Publié le Samedi 22 juin 2013 à 17h18.

Gauche & nationalisme : le piège

« Pour ceux qui s'intéressent à la vie, personne n'a envie d'être allemand. Ils sont plus pauvres que la moyenne, ils meurent plus tôt que les autres, ils n'ont pas de gosses, et leurs immigrés foutent le camp parce qu'ils ne veulent plus vivre avec eux, c'est dire »…Ridicule et dangereux.

Mélenchon aurait-il dérapé dans l'émission « Tous politiques » sur France Inter le dimanche 9 juin, en se laissant aller à ces propos aux relents xénophobes ? Était-ce une façon de rechercher les formules choc qui le rendraient plus proche du « peuple » ? Mélenchon va dans le sens du poil en défendant des idées nationalistes qui s’abritent derrière le fait que l’Allemagne occupe une position dominante dans l’Union européenne. Interviewé par la Libre Belgique le 15 juin, il déclare : « L’Allemagne impose cette politique à tous les autres pays européens, car son gouvernement dépend entièrement des rentiers allemands. 15 % de cette population dépend de retraites par capitalisation, il lui faut un euro fort et des dividendes élevés. L’Allemagne joue donc un rôle particulièrement néfaste en Europe… Certes, la France, qui est la deuxième économie, propose aussi cette politique d’austérité qui mène à davantage de désastres économiques, toujours plus de pauvreté, ainsi qu’une montée de la droite extrémiste. »On apprend donc là que les responsables des politiques d’austérité en Allemagne, et par voie de conséquence en France et dans le reste de l’Europe seraient… les « rentiers allemands »… qui ne sont autres que les retraités !

SurenchèresComment Mélenchon peut-il prétendre vouloir combattre le Front national et en même temps défendre l’idée d’une « France » où les intérêts des classes populaires pourraient être conciliés avec ceux des classes dirigeantes ? À l'entendre, il suffirait de « réorienter » la politique du gouvernement, de l’obliger à un changement de cap. Contre l’Allemagne ?Au PS, on prépare les élections européennes en voulant faire croire à un conflit entre une Europe des conservateurs et une Europe des progressistes, dont le gouvernement Hollande ferait partie. Certains, dans son aile gauche ou pas, ont flatté ou flattent le même nationalisme. « Je l'ai dit et j'assume mes propos, la confrontation avec l'Allemagne est nécessaire, et elle se situe sur un plan idéologique ; l'Europe de l'austérité contre l'Europe de la croissance, l'Europe des disciplines contre l'Europe des solidarités », disait tout récemment Claude Bartolone.Alors que le Front national est donné par des sondages à 18 % aux européennes, devant le PS, cette démagogie participe du renforcement des idées réactionnaires dont le FN est le seul gagnant. Face à des gouvernements, de gauche comme de droite, qui, dans toute l’Europe, mettent en œuvre des politiques d’austérité parce qu’ils sont au service de la même oligarchie capitaliste et financière, plus que jamais, le repli national est un piège. La lutte des travailleurs et des classes populaires contre l’austérité ne connaît ni frontières ni préjugés.

Galia Trépère