences policières du confinement, la manifestation a rassemblé plus de 20 000 personnes sur le parvis du tout nouveau tribunal de Paris. À la rentrée, plusieurs événements marquent les esprits. D’abord, place de la République, la police déloge violemment des migrantEs, on découvre alors des images insoutenables de policiers secouant des tentes comme de vulgaires sacs à patates alors que des gens s’y trouvent encore. Puis, les images du journaliste David Perrotin révèlent les violences policières qu’ont subies le producteur de musique Michel Zecler et ses collaborateurs. Le tout agrémenté d’insultes racistes. Comme un lundi.

Dans la collection Darmanin automne-hiver 2020 il reste un article 24 en taille XXL, le premier flic de la « haine anti-flic » a lancé sa « proposition de loi relative à la sécurité globale » aussi appelée « loi floutage de gueule » ou également « drones partout, justice nulle part ». Pour résumer, filmer les violences policières : NON. Filmer la population à l’aide de drones : OUI. Le tout avec des attaques sans précédent contre la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse. La mobilisation unitaire a fait face à une sévère répression policière, notamment les 5 et 12 décembre 2020. Mediapart a révélé le caractère illicite de plusieurs dizaines de charges policières effectuées le 12 et documenté les arrestations arbitraires de manifestantEs, les coups portés sans raison et la communication mensongère de Gérald Darmanin, notamment au regard du bilan judiciaire. Notamment oui.

Dans la série « concours international des sosies de Sarkozy », on se souvient également de l’épisode des dealers de Grenoble. Cet été, une vidéo avait fait le buzz sur le réseau social Snapchat, elle montrait des dealers surarmés du quartier Mistral de Grenoble. Certainement entre deux SMS (Supprime mon numéro Gérald), le ministre Darmanin, voyant le sujet monter sur Twitter, lance une spectaculaire opération de communication policière qui ne se conclut que sur un maigre résultat avec 50 consommateurEs de drogue contrôlés et deux scooters saisis.

Quelques jours plus tard, on apprendra que la vidéo en question était une vidéo promotionnelle pour un clip de rap.

Cela n’a pas empêché le ministre de vociférer contre « cette merde » qu’est la drogue (sic) Depuis septembre, alors, tout consommateurE de stupéfiants (cannabis et cocaïne) peut être directement verbalisé par la police sur la voie publique. Les consommateurEs s'exposent désormais à une amende forfaitaire délictuelle de 200 euros (150 euros dans les douze jours, 450 euros au-delà de 45 jours) ainsi qu'à une inscription au casier
judiciaire et dans un fichier national spécialisé pour une durée de dix ans.

Or, si cela flatte l'électorat de droite, la contraventionnalisation ne répond pas aux enjeux posés par les consommations de drogues, et elle renforce l’arbitraire policier, l’arbitraire raciste.

Chasse aux migrantEs généralisée

L’affaire de la place de la République n’est que la pointe émergée de l’iceberg. Il y a eu plus de 66 évacuations depuis le début de l’année. Alors que l’épidémie de Covid-19 n’est pas maitrisée, et que les sans-papiers, les migrantEs, sont vulnérabilisés par cette nouvelle épreuve, une chasse à l’homme aux dimensions innommables a pris place en région parisienne. Jean-Jacques et Philippe, membres du collectif Solidarité Migrants Wilson à Saint-Denis, avaient déclaré à l’Anticapitaliste : « L’action à République, le 23 novembre, a rendu visible l’ultra violence subie au quotidien par les migrantEs. Depuis, les préfets de Paris et de Seine-Saint-Denis cherchent à faire disparaître les migrantEs et à casser toute dynamique d’entraide et de mobilisations collectives. Le préfet Lallement s’oppose à des solutions de relogement temporaire au Parc des expositions de la porte de Versailles. Tous les prétextes sont bons pour empêcher un accueil collectif. Son argument : les bâtiments ne sont pas aux normes Covid. Il n’a qu’une sale idée en tête, les chasser de Paris.” »

Voici quelques raisons, non exhaustives, pour lesquelles nous nous battons pour la démission de Gérald Darmanin de son poste de ministre de l’Intérieur.
« Manif pour Tous : au placard ! Les homophobes, y’en a marre ! »