Elle rêverait bien, en cette rentrée 2012, d’être la cheffe – vraie et unique – de l’opposition. Ainsi Marine Le Pen déclare-t-elle, tout de go, au petit matin du 4 septembre au micro de BFMTV et RMC : « Je suis la leader de l’opposition au système. »Une démagogie dont la tonalité est connue, mais qu’il s’agit pour la chef de file de l’extrême droite de décliner en nouvelles variantes à chaque rentrée. Aujourd’hui, la cheffe du FN mise sur l’opposition au Traité européen « sur la stabilité, la coordination et la gouvernance » (TSCG), selon sa dénomination officielle. Ce nouveau traité européen, négocié le 30 janvier et signé par 25 des 27 chefs d’État de l’Union européenne le 2 mars dernier, consacre la prétendue « règle d’or », qui interdit aux pays membres d’avoir des budgets déficitaires. Ainsi il y a de très bonnes raisons de refuser ce nouvel ensemble de règles imposant une austérité accrue, dans la mesure où il contraint les États à adopter des budgets excédentaires. Or, comment toujours en matière de politique européenne, au « Non de gauche » – antilibéral en matière économique, défendant des impératifs sociaux et critiquant l’absence de démocratie au niveau de l’espace européen – fait face un « Non de droite » dont les motifs sont fondamentalement différents ? Un « non » nationaliste, hostile aux règles supranationales en raison de leur niveau d’adoption en non pas de leur contenu social, hostile à tout « transfert de souveraineté », xénophobe.La première semaine de septembre, Marine Le Pen a annoncé : « Nous ferons une action de grande ampleur pour redonner la parole à ceux qui sont toujours les Français oubliés et les Français invisibles, ceux à qui on ne demande pas leur avis ».Jusqu’à aujourd’hui, la chef du FN n’a cependant pas précisé la nature de cette « action », sauf qu’elle a évoqué « une grande campagne politique avec plusieurs supports ».Ce dernier terme laisse plutôt penser à la sortie de tracts ou d’autres écrits imprimés par le parti, et pas tellement à une mobilisation dans la rue ; alors que le « Non de gauche » ou une partie de celui-ci prendra le bitume le 30 septembre. Apparemment le FN, de son côté, se prépare plutôt à une campagne autour de lui-même et censé avant tout renforcer le parti.Sur un autre point, l’actualité de ces derniers jours a quelque peu aidé Marine Le Pen à développer son discours idéologique. Ainsi, traditionnellement, la justice fiscale est un thème plutôt compliqué pour le parti d’extrême droite. Historiquement ancré dans une ligne de tradition poujadiste et marquée par la démagogie anti-impôts, le FN aurait quelque peu de mal à défendre la nécessité de faire payer davantage d’impôts aux plus riches.L’annonce du patron de LVMH qu’il demandera la nationalité belge – mesure avant tout propagandiste destinée à maximiser la pression sur le gouvernement, dans la mesure où il annonce en même temps « rester résident fiscal en France » – permet à la cheffe du FN de se « révolter » à peu de frais. Et de transporter, tout en personnalisant à l’extrême le thème de la justice fiscal, le débat sur le terrain de l’idéalisme patriotique. Ceci en faisant disparaître l’égoïsme de classe que représente Bernard Arnault, derrière la soi-disant « trahison » individuelle à la nation. Ainsi Marine Le Pen se montre-t-elle « très choquée », avant tout, « que l’on puisse tenter d’obtenir une nationalité uniquement pour défendre des intérêts financiers ». Et la cheffe du FN de faire immédiatement le parallèle avec ces immigrés qui, selon elle, « viennent en France et cherchent à avoir la nationalité française uniquement pour des raisons pécuniaires ». Ainsi, pour elle, la boucle est bouclée et le problème n’est plus l’égoïsme social des plus riches, mais bien celui – prétendu – des immigrés…